Juste une vie avec toi

chapitre 12

- Toi, t'as la tête de quelqu'un qui est loin dans ses pensées ! balance Alexandre en faisant irruption dans mon bureau.

Je sursaute de mon fauteuil, si bien que j'en fait tomber mon stylo par terre. En le ramassant, je me cogne le crâne contre le rebord du bureau.

- Ouais, c'est bien ce que je disais, confirme Alexandre en pouffant.

Je grogne et il s'installe sur la chaise en face de mon ordinateur.

- Qu'est-ce qu'il y a ? demandé-je, car nous sommes en pleine heure de taff.

- Il faut que je te parle.

- Maintenant ?

- Il est bientôt midi. C'est bon, personne ne remarquera rien. Et arrête de faire la meuf, je sais que tu parles en message avec des gens depuis tout à l'heure, signale-t-il en jetant un coup d'œil sur l'écran de mon téléphone rempli de notification.

Ce sont des messages de Lisa et Kylian. OK, je suis cramée. Mea culpa.

- Ferme la porte, préviens-je Alexandre. Flemme que tu sais qui nous entende.

Tu sais qui étant Céline, notre horrible collègue : si elle capte que nous commérons pendant nos heures de travail, la patronne sera très vite au courant. Dès que la porte est fermée, Alex revient s'asseoir et pose ses coudes contre le bureau. Son visage exprime soudain un air sérieux, virant presque à la mélancolie. Euh ?

- C'est fini avec Caro, lâche-t-il de but en blanc.

- QUOI ???

Alexandre grimace car j'ai peut-être bien crié... A moins que ça lui coûte de répéter la phrase.

- Je ne suis plus avec Caroline, fait-il alors, cette fois sur un ton morne. Ou plutôt c'est elle qui n'est plus avec moi...

- Oh, Alex ! Comment c'est po... Pourquoi ??

- Elle ne m'aimait plus.

Mon cœur se déchire en entendant ceci.

- Je suis désolée...

- Et moi donc, soupire-t-il.

- Et moi qui pensait que tout allait bien entre vous deux hier...

- Ma mère, ouais. C'était de la putain de comédie ! On jouait un rôle.

Comédie. Rôle. Ces mots résonnent étrangement dans ma tête...

- Tu trouveras mieux, finis-je par dire à Alex. T'es un mec en or, et puis t'es grave beau-gosse wesh. Je te parie 10 euros tu te trouves une nouvelle nana la semaine prochaine !

- 10 euros seulement ? sourit mon ami.

- 30 euros et c'est mon dernier mot !

- Marché conclu !

Nous nous serrons la main en riant. Je me félicite intérieurement d'avoir réussi à le consoler un petit peu.

- Et toi, dis-moi : comment ça se passe dans ta vie amoureuse ? lance ensuite Alex.

- Oh là, c'est un bric-à-brac complet !

Et rien que d'y repenser, j'en ai la migraine.

- Vas-y, raconte-moi tout.

- Humpf... Un mec me kif, mais moi j'en pince pour un autre qui lui-même aime déjà quelqu'un. Oh, et y a un gars que je viens de rencontrer qui me plaît bien.

- Euh, j'ai pas très bien compris, là...Tu rembobines ?

Ses yeux sont ronds comme ceux d'un poisson. J'imagine sans peine la bulle de confusion juste au-dessus de sa tête. Je me racle la gorge.

- Kylian, un mec de notre, groupe, n'arrête pas de me draguer. Mais moi je préfère Elias, celui avec qui je parlais hier à la soirée. Sauf que malheureusement, Elias est déjà en couple avec Hasma, une espèce de cinglée possessive qu'il aime à la folie et qui compte la marier. Et à côté de ça, je parle avec un gars qui s'appelle Yanis et qui est plutôt mignon. C'est bon, t'as pigé ?

- Je crois, ouais, répond Alex avec un sourcil haussé. Mais du coup, tu préfères lequel des deux ?

- Elias, je viens de te le dire !

- Ouais, sauf qu'Elias ne t'aimes pas, cocotte. C'est ballot, ça.

- Argh, vas te faire voir.

- Je rigole ! Nan, sérieux, en vrai tu devrais pécho Yanis.

- Hein ??

- Bah ouais ! s'exclame Alex avec une expression qui marque l'évidence. Puisque t'auras jamais ce que tu veux avec Elias et que Kylian n'aura jamais ce qu'il veut avec toi, ça ne peut pas te faire de mal de fréquenter une nouvelle personne. Qui sait, ton p'tit Yanis pourra peut-être te faire oublier Elias avec le temps.

Je marque un temps de réflexion. Hum, mouais, il n'a pas tort en fin de compte. Si je reste fixée sur Elias sans jamais me laisser une chance avec n'importe qui d'autre, ça n'avancera pas dans ma vie. Et concrètement, j'ai pas envie de finir seule à 40 ans avec deux chats au foyer.

- C'est bon, tu m'as convaincue, dis-je. Je vais pécho Yanis.

- Alors ça, c'est exactement ce que j'aime entendre ! se ravie Alex, avant de m'envoyer son plus beau des clin d'œil.