PROLOGUE

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La chaleur de cette fin de printemps s'était dissipée depuis bien longtemps déjà, et plus précisément depuis que l'astre diurne avait disparu derrière l'élégant vallon sur lequel la ville de Cheralye donnait vue. La brise nocturne soufflait agréablement dans les plumes de l'oiseau, alors qu'il était perché sur le rebord d'une fenêtre.

Le rapace attendit quelques instants, immobile face au verre quasiment invisible qui constituait la surface de la fenêtre. Il était temps. Il frappa le carreau à l'aide de son bec pointu, espérant que cela attire l'attention de sa cible. Le vrombissement des voitures alentours auraient pu le rendre aussi discret qu'une ombre, mais pas pour la personne qui était assise, une tasse fumante à la main, sur l'un des sièges de la salle. L'individu dont il voulait obtenir l'attention tourna la tête vers lui, paraissant amorphe mais aussi surpris. Cependant ce n'est pour autant, qu'il se leva afin de satisfaire sa curiosité quant à cette visite pour le moins inattendue. Il resta plongé dans une mélancolie profonde, les doigts crispés autour de la boisson chaude qu'il s'était faite en dépit de la température se prêtant plus aux breuvages rafraîchissants. L'oiseau inclina la tête, impuissant. Sans cette personne, il ne pouvait rien faire, et il fallait absolument qu'il l'informe de l'urgence de la situation. Grâce à ses yeux de rapace, il pouvait voir sans difficulté dans le noir, mais ce c'était pas le cas de l'individu. Il renouvela son geste, priant pour que la curiosité de cette personne prenne le dessus et qu'elle vienne lui ouvrir. Mais sans grand succès. Cette dernière demeurait de marbre, et ne daignait même plus tourner la tête.

Frustré, le volatil sautilla sur place et finit par se retrouver en face du jardin bien entretenu plongé dans l'obscurité. Le panorama aurait été agréable si la situation n'était pas aussi critique. L'oiseau sentait s'approcher une présence malfaisante. Soudain, dans un vacarme qu'il jugea assourdissant, notamment parce qu'il se trouvait à quelques centimètres de la source, la fenêtre s'ouvrit brusquement, pour laisser place à une grande silhouette longiligne. D'une voix posée, mais étrangement fatiguée, l'inconnu déclara :

" Que veux-tu ? ''

Inclinant la tête de nouveau, sans savoir contenir sa joie, le volatile ne put lui répondre. Ils parlaient un langage différent, et ses paroles restaient de simples piaillements aux oreilles de son hôte. Il bondit gracieusement jusqu'à l'intérieur, sous son regard blasé de son hôte, et se fit la réflexion qu'il aurait beaucoup plus de travail qu'il ne se l'était figuré. La présence malveillante était toujours plus proche, et les mettait tous deux en danger. Sans comprendre pourquoi un tel individu s'apprêtait à les déranger, le rapace jetait des regards indescriptibles à la pièce, comme s'il cherchait quelque chose prêt à sortir de l'ombre. La maison était plongée dans l'obscurité, et allait apparemment le rester vu les états d'âme de son protégé.

Tout à coup, la sonnerie de la porte d'entrée retentit dans toute la maison, causant une grande frayeur à l'individu qui posa par réflexe sa main sur son cœur. L'oiseau disparut en un battement d'aile, et partit se cacher dans l'une des étagères du salon. Le Péché était tout prêt, du moins, c'était ce que lui hurlait son instinct. Il devait se faire tout petit s'il ne voulait pas causer leur perte. Il s'évertua à diminuer l'aura de sa présence et celle de sa magie au maximum tandis que son hôte se dirigeait à pas lents vers la porte d'entrée.

Il entendit s'actionner la poignée, et la voix tendre et chaude cachant pourtant une froideur extrême du nouveau venu le surprit :

" Je ne vais pas passer par quatre chemins, mademoiselle...Puis-je entrer ?

Le volatile pria de toutes ses forces pour que son hôte soit pris d'une lueur de prudence et interdise au Pêche Capital de franchir le seuil, dont la voix doucereuse n'était qu'une couverture pour dissimuler la terrible réalité. Mais ses prières ne furent pas entendues, puisque il vit arriver un magnifique jeune homme dont l'aura le glaça d'effroi. Luxuria. La beauté du visage du démon ne pouvait qu'avoir séduit la personne qu'il était venu chercher. Toutes les lumières de la maison étaient éteintes comme pour cacher une vérité mystérieuse encore secrète, et le péché de la Luxure ne s'en formalisait guère, ce qui permit au propriétaire et au rapace de deviner sans peine les intentions du nouveau venu.

Le Temps Des Sortilèges- Tome 3 - Un Don Pour L'éternitéOù les histoires vivent. Découvrez maintenant