Chapitre 50

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Je me mords la lèvre. Ses sourcils se haussent et il relève mon menton du bout de ses doigts.

"-Qu'est ce qu'il ne va pas ?"

Je ne suis pas réellement douée pour cacher mes émotions. Je resserre la prise que j'ai sur sa taille tout en avouant.

"-Et après ? D'accord nous nous aimons, mais que se passera-t-il à la fin de l'été ? Nous retournerons chez nous, la tête pleine de souvenirs. Seulement, qu'adviendra-t-il de Nous ? Je ne veux pas te perdre."

Mes yeux s'embuent tandis que j'attends sa réponse. Ses yeux ne quittent pas les miens. Ses lèvres restent scellées, néanmoins je sais qu'il réfléchit à la question. Jusqu'à lors, nous vivions au jour le jour, sans nous soucier de l'avenir. C'était carpe diem. Il soupire soudain bruyamment en détournant le regard.

"-Honnêtement j'en sais rien et je n'ai pas envie de savoir. Pourquoi se soucier de l'avenir quand le présent nous accueille bras ouverts ? Je t'aime, tu m'aimes, point. C'est tout ce qui importe."

Je fronce les sourcils.

"-Tu ne comprends pas. . . Tu ne peux pas comprendre et tu ne le veux pas."

Je retire mes lunettes de soleil pour les poser sur le muret qui démarque la fin de la plage et pouvoir m'asseoir à côté. Seulement, au moment où je ramène ma robe estivale contre mes cuisses pour la rendre plus confortable une fois assise, Enzo prend mon visage en coupe.

"-Excuse moi Bébé. C'est juste que tu me prends au dépourvu là. Mais, je te promets qu'on en parlera plus tard."

Sa réponse ne me satisfait pas plus que cela, je cache néanmoins mon exaspération en adoptant une expression faciale neutre. Le regard rivé vers l'horizon pour éviter son -magnifique- regard azur, dont je n'arriverais surement pas à détourner. Je m'apprête donc à m'asseoir. Je m'arrête immédiatement en entendant un bruit bizarre. On aurait dit que quelque chose se casse comme un "Crac". Je me relève en quatrième vitesse puis constate que mon arrière-train s'est affalé sur mes lunettes de soleil, désormais handicapées d'une de leur branches. Enzo met moins de temps que moi à réaliser ce qu'il vient de se passer et hurle de rire, se pliant littéralement en deux. J'éclate de rire, avant de rapidement de reprendre.

"-Merde, mes lunettes !"

Mon copain se marre de plus belle en me voyant les essayer. Elles sont légèrement de travers avec l'absence d'un de leur support mais elles sont encore mettables. Enzo se calme petit à petit, essuyant les larmes que son hilarité a fait couler sur son visage. Pour ma part, je me contente de le fixer avec un regard noir par dessus les verres de la victime signifiant "Tu rigoles encore, t'es mort". Il désigne ma paire cassée de son index.

"-Ne me dis pas que tu comptes continuer de les mettre dans leur état ! s'exclame-t-il."

Je croise les bras.

"-Alors, premièrement, on ne pointe pas les gens du doigt car c'est très mal poli. Deuxièmement, as-tu une meilleure idée ?!"

Il pointe, du pouce cette fois, une boutique à quelques mètres.

"-Tu pourrais t'en acheter une nouvelle paire. Juste là."

Je soupire en retirant ma paire défectueuse. Je tends ensuite ma main qu'il place contre la sienne en entrecroisant nos doigts.

"-Très bien, allons-y."

Sa peau contre la mienne m'offre du soulagement. Peut être ne finirions-nous pas l'été ensemble, cependant, au moins, nous aurions vécu de belles choses et partagé un grand nombre de souvenirs qu'ils soient heureux ou non. Nous arrivons devant le magasin et nous plantons à côté du présentoir.

"-Je prends lesquelles ? demandé-je en le faisant tourner sur lui-même tout en balayant les paires des yeux."

Il se tourne vers moi, vêtu de lunettes pour bébé, beaucoup trop petites pour lui. Je m'esclaffe en le voyant ainsi. Il continue d'en essayer d'autre, puis s'admire dans le petit miroir en faisant l'imbécile.

"-Qu'est ce que je suis beau quand même ! déclare-t-il avec modestie. Tout me va !"

Je roule des yeux avant de prendre une paire potable afin de la payer à la caisse. Je ne vais pas vous cacher que j'ai pris l'une des paires la moins chère. Je m'apprête à sortir un billet de 20, mais Enzo me devance en tendant le sien. La dame choisit s'en empare et nous salue. En sortant, vêtue de mes nouvelles lunettes, je proteste.

"-J'aurais pu payer !"

Il secoue la tête négativement avant de me faire un long préambule de ce qu'est la galanterie, sur le fait que de nos jours les femmes ne l'acceptent plus, aveuglées par leur vision féministe du monde. . . Je ne l'écoute pas. Enfin, presque pas. Il le remarque et stoppe immédiatement sa tirade.

"-Cela ne t'intéresse pas. . ."

Je lui prends le bras.

"-Bien sûr que si. C'était juste inutile de babiller tant de mots pour si peu."

Il acquiesce en riant un peu jaune. Il reste ensuite muet, regardant l'horizon. Je tente de ne pas penser aux heures à venir, lorsque nous nous serons quittés pour rejoindre nos bungalows respectifs. Lorsque nous serons allongés comme deux cons dans notre lit, à penser à l'autre plutôt que de profiter de nos chaleurs mutuelles jusqu'au grand départ. Jusqu'au réelles dernières heures. Alors, nos vies reprendront leur court. Liées ou non, il leur faudra continuer leur chemin. Une chose est sûre, je n'oublierai pas cet été. Je me le promets.
Enzo se tourne soudain vers moi, puis demande :

"-Tu te souviens de notre premier baiser ?"

Je me mords la lèvre en souriant.

"-Evidemment que je m'en rappelle ! C'était au bosquet. Il pleuvait. Nous venions de nous engueuler. Nous nous sommes révélés nos quatre vérités jusqu'à ce que tu avoues, finalement, que tu m'aimais. Mais que tu ne me méritais pas."

Il se rapproche de moi en continuant mon histoire.

"-Puis tu t'es approchée de moi. J'ai senti mon coeur battre de plus en plus vite, ma respiration s'accélérer. J'avais tellement envie que tu sois mienne, seulement je n'osai pas. . . Enfin. . . Je ne voulais pas te blesser. . ."

Il soupire en passant sa main dans ses cheveux. Mes sourcils s'élèvent légèrement, marquant un air soucieux. Je lui demande.

"-Tu veux en finir ?"

Ma question le prend de court, tandis que son hésitation m'affole. Après tout ce que nous avons traversé, je ne peux l'imaginer me quitter comme ça. Même si cela devait arriver, j'espérais au moins qu'il attendrait la fin de l'été. Je sens ma bouche trembler, mes jambes flageoler, si fort que je ne suis pas sûre de pouvoir encore tenir debout. Mes yeux s'embuent, cependant aucune larme ne sort. Un noeud se forme dans ma gorge et me la brûle.
Il s'empare de mes mains.

"-Quoi ?! Bien sûr que non ! Pourquoi dis-tu ça ? Tu ne veux plus de moi ? répond-t-il d'un ton désespéré.

-Mais c'est toi qui le suggérais ! répliqué-je."

Il soupire en collant ma joue contre son torse et en enlaçant ma tête de ses deux bras.

"-J'ai dit que je ne voulais pas te faire de mal. Jamais que je ne te voulais plus à mes côtés. Ecoute, je t'aime comme je n'ai jamais aimé quelqu'un. Tu es la première qui me fait sentir vivant, qui me pardonne toutes mes bêtises, Dieu sait que j'en fait, qui m'aime pour ce que je suis réellement. J'ai juste peur que lorsque tu découvriras mon passé, tu me rejettes.

-Je te promets qu'il n'en sera rien, affirmé-je."

Il secoue négativement du chef en me contredisant.

"-Tu dis cela maintenant, néanmoins tu vas vite changer d'avis.

-Qu'as-tu fait pour t'en vouloir à ce point ?"

Il fuit mon regard tout en prenant une respiration. Je retiens la mienne en attendant son aveu. Celui que j'attends depuis si longtemps. Celui qui a pourri le début de notre relation. Celui qui m'a fait souffrir tant de fois. Toute cette énergie dépensée à me battre n'a pas servi à rien. Je vais désormais savoir la raison pour laquelle je me suis battue depuis le début, depuis que je l'ai vu.

Tout ça pour lui (Terminé)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant