Chapitre 53

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Chapitre 53

Déferlante 


A peine avaient-ils posés leurs semelles sur les dalles de grès du jardin, que leur magie explosèrent, engendrant une vibration sourde dans les airs. De la fumée épaisse et noire se dégageait de tout le corps de Faust, ondulant dans l'atmosphère et faisant éclater des paillettes de feu, qui voltigeaient tout autour de lui. Ses prothèses avaient changées de forme, comme bouillonnantes, prenant des airs anguleux et agressifs, c'étaient devenues des armes qu'il se réjouissait d'avance de planter dans la poitrine de Dérime. Son sang pulsait dans ses veines, tant et si bien qu'elles brillaient sous sa peau, comme transformées en lave. Ses iris étaient enflammés et entouraient ses pupilles noires comme le charbon. Il montrait ses canines étincelantes, le cou rentré dans ses épaules, déjà prêt à bondir. Son souffle était profond, caverneux et avait l'odeur de la poudre. Dans son ventre, ses entrailles le brûlaient de haine face à cette porte de bois blanc qui marquait l'entrée du palais. Il ne voulait qu'une seule chose : noircir des cendres de Dérime ce château blanc comme les os. Il voulait le couvrir de sang, enlever cette pureté qui ne méritait pas d'exister. Parce que, lui, ce qu'il voyait dans ce blanc, ce n'était que la pâleur des joues exsangues de ses parents. Ce creux douloureux qu'il avait dans sa poitrine, c'était Dérime qui l'avait percé en détruisant ce qu'il aimait. Maintenant c'était son tour.

Cependant, il n'était pas le seul à souhaiter écraser le cadavre de Dérime sous ses pieds, à vouloir le voir souffrir. Leurs regards jetaient des éclairs de haines, leurs muscles tendus et leurs veines gonflées. Ils s'avançaient avec des pas lourds, comme ralentis par leur puissance, vers la porte du palais. A chacun de leurs pas, Agathe brisait les dalles sous ses semelles et une explosion de végétaux en jaillissaient, sauvages, Talya était suivie par des rigoles d'eau aussi violentes que des torrents, qui venaient s'écraser sur ses mollets, et Seamon avait la silhouette qui clignotait, comme transportée dans une autre dimension à cause de sa vitesse contenue. Tous avaient leurs armes en main, faisant briller leurs lames au soleil, appelant le sang. Ils n'avaient qu'une chose en tête : tuer Dérime. S'assurer qu'il ne respire plus, enfin en terminer avec toute cette absurdité, se venger. Ils voulaient qu'il paye pour tout ce qu'il avait engendré, leur colère ne pourrait être calmée, ils ne pourraient vivre en paix en sachant que cet homme était encore en vie. Il lui fallait mourir. Leurs Cœurs brillaient de haine, enveloppant toutes leurs silhouettes en un halo vibrant. Comme si Hébène, Méthana et Kara étaient présentes à leurs côtés. Aux alentours du palais, tous les Daressiens se virent incapables d'user de leur magie : ils monopolisaient tout.

Arrivés devant la porte, celle-ci n'était en aucun cas un rempart. D'un coup de pied violent et franc, Faust la réduisit en débris, la faisant s'enflammer sans l'avoir commander. Ils franchir le seuil de la porte, toujours bouillonnant de hargne. Les pavés en damiers ne résistèrent pas à leur pas. Sur leur passage, le sol tremblait, le bois s'embrasait et les eaux souterraines grondaient. Ils n'auraient aucune pitié.

Malgré ce vacarme, ils s'arrêtèrent au pied de l'escalier de marbre lorsque des bruits de pas retentirent dans le hall d'entrée déjà presque en miette, il ne restait plus que les murs. Quittant les couloirs aux tapis rouges et la sécurité de ses troupes de révolutionnaires occupées à détruire un petit groupe d'attaquants, Dérime se montra en haut des marches. Faust serra sa main tellement fort sur la garde de la lame de son père, qu'il ne la sentit plus. Tout avait disparu autour de lui. Ses yeux écarquillés étaient rivés sur cette figure tant haïe : ces yeux de métal qu'il rêvait d'arracher, ce sourire qu'il s'imaginait fendre de sa lame, ce visage qu'il voulait fondre, ces mains osseuses qu'il souhaitait briser. Tout son être le tendait en avant, les genoux pliés. Il ne lui suffisait que de s'élancer dans ces marches, bouger son bras et enfoncer son sabre jusqu'à la garde dans le ventre de cette ignominie.

Daress Tome 2Où les histoires vivent. Découvrez maintenant