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C'est certainement pour cette raison que je m'en sors aussi bien. Car sinon, il est clair que Madeline m'aurait mise à terre depuis longtemps maintenant. Mais si je ne veux pas perdre la face, il faut que je tire avantage de son manque d'énergie. Je ne suis peut-être pas très forte, mais je suis agile et précise. Je peux y arriver.

Je me laisse prendre un coup de poing en ventre, en courbant mon dos et en contractant les muscles pour réduire la puissance de l'impact. Mais ensuite, je me redresse avec hâte et je la pousse en arrière de tout mon poids. Elle chancelle sans pour autant tomber sur le sol.

- Tu es toujours aussi sûre de gagner ? grincé-je en me ruant sur elle.

Là, je multiplie les attaques sans lui laisser le temps de comprendre ce qu'il lui arrive. Je la frappe plusieurs fois au plexus, puis je la fais tomber en élançant mon coude contre son menton. Elle essaye de se relever, mais je lui bloque les bras en m'asseyant sur son ventre.

- C'est de la triche, crie-elle en fronçant les sourcils. C'est de la triche !

Elle se débat comme une furie, mais il ne suffit que d'un seul coup de poing au nez pour la calmer. En la voyant dans cet état, un frisson me parcourt la colonne vertébrale. Elle est aussi faible que moi. Amochée, le nez en sang, elle ne ressemble plus en rien à la Madeline qui a pour habitude de se moquer de moi en classe.

Je ne sais plus ce que je fais, je ne sais plus où je suis. Je suis comme ... En état de transe. Est-ce ce sentiment là que les rouges normaux ressentent lorsqu'ils se battent entre eux ? Finalement, je suis peut-être avide de sang et de violence. Je suis peut-être une des leurs. Oui, j'ai ma place parmi eux. Je n'aurais jamais dû en douter. Je suis sur le point de la frapper à nouveau quand une main froide m'attrape le bras.

- Neela, stop.

Retour à la réalité. Je clique les yeux plusieurs fois, incrédule. Là, juste devant moi, Madeline est étendue par terre, les yeux fermés. Elle a perdue connaissance. Je me relève en tremblant, incapable de la regarder plus longtemps. Tout autour de moi, la petite foule rugit. Les rouges s'enthousiasment du spectacle auquel ils viennent d'assister. Opale m'applaudit avec ferveur.

- Ouais, tu gère cocote ! me crie-t-elle, les mains en porte-voix.

Je n'arrive pas à me mêler à eux pour fêter ma victoire, et je sais que c'est une erreur. Quelques secondes encore, j'avais réellement l'impression d'être puissante, redoutable même. Alors que s'est-il passé pour que ce sentiment d'invincibilité s'envole, et que je n'arrive plus à ressentir autre chose que de la culpabilité ? Je devrais me réjouir d'avoir mis ma rivale à terre, et pourtant ... Je suis là, à trembler comme une feuille.

- Neela ?

Je me tourne vers la personne qui m'appelle depuis tout à l'heure. Bien sûr, il s'agit de Laslo. Ce dernier est planté à mes côtés, les traits durs et les yeux scintillants. Impossible de savoir ce que son visage témoigne. De l'empathie ? De l'inquiétude ? A moins qu'il ne s'agisse de la pitié. Il m'attrape doucement la main et me dit :

- Viens. C'est fini.

Je hoche négativement la tête en tapotant mon holster de ma main libre.

- Opale m'a confié ton pistolet, s'empresse-t-il aussitôt de dire en me fourrant mon arme dans ma main. Allez, viens.

Neela [Terminée]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant