Chapitre XXIV : Miséricorde

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« Flèche ! [...] Ma flèche noire ! Je t'ai gardée pour la toute fin. Tu ne m'as jamais fait défaut et je t'ai toujours récupérée. Tu m'as été léguée par mon père comme ses pères t'avaient léguée à lui. S'il est vrai que tu es issue des forges du véritable Roi sous la Montagne, va sans tarder et ne t'égare point ! », Bard, Le Hobbit, Chapitre XIV.

***

Il ne lui fallut qu'une seule journée pour qu'Alyson rejoigne en toute hâte la maison de Kaïne et de sa fille. La nuit n'était pas encore tombée et la mutante repéra la silhouette de l'homme, penchée au-dessus du puits, un seau posé sur le rebord de pierres. Ayant laissé sa monture quelques heures plus tôt dans les plaines verdoyantes avant de s'engager sur les chemins rocheux, Alyson s'avança d'un pas lent.

Lorsque Kaïne se retourna, aucun d'eux ne bougea. L'une septique, l'autre surpris, ils ne savaient pas quelle réaction adopter. Une longue minutes s'écoula ainsi avant que la mutante décide d'avancer d'un pas.

- Kaïne...

- Non ! Vous n'avez plus rien à faire ici !

L'homme s'empara du seau avant de reprendre la direction de sa maison sans se retourner malgré les supplications d'Alyson.

- Kaïne, je vous en prie ! Vous devez m'écouter...

- Je ne veux plus rien avoir affaire avec vous ! Aboya l'Humain. Vous avez détruit ma vie, ainsi que celle de ma fille !

- Je le sais... Et rien ne sera jamais suffisant pour me faire pardonner, avoua Alyson en baissant la tête. Mais vous devez m'écouter. Vous êtes le seul à pouvoir m'aider. Mes amis, ainsi que les habitants de Lacville sont en danger ! Je dois les prévenir !

- Je n'ai aucune intention de vous écouter. Partez !

- Je ne partirez pas ! Hurla Alyson.

Kaïne se retourna. La peur s'insinua dans ses veines lorsqu'il croisa le regard charbonneux de la mutante. Il lâcha le seau et posa sa main sur le pommeau de l'épée rangée sous son manteau.

- Je ne veux faire de mal à personne. Je veux juste sauver mes amis. Rien de plus.

L'homme plissa les yeux. Combien de fois avait-il rêvé d'avoir le monstre qui avait détruit son village face à lui ? Rien ne pourrait faire disparaître la douleur qui lui compressait la poitrine depuis qu'il avait découvert sa femme et son enfant réduits en lambeaux. Et pourtant, il n'arrivait pas à l'avouer.

- J'ai voulu vous tuer. Plusieurs fois durant votre séjour ici, avoua Kaïne. J'en ai eu maintes fois l'occasion.

- Pourquoi ne l'avez-vous pas fait ?

L'homme la toisa du regard.

- Parce que je suis faible.

Alyson s'approcha de quelques pas et le regarda droit dans les yeux.

- Vous pensiez que votre peine aurait été amoindrie, supposa la jeune femme.

L'homme hocha la tête.

- Ce n'est pas de la faiblesse dont vous avez fait preuve. Mais de la miséricorde.

L'Humain ne répondit rien. Toujours la main posée sur son arme, il tourna la tête pour observer le lac s'étendre à l'horizon. De là où ils se trouvaient, la Montagne Solitaire se dessinait loin à l'Est comme une forteresse impénétrable.

- C'était si simple de vous haïr de loin, fit Kaïne. Détester une personne est bien plus simple lorsqu'on ne la connaît pas. Mais quand elle est face à vous, la tuer devient alors presque impossible.

Le Hobbit : À la reconquête de soi [Tome 1]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant