Chapitre 9

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"-Enzo ?! Mais qu'est ce que. . ."

Je me sens mourir de honte sous son sourire malicieux.

"-Je devais savoir comment notre plan a échoué.

-J'ai fais semblant de vomir. Mais elle a insisté pour rentrer dans la salle de bain et elle a vu que c'était fake."

Il soupire, visiblement embêté. Les paroles de Dylan me reviennent soudainement : "Ah au fait, il est en  couple." Mais que je suis stupide !

"-Si tu ne veux pas y aller, je comprendrais."

Il fronce les sourcils, ne semblant pas comprendre.

"-Pourquoi ne voudrais-je pas y aller ?

-C'est toi qui ai eu l'idée du plan hier. . .

-Oui mais ça ne prouve rien."

Mais, mais. . . Il me désespère. Avoue-le que tu es en couple, ce n'est pas un fléau.

"-Tu n'es pas obligé d'en parler à ta copine."

Il paraît encore plus dérouté.

"-Hein ?"

Peut être vient-il de se faire larguer ? Je viens de retourner le couteau dans la plaie. Mais que je suis idiote ! Je rassemble alors mes cheveux trempés en chignon et déclare.

"-Je vais me préparer. Tu peux rester si tu veux."

Je monte les escaliers à toute vitesse, Show Must Go On dans la tête. Je me sèche les cheveux, pas besoin de les plaquer étant donné qu'ils sont déjà raides, et enfile la jupe noire que j'avais achetée pour le réveillon, mais que je n'ai finalement pas porté, avec un haut rose saumon. J'ajoute une touche de mascara et le tour est joué ! J'opte ensuite pour des ballerines, ne trouvant pas les tennis adéquates dans ce genre de situation.

Dans la cuisine, je ne vois plus Enzo. Il est parti. Je devais m'y attendre. . . Je ne devrais même pas être déçue s'il ne vient pas ce soir.

J'ai l'impression que tout se passe trop vite. Nous nous connaissons que depuis, disons, deux jours et nous en sommes déjà à faire un dîner aux chandelles !

Je me comporte comme une attardée mentale quand je suis avec lui. Je bégaye, je ne sors que des bêtises, je suis méchante. . . Je déteste être comme ça. J'aimerais tellement être "immunisée" contre le charme masculin. Mais que ce traitement ne soit pas valable pour le sexe opposé, soyons clairs. Pouvoir parler à un beau gosse sans rougir ni prendre un ton sec ou timide quand je leur parle.

Evy a essayé de m'injecter cet antidote. Durant toute une nuit, elle m'a passé en revue tous les acteurs, chanteurs, danseurs et j'en passe qui étaient attirants et je devais engager la conversation.

Sauf que, dès le lendemain, l'effet s'est dissipé. Je lui ai avoué que ce n'était pas pareil de parler avec une photo et parler avec une vraie personne.

Ma timidité a toujours été mon plus gros défaut, contrairement à ma soeur. Elle fait l'imbécile tout le temps, mais assume les conséquences. Elle sortait tous les soirs avec des amis pour faire du skate en 6 ème. Moi, à son âge, je passais mes journées à lire des bouquins. Elle avait tellement d'amis qu'on ne la voyait presque plus : le soir elle passait son temps à envoyer des messages et à passer des coups de téléphone. Moi, j'étais toujours toute seule dans la cour, un livre à la main. C'est à cette période que j'ai connu Evy et, depuis, nous ne nous sommes plus éloignées.

Qu'est ce que je ne ferais pas pour elle ? Que ferais-je sans elle ?

Rien.

Je ne voulais jamais l'admettre mais sans elle je ne serais rien. Je serais devenue un rat de bibliothèque, comme Miss Grundy, la prof de musique dans Riverdale (la copine d'Archie, le roux).

A chaque fois que j'aimerais parler, je sens comme un blocage dans ma gorge et cela m'empêche de parler, sinon trop doucement pour que l'on puisse m'entendre.

J'ai l'impression d'être un fantôme. Personne ne te voit, personne ne t'entend, personne ne ressent ta présence. J'ai pris de l'assurance depuis cette époque, en quatre ans nous avons le temps d'évoluer, mais pas assez pour ne plus me considérer comme "timide".

Evy apparaît, plus belle que jamais. Une robe bleue moulante à bretelles sublime et ses cheveux ondulés au fer sont tout bonnement. . . extraordinaires.

"-Tu es magnifique, dis-je.

-Toi aussi.

-Oh, moins que toi je te l'assure !"

Elle me prend dans ses bras.

"-Je suis tellement contente que tu aies finalement accepté de venir."

Je n'ose plus lui dire que je ne voulais plus y aller. La voir radieuse ainsi me coupe le sifflet. Elle est amoureuse -oui, déjà- je dois la laisser faire ce qu'elle veut, tant que ce n'est pas dangereux pour elle.

"-Après on fera tout ce que tu voudras, pour compenser. D'accord ?"

Je lui lance un regard soupesé de sous-entendus.

"-Tout ce que je veux ?

-Absolument tout.

-Demain virée shopping. Ce n'est pas discutable."

Elle rit et je l'imite. Comme je le disais tout à l'heure, qu'est ce que je ne ferais pas pour cette dinde ? Nous entendons quelqu'un frapper à la porte et Evy sautille jusqu'à elle pour ouvrir. Dylan apparaît sur le seuil, vêtu d'une chemise blanche et d'un jean. Ne nous mentons pas, il est à craquer comme ça.

Je détourne la tête, gênée de les voir s'embrasser aussi sensuellement. Je fais alors mine de ranger de quelques verres dans le lave-vaisselle, me baissant le plus possible pour que le comptoir du bar me cache aussi longtemps que nécessaire.

Je ne veux vraiment pas y aller. J'angoisse tellement que j'ai l'impression que mon ventre est lacéré par des milliers de fouets imaginaires. Imagination débordante le retour ! Je tente de me calmer en inspirant puis en respirant profondément, mais rien n'y fait. Tiraillée d'anxiété, éreintée d'avoir dansé, désespérée d'un amour à sens unique, je me redresse, les épaules et le dos plus droits que jamais, le menton dressé.

Mais toute ma confiance en moi s'évapore lorsque je croise un regard céruléen, un peu trop familier.

Rappelle-toi que tu le détestes. Enfin, tu es censée le détester. Non pas censée, il t'exaspère et tu te dois de faire de même. Je ne m'y retrouve plus, même dans mes propres pensées.

Il lance.

"-Bon, ce n'est pas que j'ai faim mais on devrait y aller non ?"

Les autres s'écrient que c'est une "Bonne idée !" tandis que je me contente de les suivre, impossible d'articuler une syllabe. Moi qui, d'habitude, aie le sang chaud, il se pourrait qu'Enzo m'ait transformé en serpent ou je ne sais quel autre animal à sang froid.

Je ne trouve pas de place où mettre mes bras. Dois-je les croiser ? Les mettre derrière le dos ou au contraire à l'avant ? Devrais-je les placer sur mes hanches ou les laisser ballants ?

Evy m'adresse un clin d'oeil et je lui rends son sourire.

Mais qu'est ce que je fais là ?!

Tout ça pour lui (Terminé)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant