Chapitre 5 - Petite sœur

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{ Les temps ont changé
Demain tout ira mieux, tu verras...
}


Il n'eut pas le temps de répondre qu'elle partit déjà d'un pas bien décidé. Ne réalisant pas assez vite, il la perdit.

Quelques semaines passèrent, bientôt décembre arrivait. On commençait déjà à voir les premiers touristes prêts à passer les fêtes près des côtes riches. A Puget, les terrasses vides laissaient place aux cafés encombrés de multilingues pétés de thunes. Les vieux quartiers servaient de bêtes de foire aux nouvelles luxures qui les entouraient. Posés à la sortie d'un lycée, le groupe d'encapuchonnés regardait défiler les passants sortis du centre en lançant quelques blagues houleuses lourdingues aux mieux habillés.

- Putain on se caille sec là, on se bouge ? Lança l'un des gars.

- Vas-y on attend Fab et Deen au moins, ils finissaient à 17.

- Rllaaah, mâtes-ça mec !

Il en suffisait de peu pour relancer les vieilles idées reçues sur les mecs de cités dans la bouche de quelques passants ridés. Les odeurs de spliff se mêlaient à la buée dans l'air ; en fin de journée en décembre, même dans le sud il caillait ! Sonnerie retentissante au loin, et quelques minutes après, deux gars s'approchaient.

- Wesh les frères, bien ? Disait Papy en s'affalant sur la grille, tout juste vanné par sa studieuse journée.

- Yo Papy, chaud ouais, mais sa mère il pèle là, on se bouge chez oit ?

- Vas-y chaud.

Mollement, les jeunes finissèrent par se lever pour rejoindre les quartiers. Ils déambulèrent dans les rues de la ville, se dirigeant vers Toulon nord. Sur la route, la fumée des spliff laissait l'empreinte de leur passage.
Arrivés dans les quartiers, ils se posèrent en attendant le début d'avant-minuit.

Un bruit éloquent interrompit la soirée dans l'aquarium ; après quelques secondes sans réaction, à regarder l'appareil vibrant sur la table qui raisonnait dans les bouteilles posées à côté, une des casquettes se releva brutalement en attrapant le téléphone pour décrocher.

- Henna, il est tard, tout va bien ?

- Oh oui oui oui, ça va ! Non ne t'inquiète pas, je suis rentrée tard, j'étais chez Myriam tu sais, et j'ai vu ta petite de la dernière fois, tu sais ?  Elle remontait les escaliers. Ça faisait longtemps que je ne l'avais pas vue dans le coin ! Mais elle n'avait pas l'air bien du tout, elle avait la capuche sur la tête et elle montait les marches la tête baissée. Je crois qu'elle a eu un accident tu sais, parce qu'elle ne marchait pas très bien ! Et p

Le corps de Deen se raidit soudainement ; son sang ne fit qu'un tour. L'atmosphère de la pièce se chargea de particules lourdes qui se fracassèrent en un coup sur lui ; son souffle se coupa.

- tu vois, vu que tu avais l'air de bien l'aimer, je préférais te le dire !

- J'arrive henna.

- Quoi ? Maintenant ? Non mais att

Sans plus tarder, le jeune homme se leva brusquement, attrapa sa veste et entreprit de partir.

- Wesh Deen tu vas où là ?

- Y a un soucis chez la grand-mère à Marseille, je vais chopper le dernier train j'y vais là. On se voit plus tard vas-y.

Un dernier check aux invités et il partit de l'habitacle. Il se pressa de se diriger vers la gare. Sa montre indiquait 22:48. Il fallait se bouger pour rejoindre le dernier train de Blancarde avant 23:00. Dans la précipitation, il se répétait les mots de sa grand-mère : ''ça faisait longtemps que je ne l'avais pas vue'', elle qui était toujours dehors... ''Je crois qu'elle a eu un accident'', ''elle ne marchait pas très bien''. Le jeune homme accélérait le pas. ''Elle n'avait pas l'air bien du tout''. Les battements de son cœur devenaient frénétiques. C'était une vraie inquiétude sur son visage. Qu'est-ce qu'il avait bien pu se passer ?
Arrivé à Blancarde dans la précipitation, il se pressa d'entrer dans le train avant qu'il ne démarre. Sans trop de discrétion, un regard lancé vers les rares passagers, il condamna les toilettes et s'y réfugia le temps du court trajet. S'en suit ensuite un nouveau trajet sur les rails jusqu'à l'Estaque, le plus proche du quartier, il faudra faire le reste à pieds. Sur le bout de chemin restant, dans la nuit presque noire et bien froide en ce mois de décembre, la pression continua de monter dans la cage thoracique du jeune homme ; il s'était gardé dans un coin de tête le départ précipité de la jeune Lunah quelques semaines plus tôt. Elle avait déjà des ecchymoses dans le cou le jour où il l'avait vue. Il n'avait pas pu lui faire cracher le morceau. Ce soir, la pression était vite montée quant il eut su qu'elle était à nouveau là, pour sûr il ne laisserait pas passer la même chose.

Tout commence à l'Iris 𑁋 Deen BurbigoOù les histoires vivent. Découvrez maintenant