XXXIX- Magnolias et fumier

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Dorothy avait suivi le départ d'Alfie à la distillerie et n'avait pas traîné pour plier bagages. Elle avait fait comme il le lui avait demandé : « Décroche tous les cintres et fous-les dans les valises, on s'en branle. »

Ces désirs étaient des ordres.

La blonde avait, toutefois, rangé les vêtements avec précaution, loin de la brutalité qu'Alfie lui demandait d'avoir.

Désormais, il n'y avait plus rien dans l'armoire en bois massif. Tout était vide et cela laissait un goût amer dans la bouche de Dorothy. C'était une sensation étrange, un mélange d'excitation et de mélancolie.

Pour autant, elle n'allait pas s'épancher sur le sujet, elle avait encore des choses à faire avant de rejoindre son employeur à la boulangerie.

Cyril l'attendait sur le pas des marches, les oreilles droites, fixant avec appréhension les valises que tenait Dorothy. Il n'avait jamais vu ces mallettes d'un très bon œil, surtout depuis que sa maîtresse était partie avec ce soir-là.

Dorothy, malgré ses nombreuses expériences avec les bagages lourds, n'en menait pas large dans les marches en bois. Elle descendait prudemment, traînant le cuir sur le cirage douteux du parquet. Elle devait reconnaître que le poids de ses vêtements était relativement plus lourd que ceux d'Alfie.

Mais elle essayait de se rassurer en se rappelant que la moitié de ce que contenait sa valise était, à présent, des cadeaux de Solomons. Il l'avait certainement autant pourrie que ses parents et pour une fois, il y avait de la sincérité dans chaque geste.

Cela n'avait rien à voir.

— Oh, ne fais pas cette tête, Cyril. Je ne vais pas te laisser tout seul ici, rassura Dorothy.

Le bullmastiff ne semblait pas réceptif à cette voix douce mais il reconnaissait l'effort que faisait la jeune femme. Il recula lentement, pour la laisser poser les valises au sol et il la fixa traverser la pièce à vivre.

Elle n'allait pas apporter de livres, elle était persuadée que dans la deuxième demeure d'Alfie, tout était déjà meublé. Elle était prête à mettre sa main à couper qu'il y avait une bibliothèque, là-bas aussi. Cerise sur le gâteau, elle pourrait lire tout en écoutant la mer s'échouer sur le rivage.

Dorothy était déjà partie en vacances avec ses parents. Ils avaient visité la France à une époque, elle était si jeune, elle ne s'en rappelait pas tellement. Dans ses souvenirs, il lui semblait que c'était un coin venteux, qui n'était pas sans rappeler les courants d'air de Londres. Toutefois le paysage était agréable.

Néanmoins, à chaque fois qu'elle partait avec sa famille, Dorothy n'en profitait pas. Elle était restreinte à quelques activités sommaires et Bette n'aurait pas voulu que sa fille s'adonne à des activités trop sauvages. Comme se baigner dans la mer.

La jeune femme balaya le salon du regard, s'arrêtant sur chaque détail et ferma les rideaux pourpres.

Elle ne savait pas s'ils reviendraient ici. Alfie et elle. Elle ignorait la durée de ces vacances, même si Solomons avait été clair : il voulait en finir avec son travail et profiter du temps qui lui restait pour se reposer.

Ce n'était peut-être que des paroles en l'air, Alfie aimait sa vie, sa liberté, son travail. Mais il était exténué. Alors, peut-être que Margate serait le point final de leurs aventures. Elle n'en savait rien.

Sans écouter sa nostalgie, Dorothy reprit la direction du couloir et ouvrit la porte à Cyril qui se précipita dehors. Il était soulagé de voir qu'il ne resterait pas seul dans cette grande maison.

The Woman In Black And White || PEAKY BLINDERS A.SOù les histoires vivent. Découvrez maintenant