33 • Coraline

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Lundi.

Le week-end a été atroce.

Parce que, petit un, ma mère était déchaînée. En cause: elle ne s'est toujours pas remise de sa "rupture". Petit deux, j'ai eu des remords pour avoir laissé sans un mot oral Mme. Diani et Mme. Fiorella. Petit trois, mon club de boxe a fermé pour cause de faillite. Petit quatre, ma mère m'a violemment tirée hors de la maison ce lundi matin et m'a poussée de toutes ses forces dans les escaliers, me jetant mon sac dessus. Ce qui fait qu'on en arrive au petit cinq: Hae-Sung s'est rendu compte à la seconde où je l'ai rejoint à l'arrêt de bus désert que quelque chose n'allait pas. Parce que petit six: je boîte car mon genou gauche me fait horriblement mal, et ma pommette a une jolie déchirure rouge violacé. Et en plus de tout ça, petit sept, les vacances sont à la fin de la semaine. Je déteste les vacances, elles me confrontent à ma mère, à mon corps, à la mort.

- Coraline, putain, c'est quoi ce bordel!

Le coréen, inquiet, me prend dans ses bras.

- Merde, quoi! Pourquoi tu me laisses pas t'aider?

- Je n'ai pas besoin d'aide.

Je repousse son étreinte.

- Tout ce "bordel", comme tu dis, sera terminé ce soir.

- Et comment? Avec ta mort au bout du chemin? C'est ça?

Le bus qui arrive me sauve.

- NON! crie Hae-Sung.

Il me tient par les bras, m'empêchant de faire un signe au chauffeur pour qu'il s'arrête. Ce dernier ralentit tout de même mais doit croire à une bagarre entre "jeunes de la cité" puisqu'il ne s'arrête pas. Le lycéen me lâche quand le bus s'est éloigné.

- MAIS MERDE HAE-SUNG! TU COMPRENDS RIEN À RIEN! T'AS PAS LE DROIT DE ME JUGER POUR CE QUE JE VAIS FAIRE!

- Mme. Fiorella a appelé au fix de chez moi.

Mon silence soudain l'incite à continuer.

- Il y avait Mme. Diani aussi. C'est moi qui ait décroché. Elles ont dû avoir ce numéro dans les fichiers de l'école, mais en fait peu importe. Elles m'ont tout raconté.

Il m'attrape brusquement le poignet et remonte ma manche.

- Elles m'ont expliqué pour ça aussi.

Je dégage ma main et lui crache:

- Et alors?

- Et alors on a un plan.

Je fronce les sourcils mais n'ai pas le temps de réfléchir. Une voiture s'est arrêtée devant l'abri-bus.

***

- Coraline, écoute, je suis dés...

- Taisez-vous.

Soupir de mon interlocutrice.

- Non.

- Dans ce cas je ne vous écoute pas.

- S'il-te-plaît, c'est important!

- Et vous vous n'êtes pas importante à mes yeux. Alors non. Je n'écouterais pas.

Ce mensonge me déchire la bouche.

- Arrête de prétendre à l'indifférence. Tu tiens entre tes mains et contre ton cœur la peluche lama que je t'ai donnée chez moi.

Je sursaute et lance un regard noir à ma professeure de physique avant de fixer la plante verte à l'angle de la pièce. Le commissariat est joli. Et ça m'énerve car ça m'enlève une raison de râler pour être en ce lieu.

I Need Your HelpOù les histoires vivent. Découvrez maintenant