The Woman In Black And White || PEAKY BLINDERS A.S

V- Les liens du sang

Comme si elle se rendait à un enterrement, Dorothy avait choisi de porter du noir. Elle s'était dit qu'avec cette couleur, personne ne la remarquerait. Elle avait bien compris qu'Alfie voulait rentrer dans la provocation, mais ça ne signifiait pas qu'elle devait s'insinuer dans son jeu. Quand elle allait devoir traverser toute l'avenue de Camden, elle voulait que ça se fasse dans la discrétion.

Aussi, alors qu'à côté d'elle les ouvriers posaient de gros sacs blancs dans des brouettes de fer, Dorothy se faufila entre la fumée et les hommes. Sa robe noire se fondait parfaitement dans la masse sombre de l'allée commerçante.

Pour dissuader quelques audacieux, elle n'avait qu'à ouvrir le pan de son imperméable, découvrant son holster d'épaule en cuir. Cependant, les rumeurs filaient bon train, ici. Quand les ouvriers avaient vu une blonde aux abords des docks, ils avaient compris que c'était la nouvelle employée d'Alfred Solomons.

Les hommes étaient courageux, mais peu téméraires. Ils connaissaient l'imprévisibilité d'Alfie. Alors, quand la jeune femme passa près d'eux, ils se contentèrent de son parfum et de ses cheveux blonds lâchés sur ses épaules.

Comme convenu, il était huit heures quand Dorothy posa le pied à l'intérieur des caves sombres de l'Aerated Bread Company. Ses talons claquèrent sur le béton, faisant concurrence au bruit des fours et des explosions bénignes dû à la distillation.

Son pas n'était pas encore assuré alors qu'elle dépassait les « boulangers » tirant les foudres dans un chariot. Elle leur lançait des regards fuyants, n'assumant pas encore sa position. Elle n'était pas habituée à cela, prendre de haut. Quand elle était avec d'autres hommes, tout ce qu'elle avait à faire était de rester assise et se taire. Ce jour-là, dans ces couloirs sombres, elle était au-dessus d'eux.

La voix tonitruante d'Alfie se fit entendre à l'autre bout des bureaux. Là où était entassé le vrai pain. Dorothy hésita à le rejoindre pour se présenter, mais finit par entrer dans le bureau. Ollie, qui était en train de compter les barils de rhums, la vit et se détourna de son travail pour la rejoindre.

— Alfie t'attend. Les Peaky Blinders arrivent sur les docks.

Dorothy décela ce nouveau regard froid qu'arborait Ollie depuis la veille. Il la regardait de haut, la contemplant de toute sa hauteur pour mieux paraître imposant. Toutefois, ça ne marchait pas aussi bien qu'avec son chef.

La blonde ignora le ton distant de son nouveau collègue et pénétra dans le bureau d'Alfie. Elle déposa son par-dessus sur le porte-manteau et lissa les plis de sa robe noire.

— Si j'avais su qu'il te prendrait comme conseillère, je ne lui aurais jamais parlé de toi. Tu te mets en danger. Alfie est trop exposé aux risques.

— Ollie, je savais à quoi m'attendre, tu me l'as dit ce soir-là. Laisse-moi faire mes...

La voix rauque d'Alfie la coupa à travers le bruit sourd des hommes qui rangeaient les cargaisons.

— Ollie, laissa la dame tranquille. Les relations au travail sont formellement interdites. Putain de règle que je viens d'inventer. Maintenant, si ma seconde veut bien se donner la peine !

Dorothy fixa le visage bourru du gangster et laissa Ollie pour rejoindre le responsable de cette « boulangerie ».

Dans la grande cave, cent hommes se rassemblaient, prêts à recevoir leurs nouveaux ordres. Alfie avait déjà passé deux heures à signer leurs faux contrats et il avait la gorge sèche. Or, pas suffisamment pour élever le ton s'il le fallait.

Ses yeux clairs fixèrent la démarche de la blonde. Elle était hésitante, mais cela changerait avec le temps. Quoiqu'il en soit, elle ne manquait pas de classe et c'était tout ce qu'il avait espéré pour fermer le clapet de Thomas Shelby.