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- Je connaissais ta mère, m'annonce l'adolescent en osant enfin affronter mon regard. Urmi Bakshi. Je la connaissais depuis quatre ans.

- ... Quatre ans ?! répété-je, les sourcils arqués, les yeux écarquillés.

- Ouais, quatre ans. C'était une femme très gentille, qui voulait toujours aider tout le monde. Quand je l'ai rencontré pour la première fois, alors que j'avais treize ans, elle m'a aidé à surmonter le deuil de mes parents. Malgré mes amis de l'époque, et ma tante qui faisait semblant de se préoccuper de moi ... J'avais la terrible impression d'être seul au monde. Abandonné. Enfin ... Tu sais que ce ça fait de devenir orphelin.

Un coup de feu retentit quelque part au loin, me faisant sursauter. Instinctivement, je me tourne vers la porte d'entrée en fortune, que le soleil éblouissant de mai vient nimber. Mais cette déflagration ne nous était pas destinée. Mes épaules s'affaissent tandis que je reporte mon attention sur mon interlocuteur, qui continue son récit.

- Elle m'a aidé à devenir plus fort, à surmonter mon chagrin. Elle m'a pris sous son aile, et m'a appris à voir le monde comment il était réellement : pourri par la guerre, détruit à cause de la débilité des hommes. Plus les jours passaient, plus je commençais à comprendre que les bleus m'avaient lavés le cerveau pendant toutes ces années avec leurs belles paroles, leurs propagandes et tout ce qui va avec. Y compris mes parents. Mais c'était pas leur faute, ils faisaient que faire comme les autres. Ils faisaient que suivre cette foutue consigne, celle de consacrer leurs vies à vous haïr, vous les rougeauds, à multiplier les entraînements pour être prêts à vous tuer le jour J. D'ailleurs, c'était la faute de personne. Enfin ... Personne, à part cette tocarde de présidente bien sûr.

Il secoue la tête.

- Mais bref, c'est pas ça le sujet. Tu te souviens de notre rencontre ? Le soir où tu m'as menacé avec ton flingue pour la première fois ?

- Oui, acquiescé-je, je m'en souviens. C'était dans une rue commerçante abandonnée. Tu m'avais prévenue qu'il y aurait bientôt un attentat dans ma ville, sans préciser où en particulier.

- Exact. Eh bien ... Dès la première seconde où je t'ai vu, j'ai su que j'avais en face de moi la fille d'Urmi. Elle me parlait tellement de toi qu'il m'aurait été impossible de pas te reconnaître. J'ai voulu être sûr de ton identité en te demandant ton prénom, mais je savais que c'était pas vraiment la peine.

- Attends, tu ... Tu étais venu à Orléans exprès pour me rencontrer ?

- Pas du tout. A ce moment-là, je faisais qu'accompagner mon pote Wen pour explorer en douce la ville que sa classe et lui comptaient attaquer. A l'époque, je savais pas que j'allais te protéger, j'avais aucun compte à rendre. Crois-moi sur parole, notre rencontre a été un pur hasard.

Il fourre ses mains dans ses poches et vient observer la pluie de poussières qui danse dans le faisceau du soleil. C'est un très beau spectacle, que je décide d'enregistrer dans ma mémoire afin de le reproduire plus tard sur mon carnet de dessin.

- Quelques jours avant que ton lycée se soit fait attaquer, les professeurs ont annoncés à la classe de Wen que leur mission se déroulerait dans votre lycée. Et du coup, je suis partie avertir ta mère. J'ai cru qu'elle allait fondre en larmes tellement elle avait l'air bouleversée. Elle m'a suppliée de l'aider à te protéger de l'attaque, et j'ai pas réussi à lui dire non. Je lui ai dit que j'acceptais à une seule condition : celle de t'emmener dans le repère des incolores.

- C'est toi qui en a eu l'idée ? dis-je en fronçant les sourcils. Mais, ça n'a pas de sens ...

- Il y en a plus que tu le crois.

- Je ne comprends rien à ce que tu racontes. Pourquoi est-ce que tu voulais que j'aille dans le repère des incolores ? Je pensais que tu ne les aimais pas ! Et puis ... Comment ça se fait que tu connaissais ma mère, une rouge ? Alors que tu es un bleu ?

Il retrouve son sourire aussi rapidement qu'il l'avait perdu. J'ai l'impression que mes oreilles bourdonnent lorsque, sans laisser de répit, il me lance :

- Parce que je fais partie des incolores. C'est aussi simple que ça Neela. J'ai accepté de te sauver pour rassurer ta mère, mais pas seulement. Pour être honnête, au tout début, c'était surtout parce que j'avais envie que tu rejoignes les incolores. Parce qu'on est tellement peu nombreux, on avait vraiment besoin de nouvelles recrues ... Tu comprends ?

Je suis tellement choquée que j'ai laissé échapper un petit cri au moment où il a sorti la phrase « Parce que je fais partie des incolores ». A présent, je regarde Keo avec des yeux exorbités.

- Euh ... dis-je, le cœur palpitant. Je crois que j'ai mal compris ...

Mais il n'en a que faire de moi et de ma confusion, puisqu'il continue :

- Et pour ce qui est de ta mère ... Il faut que tu saches qu'elle était elle aussi une incolore.

Neela [Terminée]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant