Épilogue - Il suffira d'un regard

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Il n'avait pas fallu plus de six années pour que le fascisme finisse par prendre possession de quelques âmes anglaises. Animé par la haine, la rancœur, il ne fallait pas grand chose pour que ce mouvement politique prenne place dans les chambres des communes.

Les discours étaient toujours basés sur des promesses, encore un mouvement qui ne passait pas au travers de ce genre de propos. Bien sûr à leur tête, un loup noir, aux crocs acérés, plein de cette verve dangereuse, menaçante.

Oswald Mosley. Un diable comme le monde pouvait en faire. Cet illustre inconnu commençait à faire du bruit dans les hautes sphères de la politique. Certains ne pouvaient entendre les propos de cet ignoble personnage, d'autres l'adulaient. Il fallait de tout pour faire un monde, comme bien des gens pouvaient le dire, toutefois, il serait bon d'évacuer ce genre d'ignominie.

Alfie, lui, n'avait suivi cette ascension que de très loin. Son entreprise avait connu des jours meilleurs. En six ans, il n'avait ni perdu, ni gagné de terrain. Il restait maître de cette belle capitale anglaise et c'était là tout le mérite qui pouvait lui être attribué.

Le rhum était toujours une denrée extrêmement recherchée, spécifiquement aux États-Unis où la demande ne faisait qu'augmenter. Surtout à cause, ou grâce, à la prohibition qui continuait de perdurer.

Lem, le nouveau commercial de Solomons, avait longuement bataillé avec son chef pour décider d'ouvrir une succursale à Boston mais Alfie n'en voulait pas. C'était trop de paperasse en plus, trop de gestion à déléguer. Il était fatigué. Son cancer avait peut-être ralenti, il n'en restait pas moins harassé par son train de vie. Ses muscles, ses maux habituels continuaient à creuser l'énergie qui subsistait, la drainait hors de ses tissus.

Alors, en dépit d'une évolution à l'internationale, l'entreprise persistait dans ses exportations, seulement. Le pain n'était plus vraiment une couverture pour les forces de l'ordre, Scotland Yard était maîtrisé, malgré la menace du fascisme, tout était sous contrôle.

Personne ne venait faire de descentes dans le coin de Camden Town et si tel était le cas, il serait reçu avec le comité d'accueil. Alfie avait renforcé ses troupes et s'il était déjà inatteignable, c'était pire maintenant.

Finalement, rien n'avait changé depuis 1923.

D'apparence tout était la même chose, sur l'aspect visible comme invisible. 

Alfie n'avait tourné aucune page. Si ce n'est celle de ses livres qu'il connaissait tous par cœur, désormais.

Le souvenir de Dorothy persistait à alimenter la flamme qui le maintenait en vie. Rien, ni personne, n'avait su remplacer l'image de la femme en noir et blanc.

Elle restait la seule maîtresse de son âme et de ses secrets.

Alfie n'avait pas tenu à se remettre de cette perte, gardant seulement pour espoir qu'elle avait réussi à refaire sa vie.

Lui ne le méritait pas.

Ce serait seulement les moments partagés avec elle qu'il choisirait d'emporter dans n'importe quel endroit qui plairait à l'être supérieur de l'envoyer.

Malgré les années plus difficiles que d'autres, il avait maintenu sa barque à flots, limitant les pots cassés, faisant alliance quand cela était nécessaire.

Thomas Shelby demeurait le seul homme méritant le respect et la sincérité d'Alfie, qui avait décidé de ne plus trahir le Peaky Blinder.

Birmingham ne suffisait plus à ces gangsters, ils poussaient comme des fleurs dans les coins huppés de Londres. Surtout depuis que Thomas avait été nommé à la chambre des communes. Le député qu'il était devenu s'attirait des ennemis de taille et c'était justement pour cela qu'Alfie se trouvait, à nouveau, au-devant de la scène.

The Woman In Black And White || PEAKY BLINDERS A.SOù les histoires vivent. Découvrez maintenant