Douce Vengeance ( Tome 3 )

Chapitre 30

|| Chapitre 30 ||

Battlefield - SVRCINA

Cela faisait déjà un bon quart d'heure que le groupe fouillait les carcasses des maisons à la recherche de survivants ou de la combattante de l'équipe 4, en vain. Il n'y avait pas âme qui vive. Le village des gardians était méconnaissable. C'était comme si cet endroit avait été déserté il y a de cela plusieurs années. Seuls des corps sans vie les accueillirent, entre les cendres imbibées de leur propre sang. Au début, le gris avait failli rendre le contenu de son estomac en voyant les corps déchiquetés et carbonisés des gens de son village. C'est avec une certaine culpabilité que le jeune homme se surprit à ressentir une sorte de soulagement de ne pas voir de visages familiers parmi les défunts. D'un côté, cela lui donnait encore une once d'espoir de retrouver ses proches en vie. Mais de l'autre, ne retrouver aucun survivant après un lapse de temps aussi vaste n'était de loin pas très encourageant. Chaque seconde comptait. Chaque seconde pouvait potentiellement rapprocher un innocent vers la mort. Et cette pensée n'arrangeait en rien l'état d'esprit des troupes.

Tiago donna un coup de pied dans un débris qui avait eu le malheur de se trouver au mauvais endroit au mauvais moment. Il venait de sortir d'une maison en ruine, Alana sur les talons, et sans l'ombre d'un survivant. Sa gorge déjà nouée lui brulait, irritée par le mélange de bois carbonisé et de cendres qu'il inhalait contre son gré. Ses yeux lui piquaient à cause de la poussière accumulée sous ces toits alors que la suie tachait les verres de ses lunettes. Le gris se retourna brièvement, attendant sa coéquipière qui époussetait ses vêtements puis, ensemble, le duo rejoignit le reste du groupe qui s'était rassemblé afin de faire le point sur la situation. Ils étaient apparemment les derniers à venir, car tous les regards de leurs camarades s'étaient tournés vers eux avec l'espoir de les trouver accompagnés.

« -Toujours rien ? demanda le chef en les voyant revenir sans l'ombre d'un villageois.

-Rien mon commandant, répondit Tiago d'une voix neutre et dénuée de sentiments.

-Bon, nous allons donc passer à la vitesse supérieure, annonça le plus haut gradé à l'égard de ses hommes. Je doute que nous ne trouvions de survivants dans cette zone, alors nous ferions mieux d'accélérer le pas te rejoindre le centre au plus vite. Restez vigilent. »

Au même instant, un hurlement déchirant raisonna en écho dans les ruelles vides. Un hurlement féminin à glacer le sang, suivi par un rugissement bien plus rauque que personne n'eut du mal à définir comme celui d'un Noctis.

« -C'est elle, s'exclama une fille qui avait reconnu le cri de son amie. C'est Linda. Il faut aller l'aider !

-Elle doit s'être caché dans la réserve du village, analysa Tiago en retraçant mentalement les chemins pour y parvenir. Il y a des soins et une radio de secours là-bas. Je connais un raccourci pour y aller.

-Suivez-le ! »

Ni une, ni deux, ils s'élancèrent rapidement à la suite de l'archer, à la recherche de la source du bruit, dérivant de plus en plus de la zone qui leur était attribuée. Et cela, Tiago Evans l'avait bien compris. Très bien, même. Avoir vécu une bonne partie de son enfance dans les lieux d'opérations comportant des aspects aussi bien positif que négatif. Positif car sans cela, jamais une personne déambulant sur ces terres parfaitement inconnues n'aurait su que la brèche discrète dans ce buisson épineux mènerait plus vite à la réserve. Et négatif car, justement, connaitre ce lieu comme sa poche s'avérait être source de mauvaises tentations ; Alors qu'il aidait ses coéquipiers à passer sous ce tas de végétation, Tiago se trouvait en proie à une hésitation lourde de conséquences. En déviant ainsi de leur zone, le groupe s'était drastiquement rapproché de la partie du village ou le jeune homme avait passé le plus de temps. Il ne pouvait pas ignorer cela, tout comme il ne pouvait pas ignorer les ordres de ces supérieurs. Pesant les pour ou les contres, l'archer finit par prendre sa décision à l'instant même où sa propre coéquipière s'apprêtait à traverser la brèche, dernière du groupe. Or, elle n'en fit rien.

« -Après toi, Alana, la pressa subtilement le jeune homme.

-Oublie, coupa la maitre du feu en croisant ses bras sous sa poitrine. Je ne te fais pas confiance, je sens que tu manigances quelque chose, Tiago Evans !

-Je ne serais pas long, dit-il sachant que nier ne lui ferait que perdre plus de temps encore. J'ai indiqué la fin du chemin aux autres, ils savent où se diriger. Je vous rejoindrais avant que mon absence ne soit remarquée. »

Chose dite, Tiago détacha son arc de sa ceinture et commença à s'éloigner. Il ne jeta pas l'ombre d'un regard vers Alana dont il sentait le regard lourd de reproches sur son dos.

« -Mais tu es fou ou quoi ? pesta-t-elle d'une voix montant dans les aigues. Les autres sont par là-bas. On ne doit pas se séparer du groupe !

-Les Noctis ne feront qu'une bouchée d'un petit rigolo de ton genre, se moqua Laur, le Rubix d'Alana restée silencieuse jusqu'à présent.

-il ne me semble pas t'avoir demandé de me suivre, rappela le gris qui se retourna non sans arrêter de marcher. Il est encore temps pour vous de rejoindre les autres, Alana. »

Il vit une lueur de défi s'allumer dans les yeux du maître du feu. Un sourire espiègle prit place sur son visage alors qu'elle posa ses mains sur ses hanches.

« -Et puis quoi encore ? il faut bien que quelqu'un te surveille, plaisanta la brune en marchant à la suite de son coéquipier. Je ne suis pas sure qu'elle appréciera retrouver un Tiago en pièces détachées. »

Le gris fit mine d'ignorer cette dernière pique rajoutée d'une voix faussement plus basse. Il ne releva pas non plus le fait qu'elle venait d'évoquer à nouveau cette maudite Anastasia et se contenta de rouler silencieusement des yeux. Et pour ne plus avoir à entendre la pie caqueter, l'archer se mit à courir forçant ainsi l'autre à fermer son bec et à en faire de même pour ne pas se faire distancer.

« -Eh mais on va ou comme ça, enfaite ? demanda-t-elle après l'avoir suivi aveuglement s'enfoncer en zone inconnue. »

Elle n'obtint aucune réponse de la part du jeune homme. Elle hésita à renouveler sa demande, mais quand elle vit l'air grave et sombre qu'abordait le jeune homme, elle préféra se taire.

Quelques minutes plus tard, Tiago s'arrêta soudainement au milieu du passage et Alana faillit lui rentrer dedans. Ils se trouvaient dans une rue entourée de maisons qui n'étaient pas autant endommagées que les précédentes. Cette partie du village semblait avoir été un peu plus épargnée que le reste. Cette réflexion faite, la jeune femme ne put s'empêcher de le dire à haute voix. Et voyant qu'il ne réagissait toujours pas, Alana tenta de poser sa question une seconde fois.

« -eh oh, on fait quoi ici ? »

Elle vit un sourire nostalgique passer sur le visage du gris alors qu'il prit une grande inspiration, comme pour se donner du courage. Il avança de quelques pas et poussa d'une main presque tremblante l'un portail de bois, d'une couleur vert pastel, dont les verrous grincèrent.

« -Bienvenue chez moi, Alana. »

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