Tome 1 Nirci Les marqués

Prologue

Pour trouver la vraie raison, il est préférable de chercher au bon endroit la réponse à nos questions. Mais... est-ce que je peux trouver un seul petit indice sur moi, mon passé ou même les étranges choses qui se passent autour de ma sœur jumelle et moi?

Bien sûr que non... la réponse n'apparaît jamais par magie. Il faut la trouver. Et en payer le prix.

C'est ce que mon père m'a toujours répété.

† † †

À l'âge de quatre ans... alors que ma sœur et moi passions la journée chez nos grands-parents paternels... comme lorsque nos parents étaient trop occupés pour nous garder... on nous avait appris la disparition de ceux-ci... sans le moindre indice... sans la moindre manière de les retrouver...

Plus rien pour nous attacher à la vie.

Il me semblait pourtant que s'était une journée comme les autres... rien ne m'avait alerté malgré ma naïveté d'enfant... malgré mon insouciance... mon innocence.

Jusqu'à ce que nous apprenions la nouvelle de leurs morts.

Et pourtant... quelques jours après cette annonce... alors qu'Aya et moi jouions dans la forêt à l'arrière de chez nos grands-parents... nous avions découvert les corps de nos parents... à moitié enfouis dans la terre... laissant leur torse... et leur visage ensanglanté à découvert, la peau arrachée comme la pelure d'une pomme à moitié épluchée... comme la déchirure effilochée d'une écorce trop molle... comme toutes choses fragiles qui se brisent au moindre contacte turbulent.

Le pire, au départ... au loin... nous ne savions pas que c'étaient des humains... des corps faites d'os, de sang et de chair... comme moi... comme nous tous... et en nous rapprochant... nous avions mis quelques minutes avant de les reconnaître.

Leurs cadavres étaient presque méconnaissables...

Je m'étais figée devant leurs corps malmenés qui commençaient à grouiller de larve, d'insectes et de pourriture. L'odeur était écœurante et leurs visages défigurés, suintant de sang, en étaient tout autant.

Aya était partie à courir, criant et pleurant tellement qu'elle suffoquait presque à chaque respiration. Elle s'élançait vers la vieille maison de nos grands-parents.

Moi, j'étais restée là. Malgré ma peur. Malgré mon dégoût. Malgré l'envie d'imiter Aya... et de me réfugier auprès de mes grands-parents. Je suis restée là. Le corps entier figé d'horreur et de terreur.

Je venais enfin de comprendre le sens des mots de mon père.

La vérité, les réponses... font toujours mal... bien plus que l'on veut l'admettre.

† † †

La police et les enquêteurs sont vite arrivés et ils posèrent des tas de questions à notre grand-père.

Comme s'il savait vraiment ce qui se passait. Qu'aurait-il pu savoir de plus que ce que les enquêteurs pouvaient connaître?

Pour ça... je ne comprenais rien... même si à cette âge-là, contrairement à la grande majorité des petites mouflettes, j'étais une fillette curieuse et insensible aux ordres des autorités... surtout de ma famille... je m'étais donc cachées pour écouter, alors qu'Aya pleurait à l'intérieur, dans les bras maigrelets de mamie.

Mon rêve était de devenir comme mon père, une grande détective... je l'admirais tout en gardant mes distances. Je lui posais parfois des questions sur son travail, mais il ne me répondait jamais, évidemment, préférant me dire, qu'à quatre ans, j'étais beaucoup trop jeune pour ce genre de choses... et têtu comme j'étais, je fouinais dans son bureau lorsque grand-maman venait nous garder à la maison. Malheureusement pour moi, je me faisais toujours prendre et gronder par mamie.

Jamais plus je ne pourrais embêter papa...

† † †

Huit ans plus tard, alors que ma sœur et moi étions à l'école, nos grands-parents furent assassinés... Mais comme pour nos parents... la police et les enquêteurs ne trouvèrent rien d'autre que les corps. Le seul indice... qui ne leur aidait dans aucune des deux enquêtes... était un étrange symbole laissé par les marques de plaie béant et dégoulinante de sang sur le corps des victimes.

La seule chose qu'ils pouvaient en déduire... c'était que l'assassin était fort probablement le même dans les deux cas... et il y avait une forte possibilité qu'un jour... celui-ci s'en prenne à Aya et moi.

Aya avait la trouille... moi... je tentais déjà de chercher un moyen de suivre la trace du meurtrier.

Même si j'avais seulement douze ans.

† † †

La police, avec l'autorisation du gouvernement, décidait que nous logerions avec un couple de la police locale.

C'est comme ça que... ma sœur et moi... nous nous retrouvions avec une autre famille... qui croyait vraiment pouvoir nous protéger...