Le Temps Des Sortilèges- Tome 3 - Un Don Pour L'éternité

XVII

Suite à la nouvelle plus qu'inattendue, un silence pesant s'installa dans la pièce devenue soudainement trop petite pour contenir l'atmosphère lourde qui y régnait en maître. L'air sembla même soudainement se raréfier. Complètement effarés, les quatre personnes présentes dans le bureau du jeune châtelain de Cheralye, se dévisagèrent tour à tour. Leurs cerveaux étaient en ébullition sous la déferlante de questions qui en jaillissaient, sans qu'ils ne soient cependant en mesure de prononcer un mot devant la bombe qui venait tout bonnement d'être larguée. Comment cela était-il possible ? Charlie, la petite sœur de Guillaume ? L'intéressée, qui sortit la première de sa transe, arracha la lettre des mains de sa meilleure amie avant de la parcourir frénétiquement des yeux. Elle espérait vainement que cette dernière se soit trompée. Malheureusement, les quelques rares mots qu'elle parvint difficilement à décrypter ne firent que confirmer les dires de la blondinette, indiquant l'existence d'un lien fraternel l'unissant au seigneur des lieux. Bien qu'elle n'en eut pas la moindre envie, les phrases écrites élégamment à la plume rendirent la nouvelle d'autant plus réelle. Comme si la lettre l'avait brûlée, Charlie la lâcha brusquement, n'arrivant toujours pas à accepter cette nouvelle tournure que prenait la situation. Se penchant à terre pour ramasser le parchemin marqué du sceau des maîtres de Cheralye, Guillaume s'empressa à son tour de lire les quelques phrases de ce qu'il semblait être une confession de son père, probablement écrite peu avant ou lors des derniers instants de sa vie. Tandis que la jolie brune cherchait un soutien dans les yeux de son mari, celui-ci fixait le vide devant lui.

" Je...Mais Charlie, vous avez dix-huit ans ? J'en ai vingt-quatre pour ma part, et ma mère est décédée à mes 6 ans. Elle n'aurait guère pu être enceinte de vous, je m'en serai souvenu ! Nous aurions des annales à ce sujet, une trace...

Le jeune homme dardait son regard sur la plafond de la pièce, cherchant dans ses souvenirs la preuve inéluctable pour contrer la vérité dérangeante. Il tenta de raisonner,  une fois la lecture de la lettre achevée : 

"...Non ce n'est pas possible, la lettre mentionne un enfant de cette époque et Charlie vient du présent Natacha, il n'est donc pas possible qu'elle... 

- Non Guillaume, si vous relisez cette lettre il n'est pas question de votre mère... L'interrompit sa dulcinée, le regard également plongé dans une dimension qu'elle seule pouvait voir. Et cette lettre dit vrai. Un enfant malade, un collier, une disparition... Tout coïncide. "

A l'entente de ces mots, Charlie resta silencieuse, ayant elle-même fait le lien. Voyant qu'il fallait mettre à jour les deux hommes de la pièce, puisque ces derniers ignoraient tout de la mystérieuse découverte de Charlie, bébé près du château de Cheralye, Natacha s'engagea pour leur expliquer les faits, guettant leur réaction avec une certaine appréhension. Mais dès qu'ils l'entendirent, ils se fermèrent comme des huîtres, noyés sous les interrogations qui fleurissaient en plus grand nombre dans leur esprit. 

" Si j'en crois ce que dit cette missive, reprit Natacha. Après la mort de votre mère Aelys, votre père, Thibault semblerait avoir eu un enfant illégitime. Et, si vous vous souvenez des récits de l'ermite, l'ancien seigneur de Cheralye était également le dernier homme en possession de la Pierre de Dieu. Regrettant certainement d'avoir trouvé refuge auprès d'une autre femme si peu de temps après la mort son épouse, il aura certainement voulu que l'enfant disparaisse, pour la tranquillité de tous, j'imagine, et pour ce faire il a dû utilisé le pouvoir du pendentif.

- Mon père n'aurait jamais fait une chose aussi vile et basse que de se débarrasser d'un enfant pour sa tranquillité d'esprit ! Mais quand bien même ce serait vrai, il n'y a pas de rapport avec Charlie, asséna le châtelain en s'asseyant dans son fauteuil avant de se prendre la tête entre ses mains, incapable d'accepter les faits tels que la demoiselle les exposait.