Chapitre 23

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Complètement éreintée par la bataille, Hedda reposait sur un fauteuil qui ornait sa tente. À sa droite, Folki, le grand roux qui avait soigné les blessures aux côtes de la jeune femme lorsqu'elle avait rencontré les sangs gelés, finissait de panser sa blessure à la tête, qui était en réalité plus grave qu'Hedda aurait bien voulu admettre.

« Et voilà ! D'ici quelques jours, notre Louve Blanche sera totalement guérie. Je te recommande toutefois de prendre un peu de repos. » Finit-il par dire après avoir recousu sa plaie et l'avoir bandée. « Si tu pouvais éviter le champ de bataille, ce serait bien. Ta tête a besoin de calme. Tu risques d'avoir quelques douleurs et vertiges, surtout en cas d'effort. »

Hedda, dont les traits du visage étaient tendus, hocha la tête et l'homme comprit rapidement que l'heure était venue pour lui de se retirer devant le mutisme de la jeune femme. Il salua sa reine avant de se retirer et Vadir, qui attendait dans un coin de la tente, s'avança vers elle. Du sang maculait encore l'armure qu'il n'avait pas eu le temps de retirer, contrairement à Hedda.

« Comment se débrouille nos troupes à l'est ? » Demanda-t-elle finalement.

« Tout semble aller pour le mieux. » Vadir passa une main fatiguée dans ses cheveux blonds ternis par la boue et la sueur de la bataille. « Nos hommes ont le dessus. Les troupes du vicomte d'Orafell sont désorganisées et composées essentiellement de fantassins... Enfin, ce sont plutôt des paysans à qui on a donné une vieille épée usée. Dans tous les cas, nos soldats sont mieux entrainés et en supériorité numérique et notre cavalerie est bien plus grande. Demain soir, tout sera fini et nos pertes resteront bien plus faibles que les nôtres.

- Et qu'en est-il du front ouest ?

-Nos troupes sont en train de prendre le dessus. L'armée du vicomte d'Haalar et du comte d'Orung est mieux préparée et endurcie que celle du vicomte d'Orafell, mais nous aurons le dessus. Il faut bien avouer qu'ils ont plus de ressources que le vicomte d'Orafell. »

Hedda hocha la tête, le visage fermé. Elle tapota de la pulpe de ses doigts l'accoudoir de son fauteuil, visiblement agacée. Elle ne parvenait pas à comprendre l'intention de son oncle.

« Je suis sûre que mon oncle savait que nous l'emporterions. Alors pourquoi nous a-t-il envoyé des troupes ?

-Il voulait peut être tester vos capacités de meneuse, de stratège et de combattante. » Répondit Vadir. « Ces batailles lui permettent de gagner du temps, de vous fatiguer et de nous faire perdre des hommes. Sachant qu'en envoyant des troupes ici, nous ne pouvons apporter toute notre aide à la duchesse d'Ansburg, au comte de Djorg, au vicomte de Groff et au reste des troupes du duc d'Arun qui combattent aussi plus loin.

-Tu as sans doute raison. » Hedda ferma un court instant les yeux, elle paraissait avoir pris dix ans en une seule bataille. « Par Vafirh et Gharör, j'avais oublié ce petit souci dans le sud. Avons-nous des nouvelles ? Nous ne pouvons pas nous permettre de perdre une si grande partie de nos troupes. »

Vadir secoua la tête.

« Non, aucune nouvelle ni du sud, ni des troupes censées attaquer le domaine de la couronne par l'est. Mais, aux vues des circonstances, rien d'anormal. Les troupes de l'est n'ont pas de moyen de nous contacter et ont déjà nos ordres. Quant aux troupes du sud, nous pouvons être sûrs de recevoir un messager d'ici dans les prochains jours. »

Pensive, Hedda hocha la tête. Son cerveau tournait à plein régime, réfléchissant à toutes les stratégies possibles, tous les retournements de situation et tentant de rentrer dans la tête de son oncle pour savoir quel serait son prochain mouvement. Soudain, la jeune femme se leva. Perdant son calme, elle se dirigea vers la table qui siégeait au milieu de la pièce et se mis à fouiller frénétiquement les papiers qui s'y trouvaient. Cartes, lettres, livres, potentiels plans stratégiques, elle jeta un coup d'œil à tout ce qui se trouvait à sa portée comme si une réponse à ses questions allait surgir. Mais ce ne fut pas le cas et elle frappa nerveusement la table de son poing. Vadir, gêné, ne savait que faire. Il demeurait dans son coin, emmuré dans son silence.

Les Yeux de la ChouetteOù les histoires vivent. Découvrez maintenant