Chapitre 15

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« Nuage de Flamme ! »

La novice rousse, affalée près du Promontoire à l'ombre d'un hêtre, stoppa sa toilette.
Elle chercha un instant des yeux celui qui l'avait appelée.

Dans la clairière encore endormie ou que très peu de chats étaient déjà dehors, elle ne mît pas de temps à le trouver : en face d'elle, une paire d'yeux ambres la dévisageait avec joie.

Elle reconnut alors Berlioz à l'entrée de la tanière de Museau Cendré.
Aussitôt, Nuage de Flamme se releva en lâchant son plus beau sourire.
Le grand chat brun avait enfin eu l'autorisation de sortir ? C'était génial !

La jeune chatte abandonna sa place et trottina vers le chat errant, contente de le voir enfin au milieu du camp.
Berlioz l'attendait, la queue frémissant d'excitation.
Sous le soleil automnal, sa fourrure reflétait les jolis teintes marrons qu'avaient pris les arbres au-dessus de la clairière.

Nuage de Flamme leva un instant la tête vers le haut du ravin. Éblouie par les rayons du soleil, elle cligna des yeux.
Même si certains feuillus gardaient leur verdure, la plupart commençaient doucement à se dénuder, enveloppant la forêt d'or.
Petit à petit, celle-ci se métamorphosait et revêtait un manteau caractéristique de la nouvelle saison à venir, tout nouveau aux yeux de la jeune chatte. 

Le froid avait aussi remplacé la douceur estivale depuis quelques jours.
Surtout depuis leur retour des Hautes Pierres, il y a deux jours.

Nuage de Flamme frissonna aussitôt en se remémorant son voyage et sa rencontre avec ses ancêtres.
Les rires sournois des spectres résonnèrent alors dans son esprit.

Nuage de Flamme secoua subitement la tête. quoi qu'elle fasse, elle repensait à sa vision et les images de ses camarades tués lui retournaient constamment la tête.
Et à chaque fois de plus en plus réel, de plus en plus atroce. Elle avait l'impression que ce cauchemar ne la quitterait plus jamais.

Nuage de Flamme savait qu'il fallait cependant le prendre avec grand sérieux. Elle le savait. Elle y pensait toujours. Quelque chose de grave planait au-dessus de l'avenir des Clans.
Sinon, Petite Feuille ne lui aurait jamais révélé de telles images. Surtout à elle.
Je suis spéciale.

La petite tentait d'élucider la prophétie et essayait tant bien que mal de comprendre ce que les menaçait, depuis leur retour du pèlerinage. En vain.
Pour l'instant, l'horreur de la vision l'empêchait de réfléchir clairement. Et ce que lui avait montré Petite Feuille avait été si terrifiant qui penser l'épouvantait grandement.
Alors, inconsciemment, elle rejetait souvent ces souvenirs.

C'était avec le cœur lourd qu'elle se retenait de hurler ses doutes et ses craintes, de se libérer enfin de ce lourd fardeau, trop lourd pour ses épaules d'apprentie. 
Mais pourtant, à chaque fois qu'elle en avait eu l'occasion, l'effroi l'avait empêché de se confesser. Comme un bloquage, qui ne faisait que s'empirer.
J'aurais dû en parler à Étoile de Feu dès mon réveil, quand j'en avais encore les moyens...

« Nuage de Flamme ! Museau Cendré m'a autorisé à sortir dans le camp ! »

La jeune apprentie se mordit les lèvres.
La prophétie n'allais pas l'empêcher de profiter du moment présent et de cette joie que lui offrait la sortie de Berlioz.

La rouquine bondit vers lui et le salua d'une ondulation de la queue.

« Depuis le temps qu'on attendait ce moment », ronronna-t-elle.

Le grand félin acquiesça.
Il semblait fier de lui de pouvoir enfin se faire à l'idée qu'il guérissait.
Même si de nombreuses toiles d'araignées recouvraient encore ses plaies, notamment à la patte arrière où il avait été le plus gravement blessé, son pelage brillait et ses côtes ne saillaient plus.
Nuage de Flamme était elle aussi très contente pour lui. Il revenait de loin quand même.
D'un signe de tête, elle invita le blessé à l'accompagner :

Ténèbres glacés, Espoirs flamboyants - LGDCOù les histoires vivent. Découvrez maintenant