Chapitre 3

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Ethan

Je serre tellement la bouteille d'eau entre mes doigts qu'elle se fendille, laissant le liquide se répandre sur mon pantalon. Me voilà donc, l'entrejambe mouillée comme si je m'étais pissé dessus, et les nerfs à vifs à cause de cette petite idiote. Malgré ma colère, un sourire se dessine sur ma bouche.

Cette fille n'a vraiment pas froid aux yeux !

Je l'aurais bien attrapée par les cheveux pour la déposer sur mes jambes, et lui donner une bonne fessée, comme on le fait avec une sale gamine de son genre. Des images de cette scène, si saugrenue soit-elle, défilent devant mes yeux. J'en éprouve même un certain réconfort. Je me tortille pour empêcher l'intérieur de mon boxer de réagir à l'évocation de cette possibilité, et j'essaie de penser à autre chose que ma main sur son joli postérieur. Mon sourire s'élargit davantage au souvenir de ce dernier quart d'heure.

Ça faisait longtemps que je ne m'étais pas senti aussi vivant !

Cette confrontation a réveillé des tas d'émotions, qui m'ont sorti de cet état de léthargie, dans lequel je me suis enfermé. J'ai ressenti le besoin de l'étrangler alors qu'elle se foutait ouvertement de ma gueule. L'envie d'embrasser cette bouche pulpeuse badigeonnée d'un gloss nacré, qu'elle s'évertuait à mordiller sans cesse, m'a effleuré l'esprit aussi.

Mais simplement pour lui clouer définitivement le bec.

Je pose ma tête contre le canapé en passant mes mains dans mes cheveux. Je n'ai jamais rencontré de gonzesse aussi chiante, mis à part la femme qui a partagé ma vie pendant plus de dix ans. Clara était plutôt du style à tout vouloir contrôler, le cercle fermé de nos amis, la voiture que l'on devait acheter, les fringues que je portais, la décoration de la maison. Elle avait son mot à dire sur tout et n'importe quoi, ce qui nous a valu quelques sérieuses disputes. Mais j'étais amoureux d'elle et je croyais dur comme fer, à l'inverse. Je me suis bien fait avoir ! À la première difficulté, elle m'a largué comme une merde, sans éprouver le moindre remord. Je peux comprendre ce qu'elle a ressenti en me voyant avec ces tiges immondes en travers de ma jambe. Pourtant, c'est moi et moi seul, qui suis obligé de les supporter. C'est MON monde qui s'est écroulé ce jour-là, quand cet espèce de connard a décidé, je ne sais pas pourquoi, de nous envoyer dans le décor. J'ai tout perdu, mon travail, ma détermination, ma raison de vivre.

La petite chieuse a sans doute raison, je ne suis qu'une poule mouillée !

Je souffle fortement en essayant de sortir de ce canapé, quand la porte d'entrée s'ouvre brusquement.

— Ethan Jules Thomas Mallard ! gronde la voix de ma mère.

Elle ne m'appelle par ces trois prénoms que lorsqu'elle est contrariée. Mon petit doigt me dit que c'est en rapport avec Mademoiselle Garant. J'ai comme la mauvaise impression que je vais passer un sale quart d'heure. Ses pas déterminés arrivent précipitamment jusqu'à moi. Je dois me préparer à recevoir les foudres de ma génitrice, en bonne et due forme.

— Mademoiselle Garant vient de m'appeler, amorce-t-elle d'une voix plus calme que je l'aurais imaginé.

Je lui offre mon plus beau sourire pour tenter de l'amadouer, mais c'est peine perdue. Ses yeux bleus me foudroient sur place.

— Elle refuse de s'occuper d'un adolescent psychorigide et borné, enchaîne-t-elle en mimant des guillemets avec ses doigts. Tu peux m'expliquer ce qui s'est passé ?

la vie arrachée Où les histoires vivent. Découvrez maintenant