Nous sommes rentrés chez nous en fin de matinée. Mila a de nouveau été auscultée ce matin et nous avons été libérés assez rapidement. J'ai passé la nuit assis sur un vieux fauteuil en cuir, sans pouvoir fermer l'oeil une seule seconde. Déjà, parce que même si ma fille m'assurait qu'à part une belle migraine et des douleurs à la jambe, elle ne se sentait pas mal, j'avais besoin de l'entendre dormir paisiblement pour chasser les derniers résidus d'angoisse. Ensuite, à cause de la valse des infirmières qui passaient prendre de ses nouvelles toutes les heures. Et peut-être aussi à cause de ce magnifique souvenir qui tournait en boucle dans ma tête. La sensation des lèvres d'Holly contre les miennes, la douceur de son baiser, les adorables couleurs sur son visage quand je me suis doucement éloigné. Quand Mila a fini par trouver le sommeil, j'ai appuyé mon menton contre la paume de ma main et je me suis perdu dans mes pensées. Je me suis remémoré la soirée que j'avais partagée avec Holly, nos confidences et nos rires; sa patience lors de nos séances et sa façon discrète de graviter autour de moi. J'ai repensé à sa sollicitude des premiers temps et à ses réticences du mois de décembre. Je me suis demandé si je n'avais pas fait n'importe quoi en l'embrassant mais j'ai vite envoyé bouler ce doute.
La manière dont ses lèvres ont caressé les miennes n'était pas feinte. Elle a partagé mon envie, a succombé à notre complicité. Alors j'ai souri, toute la nuit, comme un enfant. J'ai veillé ma fille et j'ai rêvé de lendemains heureux.
Abbi a fermé le pub ce matin pour venir nous chercher et me permettre d'aller récupérer des anti douleurs à la pharmacie. Ma patronne m'a ordonné de rester auprès de ma fille jusqu'à lundi, jour où elle refoulera le chemin de l'école. Dès son réveil, Mila avait déjà retrouvé sa jovialité mais les cernes creusés sous ses cils ne m'ont pas trompée. Il a suffi qu'Abbi nous ramène à la maison pour qu'elle s'enfouisse sous les draps. Les médecins m'ont bien rappelé les signes à surveiller suite à une commotion cérébrale et elle n'en présente aucun. Mais je reste sur mes gardes. Je me suis donc allongé à côté d'elle après avoir avalé un reste de pâtes à la sauce tomate. Le silence de sa chambre n'est perturbé que par ses respirations paisibles. Alors, doucement, je glisse moi aussi vers un sommeil peuplé d'yeux bleus et de petites filles aux cheveux noirs.
Quelques coups portés contre le bois de ma porte me sortent de mes songes. Je me relève doucement et m'avance vers l'entrée sur la pointe des pieds. Le visage soucieux d'Abbi se dessine dans l'embrasure de la porte. Elle porte dans ses mains un plat de service que j'utilise au pub. Celui-ci est recouvert d'un linge blanc.
-Tu dormais ? s'enquière ma patronne en chuchotant.
-Oui, je... je me suis assoupi un moment, soufflé-je d'une voix encore ensommeillée.
Je me frotte la nuque en réprimant un bâillement. Mes lunettes sont de travers, je les replace rapidement. A tous les coups, je dois avoir les cheveux dans tous les sens et la marque de l'oreille contre la joue.
-Comment va la petite ?
Je me décale pour inciter Abbi à entrer.
-Bien, je crois. Elle s'est endormie dès qu'on est arrivés.
-Elle n'a rien mangé ?
-Non, elle n'avait pas faim.
-Ce n'est pas bien ça, Louis. Il faut qu'elle se remplume.
-Le médecin m'a dit de ne pas la forcer. Elle peut se sentir nauséeuse pendant encore quarante-huit heures mais tout devrait rentrer dans l'ordre après.
Abbi fait la moue, l'air de dire qu'elle préfèrerait gaver ma fille pour s'assurer qu'elle reprenne des forces. Je me dirige vers la cuisine pour faire chauffer un peu d'eau.
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Hollycious
RomanceJeune père célibataire, Louis n'a jamais eu une vie facile. Il a choisi l'authenticité de l'Irlande pour offrir un bel avenir à sa fille. Mais il se bat tous les jours pour cacher le secret qui le mine depuis l'enfance. Jusqu'à cette rencontre, une...