The Woman In Black And White || PEAKY BLINDERS A.S

XXXXV- Entre les livres

Dorothy ferma la porte de son appartement à clé et fixa un instant la paroi en bois. Ses yeux noirs se perdirent entre les marques façonnées contre la matière dure et lisse.

Elle habitait quelques étages au-dessus d'un café mais malgré tout elle arrivait à entendre le brouhaha qui circulait sous ses pieds. Les rires, le bruit de la vaisselle qui s'entrechoquent, les voix. Parfois, elle aimait entendre cette agitation quand elle avait la fenêtre ouverte, donnant sur la terrasse. Cela lui donnait l'impression qu'elle n'était pas seule. Qu'elle était en vie.

Cela ne fait même pas une semaine.

La jeune femme secoua la tête et arrangea ses cheveux dans son dos avant de descendre les escaliers vieux comme le monde et aussi raides que la justice. Les lattes grinçaient sous ses bottines en cuir et de la poussière tombait sur l'étage encore en dessous.

Elle espérait ne pas croiser le concierge qui s'occupait des immeubles du quartier. Un riche propriétaire qui avait fait fortune dans tout l'immobilier de Bermondsey. Cet idiot s'était mis dans l'idée de conquérir la blonde dès qu'il l'avait vue chercher un logement. Mais il n'avait rien à lui, si ce n'est son argent et son avarice reconnue.

Au-delà de ce personnage, le reste du voisinage était discret et assez calme. Tout ce que recherchait la jeune femme. C'était Mary, qui lui avait donné cette adresse et avait décidé du lieu pour reprendre une vie, normalement.

Car jusqu'ici, cela ne l'était pas, normal ?

La blonde fouilla dans son sac seau et en sortit une boîte de cigarettes ainsi que son briquet.

Depuis qu'elle était arrivée ici, elle écumait le coin pour tenter de trouver du travail. Personne n'employait de femmes dans les environs. Aucune sous la parole qu'elles avaient mené une gigantesque entreprise dont elles ne devaient pas prononcer le nom.

Dorothy ne pouvait se permettre de citer son ancienne profession. Encore moins le nom de son précédent employeur. Mais cela réduisait ses chances de trouver un boulot. Pour autant, elle ne perdait pas espoir.

Le travail était son dernier recours. Là, dans cet appartement qu'était le sien, il n'y avait rien à elle, ni pour elle. La seule richesse qu'elle avait traînée, dans ces murs encore vides, était le souvenir persistant qu'elle avait réussi à créer quelque chose.

La flamme, tremblante, qu'il y avait tout un univers derrière elle. Univers qui n'était désormais plus sien.

À l'aide de son épaule, elle poussa la lourde porte et sortit dans la rue commerçante. Elle manqua de se faire chahuter par plusieurs gamins qui couraient derrière un ballon. Ils poussaient des cris aigus tout en se cognant les uns contre les autres, tentant d'être chacun victorieux.

À droite, les cafés étaient déjà ouverts et du monde circulait sur la place. Des serveurs, parfaitement habillés, slalomaient entre les tables rondes, essayant de satisfaire le maximum de clients. Plateau dans une main, carnet dans l'autre, rien n'échappait à leurs mouvements habiles.

La nouvelle arrivante, huma l'air vivifiant et leva la tête vers le ciel céruléen. Un magnifique soleil couvrait la ville et il n'y avait quasiment aucun nuage à l'horizon. Chose assez rare sur Londres pour le préciser.

Elle laissa ses yeux se promener sur les passants, qui l'évitaient d'un regard furtif et tira une nouvelle fois sur sa cigarette. Son manteau fin, s'envolait à chaque nouvelle brise, lui conférant cette silhouette mystique et pure, qui n'était pas sans rappeler des tableaux célèbres.

Son pantalon évasé se démarquait des autres tenues qu'arboraient les femmes des environs, surtout dans ce petit coin de la capitale. Bermondsey était encore une région très industrielle, au même titre que Camden Town, le charbon et le rhum en moins. Aussi, son apparence tranchait drastiquement avec le reste de la population mais elle était habituée à cela depuis Camden. Elle devait juste se faire aux regards curieux et quelques fois inquisiteurs.