13 • Manelle

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Depuis le voyage d'intégration, il s'est passé deux jours. Et pendant ces deux jours, j'ai réfléchi à la proposition de Mallory.

Qui est?

D'aller porter plainte.

Contre qui? Mon mari.

Pourquoi? Il me bats.

J'ai dit à Mall de me laisser jusqu'à la fin de semaine pour réfléchir, et elle a fini par accepter contre son gré.

Aujourd'hui nous sommes vendredi, et elle m'a dit de passer chez elle vers 20h. Chose que j'ai accepté, mon mari rentrant vers 21h.

Sauf que j'ai peur de lui dire ma réponse à sa proposition.

Mais bon, si je n'arrive pas chez elle, c'est elle qui finira par se rendre chez moi. Je n'ai donc pas vraiment le choix de prendre ma voiture et de faire la route de dix minutes qui me sépare de chez elle.

Je me gare devant son immeuble, sur le parking attribué au bâtiment, et soupire un grand coup avant de sortir du véhicule. Je monte le plus lentement possible les marches jusqu'au quatrième étage, délaissant l'ascenseur alors que c'est la meilleure option avec mes côtes.

Côtes dont l'état a empiré ce matin, à cause des coups de mon mari. J'ai essayé de le cacher le plus possible pendant la journée, et pour cela j'ai dû éviter Mallory, ainsi que notre déjeuner sacré du vendredi.

Nous avons décidé de mettre en place cette règle de manger ensemble le vendredi depuis cinq ans. Cinq ans durant lesquels chaque vendredi nous nous retrouvions à la cafétéria avant l'arrivée des lycéens, nos emplois du temps le permettant à chaque fois.

C'est la première fois depuis ces cinq ans que je déroge à la règle. Le reste de la journée, j'ai plusieurs fois senti son regard sur ma nuque alors que j'étais obligée de passer devant les grandes vitres de son bureau pour changer de salle.

Et chaque fois, mon cœur se pinçait un peu plus alors que je devais l'ignorer.

Je pense encore à cette journée pourrie que je viens de passer quand j'arrive enfin devant sa porte. J'hésite un instant à faire demi-tour, mais la douleur présente dans mes côtes me crie que je n'ai pas le droit d'avoir monté tout ça pour rien.

Je prends donc mon courage à deux mains et appuie enfin sur le bouton de la sonnette. La porte s'ouvre après seulement sept secondes (oui, j'ai compté) et me laisse apercevoir Mallory dans l'entrebâillement.

- Entre.

Ouch. Ton froid. Glacial, même.

Je rentre silencieusement et elle referme la porte derrière moi. La surveillante m'indique du menton le canapé du salon après que j'ai traversé le couloir de l'entrée, puis elle s'installe en face de moi dans un fauteuil.

Le silence qui s'installe me mets mal à l'aise et je joue avec mes mains, nerveuse. Elle finit par le briser, avec le même ton sans émotion que tout à l'heure:

- Tu n'étais pas là ce midi.

Je ne répond pas, ça ne servirais à rien. À part à confirmer ce qu'il s'est passé.

- Je t'ai attendue. Vingt minutes.

Ma bouche reste obstinément close. Elle soupire.

- Mais bon, ce n'est pas le sujet de cette discussion. On va maintenant au commissariat?

- En fait...

J'ouvre enfin la bouche, mais la referme, hésitante, cherchant mes mots. Elle incline la tête et je pose mon regard sur la plante verte à l'angle de la pièce. Je finis par prendre une grande inspiration et par lâcher, les yeux toujours sur la plante:

I Need Your HelpOù les histoires vivent. Découvrez maintenant