Apocalypse

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Noël approchait.

C'était le premier Noël depuis que Voldemort avait été défait par Harry Potter. C'était le premier Noël en paix depuis des années, sans que le monde magique n'ait à craindre un Mage Noir mégalomane.
Le monde de la Magie avait retrouvé un équilibre précaire, en apparence tout du moins.

L'ambiance était étrange, entre vengeance et pardon.

Les sorciers ne semblaient pas croire que le long cauchemar était bel et bien terminé. Bien entendu, ils avaient eu une longue période de répit, dix années de tranquillité lorsqu'un bambin avait survécu au sortilège de la mort, envoyant Voldemort dans les limbes.

Le mot d'ordre était de vivre. De faire tout ce qui avait été mis de côté par peur.
Beaucoup de Mangemorts avaient été arrêtés et envoyés à Azkaban. Mais ceux qui n'avaient pas cherché à se rebeller, ceux qui avaient fait allégeance au nouveau pouvoir en place avait été laissés en liberté.

Il y avait ceux qui voulaient tout oublier et recommencer à vivre le plus rapidement possible. Il y avait ceux qui hurlaient vengeance, qui voulaient voir chaque Mangemort à Azkaban à souffrir mille morts pour leurs actes.

Les sympathisants de Voldemort qui avaient prouvé leur volonté de tourner la page avaient échappé aux procès et à Azkaban. Ils étaient sous surveillance, avec interdiction d'occuper des postes clés au Ministère.

Les sang-purs étaient amers de se voir traiter comme des criminels.
Les sang-mêlés étaient furieux de ne pas avoir la vengeance dont ils avaient rêvé.

Ceux qui avaient la marque étaient des parias. Ils étaient assurés de ne pas trouver d'employeur. Ou tout du moins pas d'employeur respectable, leur interdisant toute possibilité de changer de vie et de se racheter.

Certains s'alarmaient, se rendant compte que la situation ne pourrait pas rester ainsi. Il était évident qu'un jour les rancœurs exploseraient et provoqueraient une flambée de violence... Mais pour l'instant, la paix était fragile, et il y avait toute une population pleine d'espoir à guider. Il y avait les morts à enterrer, les blessés à soigner.

C'était le moment des réjouissances, du deuil, des projets. Le reste viendrait plus tard.

Harry Potter, loin de se réjouir de sa victoire, s'était éloigné de la vie publique que le Ministère avait voulu lui imposer. Le jeune homme acceptait mal ce qui s'était passé. Il avait vu bien trop d'amis tomber pour pouvoir se réjouir.

Il était écœuré de voir qu'au final la guerre n'avait pas servi de leçon, puisque les mêmes erreurs étaient reproduites encore et encore.

Ceux qui s'étaient lâchement cachés pendant la guerre, n'osant pas prendre position, se soumettant à la loi du plus fort, étaient les premiers à demander réparation. Ils voulaient voir les Sang-purs déchus de leurs droits, ils voulaient que les familles de Mangemorts soient exilées ou condamnées.

Ils voulaient des procès publics, l'humiliation de ceux qui avaient eu les rênes du pouvoir pendant les années de guerre.

Ils voulaient le pouvoir, la puissance qui leur était passé sous le nez parce qu'ils n'avaient pas eu le courage de s'affirmer, ou parce qu'ils n'étaient pas des Sang-purs.

Alors, peu de temps après la bataille finale, Harry avait tourné le dos au monde magique qu'il aimait tant. Il avait accepté le fait que la magie faisait partie de lui, qu'il ne pourrait pas retourner vivre dans le monde moldu sans y être malheureux. Il n'y tenait pas plus que ça : rien ne le rappelait chez les moldus après tout. Sa famille n'en avait jamais été une, même si Dudley avait tenté une timide tentative de rapprochement après l'épisode avec le Détraqueur... Mais entre eux il y avait un fossé trop profond pour qu'il soit comblé.

Le jeune Sauveur avait dû frôler la mort pour prendre conscience qu'il avait le droit de choisir son destin, maintenant qu'il avait fait ce qu'on attendait de lui.

Il avait commencé par rompre définitivement avec Ginny. La rouquine espérait un mariage grandiose, une vie dans l'opulence sous les flash des journalistes. Elle voulait être la célèbre Madame Potter perdant de vue que Harry n'aspirait qu'à l'anonymat.

Sa décision avait été mal vécue par la famille Weasley. Il avait fait face à beaucoup de réflexions et à des discussions interminables sur le fait qu'il devrait réfléchir avant de rejeter "l'amour de sa vie".
Mais pour une fois, Harry savait ce qu'il voulait. Et ce n'était pas Ginevra Weasley pendue à son bras. Elle était au mieux une petite sœur, mais certainement pas celle dont il rêvait.

Il avait refusé le poste offert par le Ministère tout comme l'opportunité de devenir Auror. Il ne voulait pas être un pantin destiné à calmer les foules, et il savait pertinemment que s'il restait proche du Ministère, c'était ce qu'il deviendrait.

Il avait rêvé d'être Auror à une époque. Ça avait été son premier projet professionnel tangible, et c'était ce qu'il avait voulu après avoir été secouru par des Aurors. Il les avait admiré, si courageux, si intrépides, prêts à risquer leurs vies pour l'aider lui.

Sur le moment, il s'était vu adulte en sauveur de la veuve et de l'orphelin. Mais à l'époque, il ne savait pas qu'il devrait jouer le rôle du sacrifice pour Dumbledore. Il ne savait pas qu'il verrait la mort partout autour de lui, qu'il verrait Remus et Tonks mourir alors même qu'ils venaient d'être parents.

Il ignorait que le monde magique le décevrait profondément, en voulant se servir de lui alors qu'il se remettait tout juste de la bataille où il avait du tuer Voldemort.

Les corps de ses amis n'étaient pas encore froids que le Ministère le courtisait pour qu'il devienne leur symbole...

Sa décision de ne pas devenir Auror avait semé le chaos encore une fois. Il avait du supporter des visites incessantes de personnes "prenant à cœur ses intérêts" pour lui conseiller de se reposer avant de devenir... Auror. Mais Harry était quelqu'un de décidé et de têtu.

Il avait supporté toute cette agitation autour de lui quelques semaines, puis, sur un coup de tête, il avait décidé de tourner le dos à tout ça. Il avait disparu du jour au lendemain, sans prévenir personne, décidé à profiter un peu du calme avant de reprendre contact avec ses amis. Pour leur laisser le temps de comprendre qu'il était décidé.

Ça avait été l'apocalypse.

Il avait assisté, horrifié, au déchaînement médiatique provoqué par sa retraite. Pour autant, il avait été plus que décidé à ne pas céder, à ne pas revenir en arrière. Désormais, il était libre de ses chaînes, il n'était plus l'élu, il n'avait plus à se sacrifier.

Il allait vivre.

Le poids du passéOù les histoires vivent. Découvrez maintenant