Au bord du lac noir

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Severus avait rejoint Poudlard et se tenait dans le soleil couchant au bord du lac noir. Le ciel s'assombrissait et l'horizon se teintait d'orange. Les bras croisés dans le dos, sa silhouette austère se découpait en contre jour, mais l'image qu'il pouvait donner à cet instant lui importait peu.

Il avait eu besoin de respirer un peu, et il s'était rendu à l'endroit où il se sentait le plus en sécurité. Poudlard était sa maison, après toutes ces années. Et même si Voldemort avait pénétré son sanctuaire, il était bel et bien mort désormais.

L'école était de nouveau sûre, menée d'une main de fer par Minerva et il l'assistait autant que faire se peut.

Maintenant qu'il était libre - presque libre - il ne se terrait plus autant dans les cachots. Il aimait par dessus tout les abords du lac, là où il pouvait laisser ses yeux se perdre sur les eaux calmes. De temps en temps, la surface se troublait alors que le calamar géant s'étirait paresseusement, puis tout redevenait immobile.

Sitôt après avoir vu Harry et Drago il était revenu à Poudlard, et depuis, il réfléchissait, se demandant quoi faire.

Soupirant il tourna la tête et vit la silhouette claudiquante de Minerva approcher. Malgré son âge, l'écossaise était encore pleine d'énergie bien qu'elle ait gardé des séquelles de ses blessures de guerre.

Un sort vicieux lancé par un Mangemort lui avait laissé une jambe raide et un caractère encore plus difficile qu'avant. Elle avait pris la tête de l'école et avait chassé les envoyés du Ministère, renouant avec la tradition de Dumbledore. Son école, ses règles comme elle avait l'habitude de dire.

Severus resta immobile. Il savait que Minerva n'aimerait pas qu'il vienne à sa rencontre. Depuis sa blessure la sorcière ne supportait pas avoir l'impression d'être faible. Elle se faisait un devoir de marcher même si sa jambe la faisait souffrir, et toute tentative de lui adoucir la vie était automatiquement traduite comme une insulte.

- Severus. Un problème ?

Le maître des potions hésita avant de hausser les épaules d'un air indifférent.

- Rien d'important.

- Je suis peut être une vieille femme, Severus, mais je ne suis pas encore sénile. Je vois bien qu'il y a quelque chose qui vous tracasse.

Il soupira et eut un léger sourire face à l'air décidé de l'écossaise. Parfois, Minerva ressemblait terriblement à Dumbledore, et il se demandait si se mêler de tout était une caractéristique nécessaire allant avec le poste de Directeur de Poudlard.

- J'ai dû me rendre au Ministère suite à une convocation du Ministre de la Magie en personne.

Minerva se redressa et pinça les lèvres, soudain mécontente.

- Et pourquoi n'ai-je pas été tenue au courant ?

Severus ne répondit pas. Il savait que sa collègue n'était pas en colère contre lui mais contre le Ministère qui agissait une fois encore dans l'ombre. Il laissa passer quelques minutes, regardant le crépuscule devenir la nuit.

- Kingsley m'oblige à reprendre mes activités d'espion.

Minerva sursauta et Severus la rattrapa par le bras alors que sa mauvaise jambe glissait, la faisant presque chuter.

- Quoi ?

Le professeur de potions réfléchit un cours instant, puis décida de tout lui dire.

- Il y a eu plusieurs meurtres d'anciens Mangemorts. En ajoutant à ça le désastre de l'allée des Embrumes... Il est inquiet de ce qui se prépare.

- Pourquoi ...

- Pourquoi me demander de l'aide ? Parce que Drago Malefoy est mon filleul et qu'il a été attaqué à plusieurs reprises.

- Drago Malefoy... Comment va-t-il ?

Severus inspira.

- J'ai demandé à Harry Potter de le protéger.

- Harry Potter ? Mais... Mais Harry est introuvable, Severus !

L'homme grimaça en voyant Minerva plisser les yeux.

- Minerva, je suis resté en contact avec Potter.

- Je suppose qu'il vous a demandé la plus grande discrétion ? Passons. Si vous précisiez un peu le rapport entre tout ça ? Parce que je vous avouerai que je ne comprends pas vraiment le lien entre votre convocation au Ministère et ce que devient Harry.

Severus hocha la tête un peu sèchement.

- J'ai demandé à Potter de veiller sur Drago. Comme vous le savez, ceux qui portent la marque doivent se rendre au Ministère chaque semaine pour y être... surveillés ? Lorsqu'ils y sont allés, Drago a été agressé une fois de plus et...

Minerva le coupa en gloussant.

- Harry s'est emporté ?

- Il a forcé la porte de Kingsley et a exigé que Drago soit libéré de tout ce fatras administratif. Il l'a mis hors de portée. Et cet idiot n'a pas pu s'empêcher de dire que j'étais moi aussi sous sa protection au même titre que les Malefoy. J'ai été convoqué pour livrer le gamin et reprendre du service. Fort heureusement, j'ai pu assurer que je ne savais pas où se terrait le héros disparu mais...

- Je vais aller le voir cet idiot ! Quand je pense...

Severus l'interrompit, les sourcils froncés.

- Minerva. Il ne vous laissera pas faire. Il m'a menacé de m'interdire l'enseignement ou le brassage de potions. Nous savons tous les deux qu'il pourrait détruire ma vie d'un claquement de doigts.

- C'est du chantage pur et simple !

- Effectivement. Je vais donc jouer les espions une fois de plus.

- Et pour Harry ?

- Il est en sécurité, ainsi que Drago. Je suppose que c'est une motivation suffisante pour... recommencer tout ça.

Minerva soupira et se passa une main légèrement tremblante sur le visage.

- Je pensais réellement que nous étions sortis de tout ça. Et je découvre que... Que la guerre n'est pas réellement derrière nous. Il suffirait d'un rien pour que...

- Peut-être faut il plus de temps ?

- Depuis quand êtes vous devenu optimiste, Severus ?

- Je ne le suis pas réellement, j'essaie de vous remonter le moral...

Un rire grinçant s'échappa de la bouche de la vieille femme et elle secoua la tête doucement, son chapeau suivant le mouvement de sa tête.

- Si vous voulez vraiment me remonter le moral, faites en sortes que les enfants ne soient pas de nouveau entraînés dans les horreurs que nous avons connu. Tant d'enfants ont déjà souffert... Ils ont dû se battre, pour survivre... Rien que pour ça, je vous aiderai au mieux, Severus. Vous pouvez me demander ce que vous voulez, je vous soutiendrai.

Le poids du passéOù les histoires vivent. Découvrez maintenant