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Cette fois-ci, ils sont si près que j'entends le corps des victimes tomber par terre. Quand je tourne ma tête vers le côté, je les vois. Ils sont immédiatement dissociables dû à leurs uniformes différents et leurs couleurs d'yeux. J'ai l'impression que l'air s'est échappé de mes poumons. Une dizaine de bleus mitraille les lycéens rouges avec leurs imposants fusils. Je n'arrive pas à voir le visage des tués, et je n'en ai pas envie. Peut-être que des camarades de classe se trouvent là-dedans.

Cette fois-ci, mon instinct de survie est en marche. Aussi terrifiée que je suis, je ne pense qu'à une chose : sortir d'ici. Un bleu aux cheveux longs se tourne vers nous, et alors qu'il lève son bras ... Une balle se loge dans sa nuque, et tout son corps bascule en avant. A côté de moi, Laslo pointe son pistolet dans tous les sens, les muscles saillants et les yeux plissés par le désir de vengeance. Il semble avoir oublié ma présence. C'est ma chance.

Je pique un sprint dans le couloir, en sautant par-dessus les corps inertes. Mon estomac se retourne face à tout ce sang et ces yeux rouges sans vie que je tente du mieux d'éviter. A un moment donné, je bute contre une jambe et j'atterris en plein dans une flaque écarlate. Le goût métallique du sang m'emplit la bouche, et je n'y tiens plus. Je vomis jusqu'à en avoir mal. Quand je me relève, mes bras frissonnent à ne plus s'arrêter. Mais j'ignore ma peur et je continue mon chemin.

Mes instituteurs ont toujours associés ma capacité à me faire oublier à de la faiblesse, mais aujourd'hui, ma discrétion est une force. J'ai l'impression d'être une petite souris qui file entre les lycéens et les ennemis, trop occupés à courir en criant pour me remarquer. Je rase les murs rouges sur la pointe des pieds, pistolet à la main. C'est surtout pour me rassurer qu'autre chose, car que vaut un pistolet face à un fusil ?

A mesure que je m'éloigne, il y a de moins en moins de monde. C'est normal : je m'enfonce dans une partie désaffectée du lycée où habituellement, il n'y a personne. Je passe devant des salles vides, continue d'enjamber des cadavres. Ma peur commence peu à peu à s'amenuiser ... Jusqu'au détour d'une intersection, où mon cœur loupe d'un battement. Le couloir est silencieux, mais trois bleus tiennent une rouge en joue. Celle-ci est accroupie par terre, et pleure abondamment. Je ne mets pas longtemps à la reconnaître.

Madeline.

- Allez, ricane une ennemie. Je veux t'entendre nous supplier de t'épargner. Si tu le fais, on te défoncera peut-être moins la tronche.

- Jamais de la vie, répond ma camarade, avec des trémolos dans sa voix.

Aucun des bleus n'a l'intelligence de surveiller les environs. Il doit sûrement s'agir de novices. En tout cas, c'est à mon avantage, car ils sont tous de dos. Je m'adosse près d'une porte, en priant pour que l'éclairage mal diffus me camoufle.

- ... Finissez-en, hoquète la jeune fille en baissant les yeux.

Neela [Terminée]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant