Chapitre 28

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Je suis épuisé. Physiquement et moralement épuisé. Ces dernières semaines ont eu raison de mon énergie. Je me laisse choir sur mon canapé pour profiter d'une minuscule pause dans mon emploi du temps. J'ai de la farine plein les cheveux et les verres de mes lunettes sont recouverts d'aspérités mais je m'en fiche, j'ai juste besoin de souffler quelques instants.

Ce matin, je me suis levé à quatre heures pour m'avancer dans toutes les préparations sucrées du tea time. Mila m'a rejoint dans la cuisine du pub vers dix heures, les cheveux en pétard et les yeux encore mi-clos. Elle a déjeuné en me regardant jongler avec des fonds de tarte à garnir, des insert à démouler et des blancs à monter en neige. Elle a ensuite sauté sur les clés de la boite aux lettres pour vérifier si j'avais reçu un courrier de l'émission. Elle attend avec tellement d'impatience de savoir quand cette grande aventure démarrera ! Elle n'a pas eu besoin de me dire que la fameuse lettre n'était pas encore arrivée, son visage déçu a parlé pour elle.

En fin de matinée, les desserts étaient tous prêts. J'ai filé en salle pour donner un coup de main à Abbi. Nous avons enchainé les pintes, les sandwichs et les tables à débarrasser. Ma patronne a passé son temps à râler sur l'agence d'emploi qu'elle a contactée. Elle n'a pas tort, en presque deux mois, ils n'ont pas été fichus de nous proposer un seul candidat potable. Selon eux, le fait que Kinvara soit enclavée autour du golf de l'Atlantique n'est pas un atout. A croire que les serveurs possédant quelques compétences culinaires et recherchant un emploi à durée indéterminée ne courent pas les rues. Bref, toujours est-il que je me retrouve désormais submergé de travail et que je n'arrive plus à sortir de cette cuisine.

Mes journées commencent de plus en plus tôt et terminent de plus en plus tard. Mila fait maintenant ses devoirs dans un petit coin de la salle, la plupart du temps avec Ariane, pendant que je pâtisse, encore et toujours. Mes weekends se retrouvent grignotés par l'ampleur des préparations à confectionner pour le teatime. Heureusement, le dimanche et le lundi, le pub n'est pas ouvert. Hier soir, alors que nous fermions le pub à presque minuit - ce qui n'est pas inhabituel pour un vendredi - Abbi m'a demandé si je tenais le choc.

-Honnêtement ? Ça commence à être vraiment difficile. J'ai de moins en moins de temps pour voir Mila et Holly.

-Je sais, a-t-elle soupiré, défaitiste. Bon, le prochain candidat que m'envoie l'agence, je l'embauche, tant pis s'il n'est pas parfait !

-Non, non, ne vous forcez pas à prendre n'importe qui, sous prétexte qu'on a besoin de bras.

-Tu vas bientôt t'absenter durant plusieurs semaines Louis, il faut bien que je trouve une solution.

-Je sais mais...

-De toute façon, mon cousin Cahal a déjà accepté de te remplacer pendant que tu seras à la télé. Il ne me reste plus qu'à dégoter un petit serveur et on sera tranquille.

Quand j'ai parlé du concours télévisé à Abbi, elle était surprise mais elle s'est montrée très encourageante. Elle m'a tout de suite rassuré, m'assurant qu'elle trouverait vite quelqu'un pour cuisiner pendant mon absence.

Avec à peine quatre heures de sommeil dans les jambes, je tiens à peine debout. Il est seulement treize heures mais je m'accorde une petite sieste, juste de quoi me requinquer avant d'affronter le service sucré de l'après-mid. Une heure plus tard, je suis déjà à pied d'oeuvre pour accueillir les premiers fans de gâteaux. Le samedi, les clients arrivent de plus en plus tôt et sont de plus en plus nombreux. Nous servons plus de quatre-vingt palais avisés ! Abbi est ravie, les caisses du pub ne se sont jamais aussi bien portées.

Deux heures plus tard, le teatime bat son plein mais mon adorable patronne a eu la gentillesse de faire appel à des bras musclés pour me seconder. Je peux donc tirer ma révérence et retrouver la quiétude de mon appartement. Enfin, c'est vite dit.

HollyciousOù les histoires vivent. Découvrez maintenant