Je salue une dernière fois mes parents. Cela doit être la centième depuis une demi-heure. Lorsque je leur ai annoncé que nous devions partir, ils nous ont retenus tant qu'ils pouvaient dans l'entrée. Nous avons notamment attendu ma mère une demi-heure, qui insistait pour nous donner des Tupperware des restes du repas. Je chemine donc les bras pleins, malgré la proposition d'Enzo de m'en prendre que j'ai acceptée.
Il meuble la conversation en commentant quelques événements de la soirée, précisant ses ressentis et les souvenirs de sa famille que cela lui rappelait. Je me contente de sourire lorsque je le vois éclater de rire et de le suivre jusqu'à mon bungalow. Postée devant la porte, je place les boîtes de plastiques par terre pour sortir les clés de ma poche."-Si tu veux en prendre, vas-y, offre-je en désignant les récipients du menton."
Il en prend deux puis m'embrasse rapidement sur la bouche en s'empressant de déclarer.
"-Je reviens tout de suite."
Puis il disparaît dans la bâtisse d'en face. J'entre dans la mienne et entasse les Tupperware dans le frigo.
Je ne saurais dire si c'était à cause de la fatigue ou simplement mon imagination, seulement j'ai l'impression d'être observée. J'ai, certes, laissé la porte grande ouverte en attendant Enzo. Je ne sais pas si c'était une si bonne idée. Un vent frais s'engouffre dans la pièce et me fait frissonner. Je sens mon coeur palpiter plus vite et plus fort qu'habituellement. L'obscurité extérieure ne me rassure pas, au contraire. Elle me donne la sensation que quelque chose va bondir d'une minute à l'autre. Ma respiration se fait de plus en plus rare, voire inexistante.
Je tente de ne pas y penser et continue mon affaire dans la cuisine. Quand soudain, j'entends un bruit de pas. Il est lent, très lent, et presque trop régulier pour ne pas faire flageoler mes jambes. Ils se rapprochent de plus en plus. J'halète violemment et plaque mes mains contre ma cage thoracique, avec l'espoir de calmer mes battements cardiaques. Les crissements sur le gravier me parviennent depuis maintenant l'entrée du bungalow. Je vois la silhouette de l'intru se refléter sur le mur grâce au clair de lune."-Bouh !"
Le temps se fige. Tout s'arrête. Je tombe alors sur les fesses et tente de calmer le vertige. Le visage d'Enzo se décompose en me voyant affalée ainsi. Il se précipite vers moi et me serre contre lui avec toute la force dont il est capable.
"-Oh mon bébé, je suis vraiment désolé. Tu vas bien ? Si j'avais su que tu aurais aussi peur, je ne l'aurais jamais fait. Que je suis con ! Mais c'est pas possible d'être aussi. . ."
Je le fais taire en posant mon index contre ses lèvres.
"-Ce n'est pas toi. J'ai juste. . . eu une sensation d'être observée. J'étais effrayée et je n'attendais que ton retour pour fermer cette maudite porte et être enfin en sécurité. Seulement, quand tu es apparu comme ça, tu m'as juste terrorisée, expliqué-je avec un sourire forcé vers la fin."
Il reste sérieux et n'émet aucun rictus, signe de contrariété. Il ne va quand même pas se mettre encolère contre moi et me faire la gueule pour sa connerie ?!
Un mal de tête vient mettre fin à notre début de dispute. Je m'appuie sur son épaule pour me remettre debout, malgré le tremblement de mes jambes. Me voyant dans cet état, il passe ses mains autour de ma taille et de mes genoux pour me porter contre son torse. Prise de surprise, je m'accroche tant bien que mal à son cou. Mes oreilles sifflent tandis qu'il me porte dans l'escalier, avant de me déposer sur mon lit. Il retire son t-shirt et se glisse sous mes draps."-Tu viens dormir ? demande-t-il."
Je me redresse, juste assez pour retirer mon haut et mettre celui de mon copain à la place, puis le rejoins sous la couverture. Je pose ma tête contre son torse en soupirant.
"-Ca va mieux ? s'inquiète-t-il.
-Je sens que ça passe. . .
-Tu sais, si jamais tu as encore l'impression que quelque chose ne va pas et que tu ne te sens pas en sécurité, tu peux venir me voir. Absolument quand tu veux. Je serai toujours là pour toi."
Je le serre contre moi tandis qu'il m'enroule dans ses bras. Nous restons un long moment dans cette position. Nous écoutons nos respirations l'un l'autre, profitant de nos chaleurs corporelles mutuelles. Je savoure cet instant comme si c'était le dernier. Je fais de même chaque minute passée avec lui, par crainte que ce ne soit la dernière. Car un jour, ce le sera.
*
Un bruit sourd me tire de mon sommeil. J'ouvre difficilement mes yeux. Je me retrouve lovée contre Enzo, transpirants tous deux de la chaleur estivale nocturne. Je crois tout d'abord rêver encore. Puis le même fracas retentit. Je frémis. Je me tourne vers mon copain, éveillé lui aussi à mon grand soulagement.
"-Tu as entendu ? soufflé-je avec effroi."
Il hoche la tête positivement. Je sens sa peau devenir grumeleuse sous la mienne. Il est aussi effrayé que moi, mais fait tout pour ne rien laisser paraître.
Nous nous relevons puis sortons de la pièce. Tout est redevenu silencieux. Tapis dans le noir, je serre la main d'Enzo contre la mienne."-Bébé ? fais-je en un murmure.
-Oui ?
-J'ai peur du noir."
Je le sens sourire avant de déposer un bisou sur mon front. Il passe ensuite un bras autour de mes épaules pour me serrer plus fort contre lui. Je lui en suis immédiatement reconnaissante. Mes craintes s'émoussent à son contact. J'allume la lumière de la cage d'escalier et nous le descendons lentement, marche après marche, augmentant le suspens.
"-Il y a quelqu'un ? demandé-je d'une voix forte pour masquer ma frayeur."
Personne, hormis Enzo, ne me répond.
"-T'es sérieuse ? Tu sais très bien que, lorsque quelqu'un dit ça dans un film d'horreur, il se fait buter la seconde d'après, se moque-t-il."
Je le frappe.
"-Imbécile ! Tu crois arriver à me calmer en me disant cela ?!"
Il ricane tandis que nous arrivons en bas. Là, il cesse brusquement de rire. Je dirige mon regard vers la porte d'entrée, constatant avec terreur qu'elle est ouverte. Un vent glaçant s'engouffre dans le salon et la fait balancer d'une manière très glauque. Je balaye des yeux le living-room et remarque que tout est à sa place, que rien n'a été volé. Mon copain a dû faire le même constat car il essaie de deviner ce qu'il a bien pu se produire.
"-Tu penses qu'on l'a fait fuir ?"
Je hausse les épaules à sa question en avançant vers l'extérieur pour refermer la porte. Seulement, aussi gentleman que protecteur, il m'en empêche et s'en charge à ma place. Arrivé au pas de celle-ci, quelque chose à ses pieds attire son attention. Il l'examine avant de pencher pour s'en emparer.
"-Qu'est ce que c'est ? m'enquis-je en le rejoignant."
Il ne répond pas et surveille les environs hors du bungalow avec une certaine panique. J'ai à peine le temps d'apercevoir la photo d'une brunette qu'il la chiffonne et la déchire.
"-Enzo, tout va bien ? m'inquiété-je en posant une main sur son épaule."
Sa mâchoire se contracte et se relâche sans cesse. Je vais pour me placer en face de lui, lorsqu'il claque soudainement la porte pour fait éclater sa colère ou sa frustration.
Mon coeur accélère et ma gorge se noue.Pourquoi se met-il dans cet état pour cette intrusion ?
Pourquoi y'avait-il une photo sur le paillasson ?
Qui est cette fille ?
Mais surtout, pourquoi la voir photographiée t'exaspère ainsi ?Tout un scénario se crée dans ma tête. S'il te plaît, dis-moi qu'elle est juste anodine pour toi, qu'il ne s'est rien passé entre vous. S'il te plaît. Je t'aime.
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Tout ça pour lui (Terminé)
Teen FictionDes lors où ses yeux se sont posés sur moi, j'ai su que quelque chose avait changé en moi. Mais je ne pensais pas être capable d'agir comme tel par amour. J'ai fait tout ça par amour. Tout ça pour lui.