Années

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Lorsque Harry avait retrouvé Drago, ils n'avaient pas échangé un mot. Ils étaient partis ensemble, Harry de nouveau dissimulé sous son bonnet, sans se rendre compte que le Ministre de la Magie en personne les observait, l'air sombre.

Harry attendit qu'ils soient de retour dans sa maison pour demander à Drago de le suivre au salon. Il lui tendit le parchemin qu'il avait extorqué à Shakelbot. Drago s'en empara et fronça les sourcils.

- Qu'est-ce que c'est ?

- Ta liberté. Pour de bon cette fois-ci, j'espère.

- Que...

- Tu n'auras plus à aller au Ministère.

Loin de s'en réjouir, Drago se leva brusquement.

- Qu'as-tu fais, Potter ?

Harry grogna.

- Pas la peine de me remercier Malefoy. C'était avec plaisir.

- Foutu Gryffondor stupide et borné ! Ma mère...

- Ni elle ni Rogue ne seront inquiétés je m'en suis assuré.

Il s'affrontèrent du regard un long moment et Drago soupira.

- Pourquoi tu fais ça ? Pour quelle raison ?

- Tu m'as...

- Cesse de dire que je t'ai sauvé. Parce que tu es revenu ce jour là dans la salle sur demande. Toi aussi tu m'as sauvé, lorsque tu as empêché le feudeymon de me consumer.

- Alors je dois te laisser crever ?

Drago se laissa tomber dans le sofa, pâle, les mains légèrement tremblantes.

- Après le procès, j'ai commencé à espérer que... les choses aillent mieux. Mais je ne suis pas comme toi Potter. Je ne suis pas capable de survivre encore et encore. Ces attaques incessantes me rendent dingue.

Harry s'approcha de lui et attrapa son poignet qu'il serra jusqu'à ce que Drago ne lève les yeux vers lui.

- Justement. Plus besoin d'aller au Ministère, Malefoy. Plus besoin de te retrouver encore une fois en danger.

- M'enfermer avec toi ou affronter le monde sorcier... Ma vie est d'une ironie...

Harry gloussa sans desserrer sa prise sur le poignet du jeune homme à ses côtés. Drago secoua la tête.

- Merci. Je suppose. J'apprécie vraiment même si...

- Même si tu ne le montres pas ?

Drago rougit légèrement et détourna les yeux.

- Quelque chose dans ce goût là, ouais.

Le Serpentard soupira doucement, essayant de calmer la panique qui l'étouffait.

Il n'avait jamais été courageux, loin de là. Il se savait trouillard, ne survivant que grâce à la ruse. Jusqu'à l'année où il avait dû prendre la marque pour que son père soit sauvé d'Azkaban, il avait évité de se retrouver dans des situations où il pourrait se trouver en première ligne.

A chaque attaque qu'il subissait, il se sentait la panique monter en lui, jusqu'à le mener aux portes de la folie. A chaque fois, il se faisait l'impression d'être un enfant incapable de se défendre.

Cette fois pourtant, les choses étaient différentes. La panique l'étranglait. Mais il y avait une partie de lui qui ne comprenait pas pourquoi Potter l'aidait.

Le jeune homme était empli de culpabilité. Durant de longues nuits d'insomnies, il avait revécu les années de son adolescence, revivant son passé pour essayer de trouver comment il aurait pu ne pas être marqué.

Il imaginait de nombreuses façons de changer son passé, se demandant ce qu'il aurait pu faire pour ne pas en arriver au point où il en était.

Paria de la société sorcière, il se haïssait lui-même. Et chaque fois, il finissait par regardait le tatouage hideux qui ornait son bras, se demandant s'il pourrait faire quelque chose pour l'ôter. Se mutiler, se brûler peut être. Tout plutôt que d'avoir en permanence le rappel de ses fautes encré dans la peau.

Il regrettait de ne pas avoir été capable de choisir son camp clairement. Il n'avait eu aucunes convictions. Il se moquait à l'époque de qui remporterait la guerre tant qu'il pouvait continuer sa petite vie dorée.

Et alors que sa vie actuelle était déjà compliquée et chamboulée, Harry Potter revenait et jouait les héros. Il l'accueillait chez lui, sans l'humilier. Il le conduisait au Ministère et le protégeait, n'hésitant pas à se battre pour l'aider.

Cerise sur le gâteau, il lui offrait une nouvelle vie, un nouveau départ.

Drago était persuadé que le Ministre de la Magie n'avait pas accepté de gaieté de cœur. Il était certain que Saint Potter avait utilisé un quelconque moyen de pression pour le décider.

C'était ce qui bloquait.

Il n'arrivait pas à comprendre pourquoi Harry Potter l'avait défendu avec tant d'ardeur.

Drago ne savait pas quoi en penser. Il avait conscience d'être redevable au Gryffondor, à un point qu'il n'aurait jamais pu imaginer. Mais en connaissant le jeune homme, il savait qu'il n'agissait pas en espérant un quelconque retour.

Il pouvait même parier que Potter l'aiderait encore et encore sans contrepartie, juste parce qu'il le pouvait.

Le Serpentard sortit brusquement de ses pensées en sentant les doigts de Potter toujours refermés sur son poignet. La prise n'était pas douloureuse, le contact physique entre eux était juste étrange. Déstabilisant.

Lorsqu'il leva les yeux vers le Gryffondor, ce dernier semblait légèrement inquiet.

- Qui pourrait vouloir te tuer Malefoy ?

- Je croyais que nous avions déjà abordé ce sujet.

- La personne qui a lancé le sort... Elle savait que tu irais au Ministère.

Drago haussa les épaules.

- Tu as peut être vécu dans une grotte ces derniers mois, mais tout le monde sait que les Mangemorts sont tenus de se présenter une fois par semaine.

- Pourquoi aujourd'hui ?

- Parce que c'était le jour de ma convocation, quelle question. Crois-tu qu'ils nous laissent le moindre contrôle sur la situation ? Nous sommes convoqués selon leur bon vouloir !

Harry se pencha.

- Toujours le même jour ?

- Non. Nous avons la convocation d'une fois sur l'autre.

- Quelqu'un du Ministère.

- Je ne suis pas certain qu'il y ait un certain ... secret professionnel. Je suppose que...

Drago cessa de parler brusquement, refusant de parler de l'humiliation infligée à chaque fois. Harry l'observa un long moment avant d'insister.

- Tu supposes que quoi ?

- Que ce n'est pas vraiment un indice sérieux. De ce que j'en sais, la personne qui convoque les Mangemorts pourrait aussi bien en parler à son boulanger !

- Il faudra bien commencer quelque part !

- Sauf si je quitte le monde magique. J'y pense mais je ne veux pas abandonner ma mère. Je suppose que si c'est une question de sécurité elle acceptera de me suivre. Elle reste pour mon père, mais elle n'a même pas l'autorisation de le voir.

- Chaque chose en son temps...

Le poids du passéOù les histoires vivent. Découvrez maintenant