VIII- Utopie d'un vétéran brisé

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Alfie avait conduit comme un fou, aussi vite que cette maudite voiture le lui avait permis.

Il ne conduisait plus normalement. Il n'avait jamais fait confiance à ces machines. Mais quand Tobias lui avait expliqué ce qu'il se passait au Eden Club, Alfie n'avait pu que rompre ses propres règles.

Pendant le trajet qui le séparait de Camden au centre de Londres, Solomons avait eu tout le loisir d'hurler silencieusement. Ses pensées étaient en désordre, se perdant entre les insultes et les actions qu'il ferait.

Cyril, à la place du mort, le fixait d'un air intéressé, rarement habitué à ce que son maître soit silencieux. Mais si le chien était dans le crâne d'Alfie, il verrait que ce dernier n'avait jamais été aussi bavard.

Maudissant Ollie et sa bêtise éternelle, Sabini pour ne pas avoir respecté ses règles et sa nouvelle conseillère qui ne l'avait pas prévenu, Alfie avait hâte de leur mettre la main dessus.

Toute la journée, il avait refoulé sa colère, sa haine mais c'était plus qu'il ne pouvait en supporter. Si même ses seconds étaient incapables de se montrer prudents, autant leur tirer une balle.

Le pied d'Alfie écrasa la pédale de frein.

Sa cuisse le rappela à l'ordre et une douleur aiguë traversa toute sa colonne vertébrale.

Mais ça n'avait pas d'importance.

Solomons venait de trahir les Peaky Blinders en envoyant le frère aîné des Shelby derrière les barreaux. Il leur avait tendu un piège, sous prétexte que Sabini s'était finalement excusé et qu'il respecterait ses décisions.

Était-ce l'appel de son frère qui l'avait rendu con à ce point ?

Sa colère retomba quand il vit Ollie et Dorothy dans la lumière de ses phares.

Les yeux clairs du distillateur de rhum se posèrent les corps inanimés des deux italiens, puis sur le sang qui couvrait la jambe de sa conseillère.

À l'aide de sa canne, Alfie ouvrit la portière à Cyril et ce dernier se jeta dans les ténèbres.

Son bras droit le fixait avec son air idiot sur le visage. Il avait fait une sacrée bourde et le savait.

Alfie desserra progressivement le volant et s'extirpa hors de cette voiture.

Dans la précipitation, il n'avait même pas eu le temps de prendre un manteau et regretta cet oubli quand le froid lui gela ses muscles crispés.

Ses yeux fixèrent Ollie pendant un moment. Alfie balança violemment sa canne à l'intérieur de la voiture et marcha incroyablement droit jusqu'à ses deux employés.

— Enlève ta putain de veste, Ollie ! ordonna Solomons en pointant son index sur le brun.

Le concerné balbutia, ne comprenant pas l'ordre d'Alfie. Dorothy s'était faite petite derrière son collègue. Elle évitait le regard d'Alfie, bien que l'appréhension des représailles ne fût pas aussi grande que ce à quoi elle venait de réchapper.

— Ils allaient la tuer, Alfie.

— Ollie, ta veste, bordel de merde. Ce n'est pas le moment de te confondre en excuses comme un mioche qui a pissé dans son lit.

Le bras droit de Solomons croisa le regard brillant de son chef.

Ses pupilles s'étaient dilatées, ne laissant qu'un infime cercle bleu.

Difficilement, Ollie retira sa veste noire et la tendit, incrédule, à Alfie.

Dorothy fixait Cyril comme si c'était le seul à vraiment exister autour d'elle. Le chien s'était assis et fixait le trio sous ses yeux d'une façon assez étrange.

The Woman In Black And White || PEAKY BLINDERS A.SOù les histoires vivent. Découvrez maintenant