XXIX- La mort en bouteille

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L'eau bleue prenait une teinte rose puis rouge, au fur et à mesure que Dorothy y plongeait ses mains et son visage.

Les gouttes teintées ruisselaient le long de sa peau translucide et humide, elles roulaient sur ses vêtements sales et tâchés. Ses mains tremblaient encore alors qu'elle ôtait lentement ses habits. Elles tremblaient de cette frénésie qui l'avait prise plus tôt, quand l'aiguille avait enfin crevé l'abcès.

Son passé était mort, Thorne avec. Elle était libre, enfin.

Dorothy se débarrassa de son caraco en soie blanche et de sa culotte courte en mousseline fine. Ses cheveux blonds tombèrent sur sa poitrine et elle détourna son regard du miroir.

Sabini, Abraham, Thorne.

Mais à la différence des deux précédents, c'était le dernier meurtre qui avait enfin un réel sens. Un but qui ne desservait qu'elle. Cette fois ce n'était pas que pour protéger Alfie mais se protéger elle aussi.

La blonde fixa l'eau brûlante qui s'évaporait lentement de la baignoire en marbre.

Sa main, encore rouge et humide, s'enfonça dans le liquide brûlant et lui piqua l'épiderme avec violence. Dorothy écarta ses doigts sous le contact de cette température élevée mais ne retira pas sa main pour autant. Ses yeux noirs fixèrent la légère trace rouge qui se mélangeait à l'eau claire, comme une aquarelle sur une toile.

Ses cheveux blonds caressaient son visage à chaque fois qu'elle se penchait un peu plus en direction de l'eau, cachant le sang imprimé sur sa peau. Alfie aurait dû être avec elle quand tout s'était déroulé mais Dorothy ne lui en avait pas laissé l'occasion.

Elle avait eu besoin de régler tout ceci par elle-même.

L'aiguille, qui retenait son grand chapeau capeline de couleur blanche, résistante face au vent, tenace dans les cheveux blonds, avait servi à d'autre fins.

Maintenant, elle résidait dans le fond du Canal. Seule trace de ce qui s'était déroulé dans le Eden Club où elle avait descendu un verre puis Thorne.

Dorothy s'assit sur le rebord de la baignoire et commença à passer une jambe, puis une autre, à l'intérieur. Ses orteils rougirent rapidement au contact de la température élevée et elle frémit.

Debout dans cette eau bien trop chaude, Dorothy semblait vouloir se punir elle-même.

Visiblement, se mêler d'un conflit avec les Peaky Blinders ne suffisait pas, il fallait maintenant qu'elle déroge au plan d'Alfie et s'occupe du « problème » seule.

Juste elle et l'aiguille, encore.

Dorothy s'appuya contre le mur alors qu'elle réprimait un gémissement plaintif. La température ne faisait plus que rougir sa peau, elle la brûlait.

— Amen, songea prophétiquement la jeune femme en fermant les yeux.

La vapeur, qui remontait à son visage la faisait suer et Dorothy ne serait pas étonnée de voir que du sang gouttait encore. Celui-là même qui avait imprégné ses mains et ses vêtements.

Les carreaux bleus, qui décoraient le mur où était incrustée la baignoire, étaient devenus totalement embués, aussi la main de la blonde glissait contre la surface. Et avant qu'elle ne puisse se laisser emporter par le Styx, le passeur, Charon, ouvrit la porte à la volée.

— Toi, tu...

La voix rauque d'Alfie se brisa quand ses yeux se posèrent sur les vêtements au sol. Ses paupières clignèrent lentement puis il tourna la tête vers Dorothy.

The Woman In Black And White || PEAKY BLINDERS A.SOù les histoires vivent. Découvrez maintenant