J'entends soudainement des cris dans le couloir. Des gens qui courent et une machine qui s'affole. Mon cœur s'emballe à l'idée de savoir qui c'est. Je prie pour que ce ne soit pas mon inconnu. Pas lui. Je me relève et laisse mes béquilles sur le coté. J'essaie de marcher en m'appuyant sur les murs. J'avance dans le couloir, voyant d'où vient tous ces bruits. Mon sang ne fait qu'un tour en réalisant que tous les infirmiers rentrent dans la chambre de mon inconnu. Pas lui, pitié. Juste...pas lui.
- Ramenez le matériel ! Il s'enfonce !
Je m'empresse d'accélérer mais mes jambes sont faibles. Elles supportent difficilement mon poids. Une voix dans ma tête me crie de ne pas abandonner. Je dois le voir. M'assurer que ce n'est pas grave et qu'il ne va pas mourir.
Arrivée devant sa chambre, les larmes se mettent à couler sur mes joues pâles. Je remarque immédiatement le découragement des infirmiers, tout ce qu'ils font pour le sauver. La ligne verte qui ne bouge pas sur la machine. Je reste plantée là, terrorisée. Il est mort.
Mon infirmière préférée prend les palettes de réanimation. J'aimerais entrer mais une plus vieille infirmière me force à rester en retrait. Elle me tient par les épaules, me forçant à la regarder. Ses yeux sont glacials.
- Retourne dans ta chambre, Eden.
Je ne peux pas. Mes jambes ne fonctionnent pas. Je sens mon corps me lâcher et mes genoux heurtent le sol dans un bruit sourd.
- Bougez-vous ! Je le choque, hurle la femme.
Je ne peux détourner les yeux. Je vois le corps de mon inconnu se soulever après chaque choc. J'ai l'impression qu'il se passe une éternité.
- Allez, encore une fois. S'il te plait Kiéran. Fais un effort.
Je relève la tête pour regarder mon inconnu. Kiéran. C'est un prénom original. Mais je m'en doutais. Il n'a pas un prénom commun. Il est unique.
- Je vais t'aider à retourner dans ta chambre Eden, dit la femme devant moi qui s'est agenouillée. Eden ? Regarde moi. Respire calmement. Eden.
Je ne peux pas tourner la tête. Ma respiration est trop hachée. Soudain, la ligne verte reprend un rythme et j'entends distinctement les soupirs de soulagement de tout le monde dans la pièce. Le corps de Kiéran retombe brusquement sur le matelas. Son visage tourne dans ma direction et mon cœur rate un battement. Ses yeux sont grands ouverts dans ma direction et me fixent. Sans jamais les fermer. Des yeux d'un bleu magnifique. Mes larmes ne s'arrêtent pas et les sanglots cessent immédiatement sous la surprise. Je n'arrive plus à respirer. Je regarde l'infirmière qui remarque mon visage qui devient rouge. L'air ne passe pas.
Mes yeux se révulsent et je me sens tomber en arrière, ma tête heurtant le sol.
♦
- Est-ce qu'elle va se réveiller docteur ? C'est la deuxième fois qu'elle est dans cet état. Je ne peux plus supporter ça.
La voix de ma mère parvient presque à me sortir de mon sommeil, tant elle est inquiète. En si peu de mois, elle n'a jamais eu aussi peur de sa vie.
- Elle va se réveiller très bientôt. Ca ne fait que trois jours. Elle s'est cognée fortement la tête. Il faut qu'elle s'en remette intérieurement. Je vous promets de vous appeler dès qu'il y a du changement, soyez en sur.
- Merci docteur. Occupez-vous bien d'elle.
Je sens qu'elle embrasse mon front et puis son odeur disparait avec elle. Je me sens repartir dans un sommeil réparateur.
♦
J'aimerais ouvrir les yeux. Mais je suis coincée. Je connais cette situation pour l'avoir vécu le mois passé. Noel doit être passé maintenant. J'ai surement tout loupé.
Je navigue dans un rêve étrange. Ou je rencontre mon inconnu, Kiéran. Ou l'on se parle tous les deux pour la première fois. Sa voix est telle que je l'imaginais. Il est intelligent et discute d'un tas de sujets. Nous nous entendons bien. Nous mangeons ensemble, puis nous nous embrassons pour la première fois. Ca parait encore une fois réel. Mais ça ne l'est pas, malheureusement.
Mon esprit repart.
♦
- Regarde l'eau, je m'exclame en riant.
Je pointe du doigt les vagues qui touchent mes pieds. L'eau est tiède et salée. Idéal pour aller nager. Kiéran me sourit et s'approche de moi pour repousser ma mèche rebelle qui s'est échappée de ma tresse. Je tends la main pour tirer sur son nez, le taquinant. Il reste tout d'abord sérieux avant de sourire et m'attraper la taille. Il m'entraine dans la mer et me jette dedans alors que je me débats. On remonte à la surface ensemble, dégoulinant d'eau.
Kiéran tente de s'échapper en s'enfuyant vers la plage. Je cours après lui et l'enserre de mes bras. Il me laisse faire mais se retourne. Il ne me dépasse pas de beaucoup de centimètres, heureusement. Je suis attirée par ses lèvres. Je me penche et l'embrasse sur la commissure des lèvres. Je m'écarte, un sourire jusqu'aux oreilles. Lui en est pas loin.
On retourne sur la plage pour s'étendre sur le sable, allongés sur nos essuies.
- Tu as prévu de quoi manger ? me demande-t-il en fermant les yeux face au soleil.
Je me redresse pour tirer le panier vers nous.
- Bien-sur. J'ai aussi prévu l'alcool. Et tes fraises surtout avec du sucre.
- Merci mon amour.
Face à ce surnom tendre, je craque. Je me retourne et fonds sur lui pour l'embrasser cette fois-ci. Ma langue ne tarde pas à trouver la sienne pour entamer un ballet. Je l'embrasse comme jamais je n'ai embrassé quelqu'un. Tout ça, parce que je l'aime du plus profond de mon cœur.
- Je t'aime, je lui dis pour la première fois.
Je n'ai pas peur d'assumer mes sentiments. Je les ressens depuis longtemps maintenant. Je touche ses joues rasées. Il est toujours aussi beau. Je l'embrasse de nouveau avant de m'écarter. Je reste sur son torse à le contempler. Je remarque les larmes aux coins de ses yeux bleus. Je les essuie du bout des doigts.
- Moi aussi Eden.
Lentement, il s'efface devant mes yeux effarés. Il s'en va et je m'éloigne. Je finis par prendre une grande respiration et rouvrir les paupières sur ma chambre d'hôpital.
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Ton âme dans la mienne
RomanceSuite à un accident, Eden a tout perdu. Son âme est déchirée en deux par la perte de son meilleur ami. Elle doit remonter la pente, apprendre à vivre sans lui et se réapproprier la vie. Le temps de se remettre de ses blessures, la jeune fille reste...