- Comment tu vas, ma chérie ?
Maman dépose un baiser dans mes cheveux et me sourit avec tendresse. Sa main caressa mes cheveux blonds. Je me sens plus apaisée grâce à ce simple geste.
- Bien et toi maman ?
- Bien. Même si le chien des voisins aboie toute la nuit. Une vraie plaie mais pas étonnant quand on le laisse dehors toute la nuit. Pauvre bête.
Elle s'assoit sur la chaise à coté de moi puis entreprends de ranger toute la nourriture qu'elle m'a amené. Je ne peux pas mourir de faim avec elle. Je le regarde attentivement. On se ressemble elle et moi. Extrêmement fort. On nous le répète souvent. Les mêmes cheveux blonds, le même nez, les mêmes yeux. Je suis juste plus grande qu'elle de presque dix centimètres. Mon caractère vient de mon père.
- Tu dors au moins ? me demande-t-elle inquiète en voyant que je ne bouge pas.
Je la rassure du mieux que je peux et accepte même de croquer dans une pomme pour lui faire plaisir.
- Tu as été au kiné aujourd'hui ?
J'acquiesce, c'est la même routine. Une fois qu'elle sera partie, j'irai voir mon inconnu. Je vais le voir tous les jours depuis une semaine. Personne ne le sait. Enfin, je ne pense pas. J'essaie d'être la plus discrète possible.
- Tu as mal quelque part ?
J'arrête de grimacer et secoue la tête. Si je dis oui, s'en est fini pour moi. Elle va appeler une infirmière, la tanner jusqu'à ce qu'on me donne des anti-douleurs et qu'on me fasse faire des scanners. Elle a peur constamment. J'ai mal au cœur pour elle. J'aimerais qu'elle arrête de s'inquiéter.
- Tu as vu Dylan ?
Dylan est son petit-ami depuis un an. Je l'ai rencontré pour la première fois il y a presque dix mois. Il vient souvent à la maison manger chinois avec nous. Il est vraiment cool comme homme. Ma mère l'aime beaucoup et est heureuse avec lui. C'est le principal. Je lui souhaite le meilleur.
- Pas dernièrement.
Elle me sourit, essayant de me cacher un secret. Elle se remet à caresser mes cheveux. J'arrête son geste en repoussant sa main. Je fronce les sourcils.
- Pourquoi ?
- Je n'ai pas le temps, chérie. Entre le boulot et l'hôpital, je n'ai pas de temps pour lui. Il comprend, tu sais. Et il veut nous laisser en famille toutes les deux.
Je vois très bien qu'elle est peinée de cette situation, même si elle s'efforce pour ne pas me le montrer. Je lis en elle comme dans un livre ouvert.
- Maman, tu n'es pas obligée de venir me voir tous les jours. Je vais bien, je suis jamais seule et on s'occupe très bien de moi. Prends le temps pour toi et Dylan. Je vais mieux. Vraiment.
Ma mère s'apprête à contester mais je l'interromps déjà.
- S'il te plait, maman.
Elle me promet qu'elle va faire un effort. Elle me présente plusieurs prospectus de quelques universités du pays. Je fais semblant de m'y intéresser, jusqu'à ce qu'elle parte. Elle dépose un baiser sur mon front et disparait.
Je m'empresse de me jeter sur mon fauteuil roulant pour aller voir mon inconnu. Rien ne change. Je vois juste qu'il est sur le coté, au lieu d'être sur le dos. Surement à cause des escarres. J'en ai entendu parler dans un livre une fois, sur la tétraplégie. Je me demande si j'en ai eu.
Je reste à coté de lui, à regarder son visage comme d'habitude. Je le trouve toujours aussi beau. Si je l'avais croisé dans la rue il y a quelques mois, je me serais retournée pour le regarder. Pourtant, ce n'est pas mon style de garçon.
- Salut bel inconnu. C'est toujours Eden. J'ai pris un journal aujourd'hui. Je me suis dit qu'un peu de lecture te ferait du bien.
Je me mets à lire tranquillement, d'une voix posée. La météo ne m'a jamais semblé aussi intéressante. Je lis ce qui me semble important, évitant les sujets négatifs. Une fois ma lecture terminée, je me rends compte à quel point il fait noir. Je vais louper mon rendez-vous chez le psychologue.
- Je suis désolée d'écourter aussi brutalement. J'ai un rendez-vous et si je n'y vais pas, ce maudit docteur machin-chose va me faire la leçon. Je ne pense pas que tu le connaisses. C'est un psy un peu barjot. Il a des costumes de fées dans un malle. C'est hyper étrange tout ce que contient son bureau. Je vais te laisser. A demain, bel inconnu.
Je laisse mon journal sur sa table de chevet et rejoins le psychologue qui m'attend. En entrant dans son bureau, je remarque que je suis en retard de quinze minutes. Le docteur est déjà assis sur sa chaise, les jambes croisées.
- Bonjour Eden. Comment ça va ?
- Bien et vous ?
Je me mets face à lui et croise les bras. Il me sourit et boit une gorgée de son café. Il repose la tasse sur son bureau.
- Bien merci. Tu dors mieux ?
- Non.
En disant ça, je le regrette déjà. Il va me poser un milliards de questions. Sauf qu'il me surprend.
- Je vois. Tu vas chez le kiné mais tu ne marches toujours pas. C'est normal. Ca prend du temps. Surtout quand on a été trois mois dans le coma. Tu souhaites me parler de quelque chose en particulier ?
Je secoue la tête. Je n'ai rien à dire.
- Tu es très courageuse, Eden. Même si tu ne penses pas l'être. Tu es une fille qui a du cran et du courage. Tu réussiras si tu le veux. Seulement si tu le veux.
Je sais ce qu'il veut dire par là. Ma volonté de marcher.
- Pourquoi vous me retenez ici ? J'ai l'impression que je devrais déjà être sortie de cet hôpital.
J'aimerais retrouver ma chambre, mon lit, mon odeur. Mon chez-moi tout simplement. Ici, je suis dépaysée.
- Tu es dans une aile spéciale pour les adolescents et jeunes adultes. Tu n'es pas obligée de sortir. On te garde en attendant que tu ailles mieux psychologiquement. Si tu pars trop tôt, tu pourrais faire des bêtises. Ici, tu es dans l'hôpital, mais tu es libre. Tu peux aller dans tout le bâtiment si tu le souhaites. Tu peux même aller chez le glacier d'en face.
Je soupire et me mets à jouer avec une mèche de cheveux.
- Tu es fatiguée. Tu peux aller te reposer, Eden.
Je m'apprête à quitter la pièce mais il me retient.
- N'oublie pas. Ne perds jamais espoir. On est tous sauvés un jour.
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Ton âme dans la mienne
RomanceSuite à un accident, Eden a tout perdu. Son âme est déchirée en deux par la perte de son meilleur ami. Elle doit remonter la pente, apprendre à vivre sans lui et se réapproprier la vie. Le temps de se remettre de ses blessures, la jeune fille reste...