Chapitre 26

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- Tout a commencé quand j'ai découvert que ma copine me trompait avec mon cousin, Jace.

Je l'écoute avec attention, les lèvres pincées. Le jeune homme fixe le mur devant nous, remplis de mes photos. Je suis du genre à vouloir capturer chaque moment qui compte à mes yeux. J'ai d'ailleurs eu un magnifique appareil photo il y a trois ans.

- J'ai été anéanti. Elle ne sait pas que je sais. Je l'ai surprise chez elle, dans les bras de Jace. Ils s'embrassaient sur le lit. Je voulais lui faire une surprise alors je me suis fait le plus petit possible. On fêtait nos quatre ans ce jour là. Elle ne savait pas que je venais à l'improviste. Ce n'était pas mon style du tout. Je suis du genre à dire, je viens à telle heure. Je ne suis pas spontané. Tout le contraire de mon cousin. 

Ça me fait mal au cœur. Il y a de la rancœur en lui et c'est jamais bon. Il doit crever l'abcès. Qu'il me raconte tout ça, ça me fait plaisir surtout. Sa main, posée sur la couverture fine, attrape la mienne. Je le laisse faire, ressentant toujours les mêmes frissons et picotements agréables. Qu'est-ce qui se passe chez moi ? Je fixe nos mains liées.

- Je ne suis pas resté longtemps à les regarder. Je suis parti comme une flèche et j'ai repris la voiture. Il pleuvait fort et il y avait un vent de folie. J'ai glissé et ma voiture a chuté dans le lac. Il y avait énormément d'eau et je me suis éraflée quand je suis allé au fond de l'eau. Il y avait beaucoup de courant. Moi-même, je ne comprends pas pourquoi je n'ai pas réussi à sortir de l'eau. La suite, je me suis réveillé du coma. 

- Je suis désolée, Kiéran.

Je pose ma tête sur son épaule, attristée par ce qu'il a vécu. Ca l'a beaucoup affecté, je l'entends dans sa voix.

- C'est rien. Dormir m'a permis d'oublier un peu tout ça. Caroline est du passé désormais. Quand je la reverrai, je lui dirai ce que je pense. Je ne la tiens pas responsable de mon accident. Je me sens con d'avoir cru qu'elle m'aimait et que plus tard, on se marierait elle et moi.

Je presse sa main, voulant qu'il sache qu'il n'est pas tout seul. Je suis là pour lui, qu'importe le fait qu'on se connaisse peu. S'il a besoin de moi, il n'a qu'à m'appeler. Quand on est amis, on peut compter l'un sur l'autre normalement.

- Tu n'es pas con Kiéran. Tu as été aveuglé par l'amour. Tu l'aimais, c'est tout. C'est normal. C'est elle qui n'a pas su se rendre compte de la chance qu'elle avait d'être avec toi. Tu tomberas sur la bonne personne.

Un sourire vient enfin éclairer son visage. Il est bien plus beau quand il sourit, que quand il est triste ou quand il tire la tête. Voyant qu'il ne bouge pas, je laisse ma tête sur son épaule. Il ne se plaint pas encore qu'elle est lourde.

- Au sujet de tes cicatrices, commence-t-il doucement comme s'il a peur que je me rétracte. Tu n'as pas à avoir honte. Tu es magnifique même si tu en as.

- Tu vas me gêner Kiéran, je lui souffle en essayant de ne pas rougir.

- Mais non. Je te dis juste la vérité. Accepte toi comme tu es. Les cicatrices, c'est juste extérieure.

Je le regarde, presque admirative de ce qu'il dit. Même mon meilleur ami Jeremy ne m'aurait pas dit ça. Il m'aurait plutôt consolé en disant qu'elles allaient disparaitre avec le temps.

- Merci. J'aime bien ton honnêteté.

- Je peux en dire autant de toi. Je connais pratiquement tous tes secrets, me fait-il remarquer.

Je tape sur son épaule, faisant semblant d'être fâchée. Il recule et lève les mains en l'air, faisant son innocent.

- Pas tous heureusement pour moi.

J'ai attiré son attention mais je croise les bras. Jamais de la vie je raconterai ce que j'ai fait, étant enfant. Je suis encore mal à l'aise de toutes mes bêtises. 

- Raconte, insiste-t-il en s'approchant de moi.

Trop près. Tellement près que si je recule, je vais tomber du lit. Soudain, il m'attrape et je me retrouve dos à lui. Il se met à me chatouiller, il prend une voix très grave pour me dire de ne pas bouger. Je ris jusqu'à en avoir mal au ventre. A force de sourire, j'en ai mal à la mâchoire. Je me tortille contre lui, essayant de me défaire à sa prise mais il vient d'emmêler ses jambes aux miennes. Je ne peux que subir. Il fait attention à ne pas toucher mes blessures.

- Hé...,ma voix est entrecoupée tant je rigole. Lâche moi Kiéran. Je vais plus savoir respirer. Ahah.

- J'arrêterai pas tant que tu m'auras pas dit que je suis le plus beau !

Je repars dans un fou-rire, je ne sais pas m'en empêcher. Je tourne la tête et je vois qu'il est hilare, mais qu'il est sérieux à propos de ça.

- Certainement pas !

Je ne pensais pas être si chatouilleuse. Et pourtant, j'ai des zones tellement sensibles comme je bouge dans tous les sens. Il me fait un genre de "couic" sous les aisselles et je me laisse complètement aller contre son torse.

- Tu n'es pas le plus beau, je le nargue.

Je veux m'échapper du lit mais il me rattrape facilement

- Tu es un genre de petit serpent, me dit-il. Tu essaies toujours de t'échapper. Allez maintenant, dis le. Je sais que tu le penses.

Essoufflés tous les deux, nous arrêtons notre jeu. Je reprends ma respiration comme lui. Elles brisent le silence de la chambre.

- Tu es le plus beau mais tu vas prendre la grosse tête, c'est dommage. Tu ne sauras jamais mes histoires gênantes. Jamais.

Je regarde l'horloge accrochée au mur. Il est temps pour lui d'aller à son rendez-vous. J'aimerais qu'il reste mais ce serait vraiment égoïste.

- Il faut que tu y ailles.

Il soupire et ses bras me relâchent. Je me sens un peu "vide". Je saute hors de son lit et l'aide à s'asseoir dans sa chaise roulante. Je me sens utile en l'aidant. J'espère que lui n'est pas vexé. Je sais que des fois, quand on aide quelqu'un, il ne prend pas ça toujours bien.

- Tu veux que je vienne avec toi ? je lui propose.

- Non. Reste ici et repose toi encore un peu. J'en ai pas pour longtemps.

Je prends un livre que ma mère a pris de la maison et me couche dans mon lit. Dans ma chambre, j'ai une petite bibliothèque rempli qu'à moitié pour l'instant. Le reste de mes livres sont encore dans le bureau. Quand je rentrerai, je les déplacerai et je ferai un tri. Ce que je garde et ce que je donne. J'ai choisi un roman d'amour qui a l'air vraiment bien. C'est dans un univers hospitalier, pile dans le thème. Je me plonge rapidement dans ma lecture. Je lis et lis pendant ce qui me semble des heures avant de m'arrêter.

Je me suis reposée. Je vais aller un peu marcher. Je fais quelques pas sans béquilles. Je n'avance pas très vite mais ce n'est pas le principal. Je veux juste me dégourdir les jambes. Je prends l'ascenseur et descends à l'étage des bébés. Je sais que dans cet hôpital, nous pouvons les voir à travers la grande baie vitrée. J'arrive devant et me fige. Il y en a beaucoup, des tout tout petits et des plus grands. Des nouveau-nés qui ne disent rien ou qui braillent à pleins poumons en agitant leurs mains. Ils sont beaux. Beaucoup ne les trouvent pas beaux à la naissance car ils sont fripés et ils ont une drôle de tête. C'est vrai mais ils sont adorables malgré tout. Je n'ai jamais pris un bébé dans les bras. Ils ont l'air tellement fragiles. Ils ne peuvent s'exprimer qu'en pleurant.

Une puéricultrice entre dans la pièce avec un biberon et prend un bébé dans ses bras. Un petit garçon joufflu. Elle s'assoit dans le rocking chair et nourrit l'enfant. C'est beau car elle est patiente avec lui et douce. Il tète goulument en fermant les yeux.

Je pourrais rester des heures à les regarder. Un jour, j'aurais peut-être un petit frère ou une petite sœur. Ma mère est encore jeune et elle aimerait un bébé avec Dylan. Je sais qu'il n'a jamais eu l'occasion d'en avoir un avec sa précédente femme.

Et puis je pense à moi. Plus tard, j'aurais sans doute des enfants. Je ne sais pas. Je me sens encore trop jeune pour y penser. Certaines filles à mon âge se sentent prêtes à devenir maman. Pas moi. Je dois m'occuper de moi, encore grandir et mûrir. Un jour peut-être j'y penserai.

Ton âme dans la mienneOù les histoires vivent. Découvrez maintenant