Le poids du passé

Caméléon

Drago était arrivé depuis deux jours chez Harry quand il lui annonça qu'il devait se rendre au Ministère. Harry fronça aussitôt les sourcils.

Lorsqu'il apprit les raisons qui poussaient le Serpentard à s'y rendre, il devint furieux, jurant qu'il n'allait pas laisser les choses ainsi...

En effet, Harry s'était assuré que Drago et Narcissa Malefoy ne soient plus inquiétés pour leurs actes passés. Il avait fait en sorte que le Magenmagot ne puisse pas changer l'issue du procès en recourant à un serment inviolable.

Mais le Ministère avait trouvé un moyen de contourner cette protection en obligeant ceux qui portaient la marque des Ténèbres à se présenter au Ministère chaque semaine. La moindre absence entraînerait immédiatement l'incarcération à Azkaban, sans passer par un procès.

Harry apprit sans surprises que les attaques avaient eu lieu les jours où il devait se rendre à cette convocation inepte, puisqu'il s'agissait désormais de la seule occasion où Drago sortait.

Aussi, il décréta qu'il accompagnerait Drago au Ministère. Si quelqu'un voulait s'en prendre au blondinet, il devrait composer avec la présence du Sauveur du monde sorcier.

Harry était toujours un Gryffondor dans l'âme mais il avait appris à contrôler son impulsivité. S'il était fermement décidé à accompagner Drago pour surveiller ses arrières, il ne comptait pas se précipiter tête baissée. Il allait se montrer un peu plus Serpentard, clin d'œil au Choipeau qui avait hésité à le placer chez les Verts et Argent.

Juste après avoir tué Voldemort, Harry avait cherché à échapper aux regards des autres en ne sortant que déguisé. Il avait appris à devenir un vrai caméléon avec peu de choses.

Drago leva un sourcil surpris en le voyant arriver. Ses cheveux étaient cachés par un bonnet enfoncé sur son front, cachant habilement sa cicatrice. Il ne portait pas ses habituelles lunettes rondes, les ayant métamorphosées en une paire de lunettes plus carrées, aux verres légèrement teintés.

Potter étant Potter, il était vêtu à la moldue : jean et tee-shirt, portant un logo d'un groupe de rock. Le changement principal résidait dans le fait que contrairement à avant, ses vêtements étaient à sa taille.

Il aurait croisé le jeune homme sur le chemin de Traverse, il ne l'aurait pas immédiatement reconnu. Bien entendu, ils se connaissaient depuis si longtemps que le déguisement de Potter ne tiendrait pas à un examen approfondi. Mais pour se rendre au Ministère, cela suffirait amplement.

Comme prévu, personne ne prêta attention au jeune homme qui suivait Drago Malefoy comme une ombre. Et Harry put mesurer l'ampleur de la situation, en notant les multiples regards mauvais, les insultes et bousculades.

Drago avançait tête baissée, sans s'arrêter, sans réagir.

Le Gryffondor n'aurait jamais pensé voir Drago aussi passif, se laissant faire. Et il était d'autant plus furieux que les attaques n'en étaient que plus virulentes. Il avait les doigts crispés sur sa baguette, prêt à lancer des sorts, prêt à intervenir.

C'est probablement parce qu'il était sur les dents qu'il put éviter le drame. Il vit du coin de l'œil un sort arriver et il se précipita sur Drago, le bousculant sèchement les entraînant tous les deux à terre.

Dans la manœuvre son bonnet avait glissé révélant sa cicatrice - et son identité - à ceux qui les entouraient. Il aida Drago à se redresser, tenant fermement la main du jeune homme. La colère lui avait fait oublier qu'il ne voulait pas être exposé au public, et il fusillait chaque sorcier autour d'eux du regard, les défiant de faire la moindre réflexion.

Il rajusta rapidement son bonnet d'une main et entraîna Drago vers le Ministère.

Sans se préoccuper des protestations du Serpentard, il l'attira au pas de charge vers le quartier des Aurors. Il ignora Drago qui lui disait que ça ne servirait à rien, que personne ne les écouterait.

En entrant, Harry se trouva nez à nez avec Ron Weasley. Il ne savait pas que son ancien ami était devenu Auror, et il eut un moment d'hésitation. Ron ne le reconnut pas, ne cilla même pas en le voyant.

Voyant Drago, le rouquin eut un sourire mauvais.

- Malefoy. Cette fois-ci, ton compte est bon. Personne ne viendra te sauver de ce que tu mérites.

Harry grogna.

- Il a été agressé, il n'a rien fait.

Ron écarta l'intervention d'un geste de la main.

- Ne vous mêlez pas de ça vous. C'est un Mangemort, il ne mérite que Azkaban.

Drago recula d'un pas, retenu par Harry qui lui jeta un regard réconfortant. Ron jubilait bruyamment mais son ricanement s'étouffa dans sa gorge quand Harry retira d'un geste sec son bonnet, révélant une fois de plus son identité.

Bouche-bée, Ron resta quelques instants silencieux avant de bégayer.

- Ha...Harry ?

Son regard se durcit en voyant que Harry tenait la main de Drago mais avant qu'il n'ait le temps de dire quoi que ce soit, son ancien meilleur ami prit les devants.

- Nous sommes ici pour une agression. Quelqu'un a jeté un sort en direction de Drago Malefoy.

Ron grogna et haussa les épaules.

- Et alors ? Il le méritait probablement. Nous avons mieux à faire que de protéger des Mangemorts.

Harry échangea un regard avec Drago et il lui adressa un rictus. Sans que quiconque n'ait le temps de réagir, il se tourna et frappa Ron de toutes ses forces, l'envoyant au tapis le nez en sang.

Un collègue de Ron arriva en courant, mais en découvrant l'identité de celui qui avait frappé son collègue, il recula en levant les mains, comme s'il décidait de ne pas se mêler de la querelle.

Après un dernier regard méprisant, Harry tourna les talons entraînant Drago avec lui, marmonnant entre ses dents, clairement fou de rage. Le blond se laissa remorquer sans un mot avant d'un coup éclater de rire.

Harry soupira et s'arrêta, profitant d'un couloir désert.

- Foutu Gryffondor ! Dès demain je serais accusé de t'avoir kidnappé et placé sous Imperium !

Le Sauveur se figea avant de se mordiller la lèvre.

- Bordel.

Drago haussa les épaules.

- Ça ou autre chose... Je t'avoue qu'au moins c'était particulièrement divertissant.

Harry hésita un instant avant de sourire à son tour.

- Ravi que ça t'ait plu.