Crise de la cinquantaine

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Severus avait mis quelques jours avant de rendre visite à Harry et Drago. Il voulait laisser le temps à son filleul de se calmer un peu et d'oublier qu'il voulait quitter la maison de Harry au plus vite.

Il se doutait que les deux garçons s'étaient disputés, une fois de plus.

Au début de leur cohabitation forcée, il avait été tenté à plusieurs reprises de les séparer. Pour leur survie mutuelle.

Puis il s'était rendu compte qu'au final, les deux rivaux de Poudlard pouvaient très bien s'entendre. Il avait même découvert avec surprise qu'ils pouvaient être amis. Le problème était qu'ils ne s'en rendaient pas compte eux-même, trop perdus dans leurs habitudes pour en changer.

Avant la fin de la guerre, il n'aurait jamais pu penser qu'un jour il ferait en sorte de favoriser une amitié entre le fils de James Potter et son filleul. Mais il avait découvert que Harry était plus proche du caractère de Lily Evans que de son idiot de père. Et rien que pour ça, il pensait que le jeune homme était le mieux placé pour aider Drago.

Son filleul se débattait avec ses démons, et il était perdu entre sa culpabilité et l'éducation qu'il avait reçu de ses parents. Narcissa regrettait bien entendu, maintenant qu'elle avait pris conscience de l'erreur de jugement qu'ils avaient fait. Mais le mal était fait.

Lorsqu'il avait eu l'âge de Drago, Severus avait lui aussi fait de terribles erreurs. Et avec le recul, il savait que s'il avait pu se reposer sur son amitié avec Lily, il aurait pu éviter beaucoup de drames.

Lorsqu'il arriva chez Harry, il ne savait pas vraiment à quoi s'attendre. Certainement pas en tous cas à cet embarras entre les deux garçons. Ils n'étaient pas fâchés, juste mal à l'aise l'un avec l'autre.

Ils évitaient de se regarder, ne se parlaient pas directement et restaient loin l'un de l'autre. Il ne les avait jamais vu ainsi à s'ignorer mutuellement. Et Severus retint une remarque sur le fait qu'ils auraient évité bien des ennuis s'ils avaient appris à ne pas faire attention à l'autre de cette façon plus tôt.

Severus plissa les yeux en les observant attentivement. Harry sortit du salon et Drago en profita immédiatement pour se rapprocher de son parrain, les sourcils froncés.

- Je veux partir d'ici. Aujourd'hui même.

- Drago...

- Non. Emmène-moi à Poudlard, ramène-moi au Manoir, peu importe. Je ne resterai pas une journée de plus.

Severus pinça les lèvres et se redressa de toute sa taille, lançant un regard noir à son filleul. Certaines fois, Drago pouvais se montrer terriblement mélodramatique, le digne fils de Lucius...

- Cesse de faire l'enfant.

- Severus...

- Non Drago. Cette fois, tu vas m'écouter attentivement. Ici tu es en sécurité. Plus que n'importe où.

- Pourquoi ? Parce que Saint-Potter est ici ?

Severus renifla, agacé, et dévisagea Drago jusqu'à ce que celui ci rougisse légèrement. Il prit son temps avant de répondre.

- Parce que cet endroit est sécurisé.

- Et Poudlard ?

- C'est une école, pas un refuge ! Ce n'est plus la peine d'argumenter Drago !

Le blond fit la grimace et eut un geste agacé.

- C'est ça ta version de la crise de la cinquantaine ? Pourrir la vie des autres ?

Severus leva un sourcil incrédule face à la réflexion du jeune homme.

- Tu peux ranger tes affaires, jeune homme. Tu n'iras nulle part.

Ce fut le moment que choisit Harry pour revenir dans la pièce, et il s'immobilisa les sourcils froncés à la phrase de Severus.

- Un problème ?

Drago grogna et ne répondit pas. Cependant, au lieu de passer près de Harry et de le bousculer - comme il l'aurait fait encore peu avant - il fit en sorte de passer à distance. Vraiment loin du Gryffondor.

Severus ne manqua pas ce comportement étrange et le nota dans un coin de son crâne, bien décidé à comprendre ce qui avait pu se passer entre ces deux là. Il devait avouer qu'il était assez curieux de découvrir ce qui avait pu calmer Drago à ce point, lui qui n'avait jamais résisté à l'envie de titiller Harry Potter.

Une fois Drago sorti, et enfermé dans sa chambre - le claquement violent de la porte reflétant parfaitement son humeur - Harry insista auprès de Severus, l'air inquiet.

- Monsieur ? Un problème ?

- Que pourrait-il y avoir comme problème, Monsieur Potter ?

Harry se passa une main nerveuse dans les cheveux avant de se mordiller la lèvre.

- Vous partez avec Malefoy ?

- Pas le moins du monde. Il reste ici. Ça pose un problème pour vous ?

Severus retint de justesse un sourire en voyant les épaules de Harry se détendre subitement comme s'il était soulagé. Il trouva intéressant que Drago veuille autant fuir, alors que le Gryffondor semblait décidé à le garder à ses côtés.

Après un long silence, le maître des potions soupira.

- Bien. Qu'est ce qui s'est passé entre vous deux ?

Harry émit un couinement étranglé avant de rougir brusquement et de hausser les épaules, gêné. Il ne fallait pas être devin pour comprendre que le jeune homme aurait préféré être n'importe où plutôt que face à son ancien professeur.

- Rien, Monsieur. Rien d'important.

- Vraiment ? Un rien qui oblige mon cher filleul à me contacter de toute urgence pour être "sauvé" de cette maison ?

- Sauvé ? Mais...

- Exactement. Donc. Explications. Maintenant.

Aux yeux de Severus, Harry eut soudain l'air d'un lapin prit dans les phares d'une voiture. Le Gryffondor s'empourpra un peu plus, en regardant à droite et à gauche, comme s'il cherchait un moyen de fuir cette conversation.

- Je...

Le maître des potions s'approcha d'un pas, attentif. Il sentait la résistance du Gryffondor diminuer et il était persuadé qu'il allait finir par comprendre ce qui avait mis Drago dans tous ses états.

Avant que Harry n'ait eu le temps de parler cependant, Drago était sorti de sa chambre.

A l'instant où il revenait, Harry se referma comme une huître et battit en retraite.

- Je... heu... J'ai du travail en retard.

Severus leva les yeux au ciel avant de fixer son filleul, mais Drago lui renvoya son regard, impassible. Son moment de faiblesse était passé, et il avait retrouvé toute la maîtrise de ses émotions...

Le poids du passéOù les histoires vivent. Découvrez maintenant