31 • Coraline

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2:30

Je fixe les chiffres bleu fluorescent depuis maintenant cinquante minutes. Le bras gauche de ma professeure de physique-chimie est enroulé autour de ma taille ainsi que le droit de ma rvs. Le plus délicatement possible, je les soulève et les dépose sur le matelas. Puis je me lève et, debout à la porte de sortie, je les observe. Les rideaux sont ouverts, alors un rayon de lune éclaire les deux corps paisiblement endormis. Soupirant, j'ouvre sans bruit la porte, me glisse dans le couloir et la referme. Je retrouve sans peine la chambre d'amis et attrape mon sac à dos. Je ne me suis pas changée, alors ce sont les seules affaires que j'ai ici.

Je descends l'escalier sur la pointe des pieds et atterrit dans le salon avec cuisine ouverte. Mes yeux fouillent la pièce et finissent par se poser sur l'objet de ma convoitise. Le sac de Mme. Fiorella. J'en sors rapidement mon téléphone et enfile mes chaussures avant de quitter la maison. Cinq minutes de marche me séparent de chez moi. Heureusement, la porte d'entrée est ouverte. Ce n'est pas le cas de la grille, mais l'escalader s'avère un jeu d'enfants. Mes deux pieds font un léger bruit sur le sol quand je me laisse tomber d'en haut du portail qui doit bien faire deux mètres, mais si peu fort qu'il n'y a aucune chance qu'il réveille les deux occupantes de la demeure.

Entamant la petite marche vers chez moi d'un pas vif, je me ressasse encore et encore les quelques mots que j'ai rapidement griffonnés sur un morceau de papier avant de partir comme une voleuse.

Je suis désolée. Mais ce n'est pas vrai. Ma mère ne me frappe pas. Arrêtez de fouiner, ça vaudra mieux pour vous et pour moi. Coraline

Il ne faut pas qu'elles sachent. Ce n'est pas possible.

J'arrive enfin devant la porte d'entrée de mon appartement. Ma génitrice n'a absolument pas bougé d'un centimètre depuis ce matin, une bouteille d'alcool à moitié renversée sur les jambes. La scène fait monter en moi un sentiment de dégoût, mais aussi de soulagement. Elle ne saura pas que je ne suis pas rentrée directement.

La porte de ma chambre se referme doucement derrière mon ombre furtive dans l'appartement, paisible pour une fois. Je me laisse tomber sur mon lit, enlève mes chaussures et chaussettes, puis ait un sursaut en reniflant un parfum particulier. Je me redresse. Le gilet de Mme. Fiorella. Je l'ai oublié sur mes épaules. Je soupire. Tant pis. Je finis par m'endormir par-dessus les draps de mon lit, la tête vide, fatiguée d'avoir trop pensé, fatiguée de ce monde où ma grand-mère ne vit plus, fatiguée de devoir porter un masque en permanence.

***

Vision de Manelle.

J'entrouvre les yeux doucement et l'heure me fait soupirer. 3:15. Mon regard tombe alors sur Mallory, endormie. Elle est... Magnifique. Mais alors pourquoi mon cerveau me répète en boucle que quelque chose cloche, qu'il manque une pièce au tableau? Et pourquoi je ne suis pas dans les bras de Mallory comme chaque nuit?

Je me refais la journée d'hier. Le matin, le midi. Jusqu'ici rien d'anormal. La fin d'après-midi, les bras de Coraline, le soir. Les bras de... Merde! Coraline!

Mes mains secouent frénétiquement Mallory. Elle finit par ouvrir péniblement les yeux.

- Manelle? Qu'est-ce qu'il y a, tout va bien?

- Coraline! C'est Coraline!

Elle se redresse immédiatement et, soudain parfaitement tirée du sommeil, tourne la tête de tous les côtés.

I Need Your HelpOù les histoires vivent. Découvrez maintenant