Chapitre 15

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Je n'ai jamais été aussi furieux de toute ma vie. Et encore, furieux est un euphémisme. Je déborde de rage. La main de Mila fermement accrochée dans la mienne, j'avance à grands pas en direction de l'école.

-Papa, ralentis, tu marches trop vite, tente-t-elle de signer.

Je récupère sa main en lui disant de se dépêcher. J'essaie de ne pas l'affoler mais je ne suis pas sûr de bien maitriser l'expression de mon visage. Et vu la manière dont elle me dévisage, elle ne doit rien comprendre à ce qui m'arrive.

Nos bottes crissent sous la neige et nous manquons de tomber plusieurs fois à cause de la vitesse à laquelle nous avançons. Le bâtiment rouge et blanc s'affiche désormais devant nous. Je n'ai aucune idée de ce que je vais dire à Holly, ni si c'est une bonne idée de la confronter ici, sur son lieu de travail mais je ne peux pas attendre. Je dois comprendre, je dois savoir ce qu'il se passe. Si elle souhaite vraiment tout arrêter, c'est son droit mais j'estime avoir droit à une explication. C'est quand même elle qui m'a proposé son aide, c'est elle qui est venue me chercher. Je ne lui avais rien demandé moi. Alors il est hors de question qu'elle dispose de moi comme d'un vieux mouchoir.

Mon index presse le bouton de l'interphone. Je m'excuse de notre retard auprès du surveillant qui nous ouvre après avoir vérifié notre identité. Ma colère ne désenfle pas, je me dirige d'un pas déterminé vers la classe de Mila. Quand nous pénétrons dans le couloir, je demande à ma fille de laisser rapidement ses affaires dans son casier. Pendant qu'elle se défait de son attirail hivernal, je toque à la porte d'Holly.

Elle abaisse la poignée et son visage surpris se dévoile.

-C'est quoi ce message que tu m'as laissé ? lancé-je sans me soucier une seule seconde de la quinzaine de petites têtes qui se tournent vers moi.

-Pas maintenant Louis, siffle-t-elle entre ses dents, tel un avertissement.

-Comment ça, pas maintenant ? Tu crois vraiment que tu peux me parler comme tu l'as fait hier puis m'envoyer ce message incompréhensible sans que je ne vienne te demander des explications ?

Holly se tourne brièvement vers sa classe pour les informer qu'elle s'absente une petite minute. Elle salue ensuite ma fille, qu'elle incite à entre dans la salle et referme la porte derrière elle. Parfait. Il n'y a maintenant plus que nous dans le grand couloir vide. Un silence inconfortable s'installe entre nous. Nous nous jaugeons du regard et je me demande un instant ce qu'elle peut lire sur mon visage. De la colère, ça j'en suis sûr. De la peine aussi ? Je ne l'espère pas, je ne veux pas lui faire ce plaisir. Mes yeux noirs cachés derrière mes lunettes ne la lâche pas une seule seconde. De son côté, Holly semble beaucoup moins stoïque qu'hier. Des cernes se dessinent sous ses yeux d'habitude si lumineux. Elle refuse toujours d'affronter mon regard mais je la trouve un peu abattue, avec ses épaules courbées et son teint presque pâle. Un peu de la colère qui bouillait dans mes veines se volatilise sans que je ne puisse la retenir.

-Qu'est-ce qui se passe Holly ? insisté-je. Parle-moi.

-Je... je ne peux pas continuer. J'ai trop de travail et je... euh... je n'ai plus le temps de...

-C'est un mensonge et tu le sais aussi bien que moi. Dis-moi la vérité ! C'est moi ? Je suis trop étouffant ? 3 séances par semaine, c'est trop pour toi ? On peut réduire le nombre de séances, on peut même se voir ailleurs que chez toi si c'est ce qui te dérange ! On peut... je sais pas, on peut trouver une solution mais il faut d'abord que tu me dises quel est le problème.

-Je ne peux pas Louis, c'est tout. Je ne peux pas.

-C'est trop facile ça Holly ! m'énervé-je sans parvenir à maitriser le ton de ma voix. Tu ne peux pas me proposer de m'aider pour me laisser tomber un mois et demi après ! Je ne t'avais rien demandé, moi ! Et maintenant que je commence enfin à avancer, tu te débines ?

HollyciousOù les histoires vivent. Découvrez maintenant