Le noir, le vide, les ténèbres m'entourent. Cette noirceur me colle à la peau, envahit ma tête, encercle mon corps entier. Tout n'est qu'obscurité.
J'ai froid. Des centaines de petits pics s'infiltrent sous ma chair jusqu'à mes os, parcourent mes veines, envahissent mon cœur. Les frissons ne s'emparent pas de moi, je ne sens pas mes poils se hérisser.
Aucune lumière, aucun souffle, aucun bruit. Je ne vois rien, je ne sens rien, je n'entends rien. La peur me monopolise comme une main géante resserrant son étreinte pour m'écraser. Je suffoque, je n'arrive plus à respirer, j'étouffe. Je veux me souvenir, je m'efforce de chercher dans ma mémoire ce que je fais là. Mais il n'y a rien. Je veux pleurer, mais aucune larme ne coule, je veux crier, mais aucun son ne sort. Il n'y a que moi, moi et ce noir omniprésent.
Je dois réagir, je scrute les ténèbres, je tends l'oreille, mais il n'y a rien. Je tape du poing, frappe des pieds, mais je ne touche rien. Je cogne, encore plus fort. Je sens mes muscles s'étirer à chaque coup, attendre le moment où ils rencontreront un obstacle. Mais ils ne touchent rien. Je cours, vite, plus vite. Je ne rencontre pas le sol, je ne touche que le néant, mes foulées ne provoquent aucun écho. Il n'y a pas de murs, pas de porte, pas d'issue. Tout est sombre, mais je poursuis ma course désespérée, attendant d'être éreintée, en vain. La fatigue ne se fait pas sentir. Je m'effondre, mon poids retenu par l'obscurité.
Je dois crier, il le faut, je réunis toutes mes forces, tout ce qu'il me reste de courage. Mes poumons se gonflent d'air, mes lèvres s'entrouvrent, mais rien ne sort. Je ferme les yeux, me concentre sur ma détresse. C'est un cauchemar ? C'est un cauchemar ! Oui c'est un cauchemar ! Je dois me réveiller, il le faut !
Je crie dans ma tête, je crie aussi fort que je le peux, je crie jusqu'à ce que les échos reviennent me percuter. Le constat est là, je ne rêve pas. Ce n'est pas un cauchemar, je suis captive du néant, enfermée dans un espace désert sans fin, sans couleur, sans échappatoire, sans souffle, sans bruit, sans rien à toucher.
Je fouille dans ma mémoire, je creuse dans chaque recoin de mon cerveau avec acharnement. Je prends ma tête dans mes mains, rassemble mes pensées, j'explore chaque parcelle de mon esprit, je dois trouver, je cherche encore et encore. Des réminiscences apparaissent enfin, des images qui s'entrechoquent, se succèdent à toute allure, sans logique. Je les assimile du mieux que je le peux, tente de les ordonner, de les classer. Je ne comprends pas, tout va trop vite, défile à un rythme effréné.
Je dois me calmer, baisser mon rythme cardiaque, retrouver une respiration paisible. Je souffle un grand coup, replie mes jambes sur ma poitrine, enroule mes bras autour, pose mon front dessus. Je vais trouver une explication à tout ceci. Les battements de mon cœur ralentissent, je respire doucement.
Tout va s'arranger.
J'entends un bruit lointain, feutré, comme entouré de brume. Je relève les yeux. Combien de temps suis-je restée la tête cachée dans mes bras ? J'observe ce qui m'entoure, mais je me heurte à cette obscurité. Je prends une grande bouffée d'air, cet air inconnu, sans odeur, sans souffle, sans chaleur et la rejette aussi vite. Je recommence, trois fois.
Je me redresse, me dirige lentement vers ce minuscule espoir de trouver quelqu'un. Je veux prévenir que je suis là, mais je ne peux pas, les sons restent enfouis au creux de moi. Je m'approche avec précaution au milieu de cette nuit épaisse. Le bruit se précise, devient plus limpide, se transforme en chuchotement qui s'amplifie à chacun de mes pas.
Les chuchotements deviennent des mots, des mots prononcés difficilement, saccadés. Je ne les comprends pas. J'avance encore, j'aperçois une faible lumière. Mes yeux se ferment par réflexe, ils sont restés trop longtemps dans le noir.
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Au-delà des souvenirs
RomanceSuite à la perte brutale de ses parents dans un terrible accident de voiture, Alice voit sa vie basculer dans le néant. Elle laisse sa peine de côté pour soutenir sa sœur et ses proches, sans qui elle ne serait déjà plus là. Elle se raccroche aux so...