III- « Madame-je-sais-parler-mais-je-peux-me-taire ! »

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Les fours à pain dégageaient une odeur agréable, mais la chaleur qui l'accompagnait ne l'était pas.

Dorothy restait plantée à l'entrée, prête à faire demi-tour.

La jeune femme finit par s'apercevoir que l'attention s'était tournée vers elle, comme si elle s'était transformée en une quelconque représentation de la déesse de Milo.

Ses yeux noirs se posèrent sur Ollie. Ce dernier lui fit signe de la rejoindre. Il n'avait pas le même air que la veille, laissant penser que c'était la première fois qu'ils se rencontraient. Dorothy sauta les deux marches et rejoignit sa connaissance d'un soir.

— Tu aurais dû passer par derrière. C'est plus discret.

— Qu'est-ce que je fais là, Ollie ?

Celui-ci semblait tout aussi décontenancé qu'elle. Surtout qu'Alfie avait bien spécifié qu'il ne voulait pas de secrétaire. Même s'il ne savait jamais ce que son boss avait derrière la tête, il pensait que c'était un avis catégorique.

— Je ne sais pas. Suis-moi.

Sa voix était froide. Dorothy avait l'impression d'être une étrangère à ses yeux alors qu'il connaissait déjà tout de sa situation.

Cette attitude accentuait l'atmosphère pesante, la rendant encore plus nerveuse qu'elle ne l'était déjà.

Passé les portes, ils se retrouvèrent dans un couloir lugubre avec plusieurs bureaux cloisonnés. Il ne faisait pas chaud et une odeur moite régnait entre ces pierres froides.

— Attends dans ce bureau.

— Tu ne comptes pas m'en dire davantage ? insista-t-elle.

Ollie soupira, la main sur la poignée de la porte. Il rangea son calepin dans la poche de son tablier et jaugea la jeune femme de la tête aux pieds.

— J'ai parlé de toi à mon patron, ce matin. Alfie. Il avait été catégorique et voilà que tu es devant moi. Je ne sais pas ce qu'il a en tête, mais si tu travailles ici, tu vas devoir tirer un trait sur ta première vie. Nous ne faisons pas dans la dentelle, ni dans quoi que ce soit que tu ne connaisses déjà.

Dorothy retira son manteau et le lança sur le fauteuil avant de fixer le garçon qui l'avait accosté la veille.

— Sans rire ? Au vu de ce que tu m'as expliqué, je me suis doutée que le pain n'était pas votre domaine de prédilection. J'ai besoin d'un travail, c'est tout.

— Parfait, alors reste ici. Alfie va revenir dans quelques instants.

Ollie referma derrière lui et retourna vers les caves, laissant Dorothy dans ce bureau mal rangé.

***

Alfie attendit que Jacob coupe le moteur de l'Argyl et descendit du véhicule.

Cette voiture n'avait rien de confortable et il préférait de loin les Crossley qu'il avait connu pendant la guerre. Celle là, en revanche, lui rappelait ses maux de tête constants et sa douleur à la cuisse. Ce serait donc de mauvaise humeur qu'il rendrait visite à son vieil ami.

Londres, le repère des ritals.

Sabini l'attendait probablement dans un des clubs qui n'avait pas été saccagé par les gitans.

Ce rendez-vous n'était pas une brillante idée, mais Alfie savait que le vieux crotale ne tenterait rien de farfelu. Il voulait s'assurer que la nouvelle alliance avec les Peaky Blinders était réelle. Il voulait l'entendre de la voix d'Alfie et non le découvrir sur un vieux télégramme.

The Woman In Black And White || PEAKY BLINDERS A.SOù les histoires vivent. Découvrez maintenant