Chapitre 9

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Errant dans les rues de la ville, je suivais placidement Lucy me demandant jusqu'où elle allait me trainer comme cela. Elle n'avait rien voulu me dire après m'avoir sorti de chez moi sur notre destination finale et cela suscitait ma curiosité, chose extraordinaire vu le peu de fois où ça m'arrivait depuis mon accident. Surement était-ce pour cela que je la poursuivais sans rien dire, appréciant malgré tout de la voir marcher à mon rythme. Elle se calait naturellement sur ma vitesse, accélérant parfois le pas quand quelque chose l'intriguait, avant de ralentir de nouveau pour m'attendre. Son attention qui semblait tout à fait naturel pour elle me fit sourire. Cette fille était vraiment empathique avec les autres.

Elle tournait subitement à droite s'engouffrant dans un magasin de dessin. Intrigué, je la suivis, l'observant errer entre les rayons à la recherche de chose bien précise. Souhaitant l'aider dans sa recherche, je lui demandais ce qu'elle cherchait, ce à quoi elle me répondit qu'elle cherchait des poscas, des sortes de feutre apparemment. Je me mis donc en quête de ses feutres et les trouvaient avant elle. Son visage s'illuminait face à ma trouvaille et je ne pus empêcher un sourire de prendre place sur mon visage. Lucy possédait cet étrange don qui lui permettait de communiquer sa joie à quiconque l'entourait. Je l'avais déjà remarqué par le passé, mais ça me frappait encore plus aujourd'hui qu'on était seul dans cette papeterie. Comment une fille qui avait connu un tel drame dans sa vie pouvait communiquer autant de bonheur autour d'elle ? C'était un mystère pour moi. Pourtant en la voyant rayonnante tel un soleil, je me pris à espérer pour la première fois depuis longtemps. Si Lucy avait pu s'en sortir, alors moi aussi je le pourrais ?

Une fois ses achats terminés on sortis de la boutique et je laissais échapper une grimace en descendant la mini marche de l'entrée. Je sentais mes jambes me tiraient depuis un petit moment déjà mais j'espérais pouvoir marcher encore un peu plus longtemps. Je ne voulais pas quitter Lucy et retournais chez moi. Je ne voulais pas retourner dans la noirceur de mon quotidien morose, supportant les regards absents de ma famille. Je pris donc sur moi, essayant de ne rien montrer mais Lucy était perspicace, un peu trop peut être et elle décidait de stopper la balade. Tout du moins elle prit la décision qu'on aille s'installer sur un banc avec deux boisons chaudes afin de lutter contre le début de l'hiver. Assis à coté d'elle face à mon café, on buvait en silence. Etonnamment les silences avec Lucy n'étaient pas pesant, au contraire ils étaient agréables, reposants. Mais je décidais d'y mettre un terme, la curiosité me titillant.

- Alors comme ça tu aimes dessiner ?

- Oui c'est une de mes passions. Me sourit-elle.

- Tu as quoi d'autre comme passion ? Demandais-je.

- Hé bien tout ce qui touche à l'art en général. La photographie, la littérature, l'écriture... Mais c'est surtout le dessin que je préfère, j'aurais aimé devenir dessinatrice pour jeux vidéo. Se livrait-elle.

- Pourquoi tu ne le pourrais pas ? Questionnais-je, ne comprenant pas ce qui pouvait l'empêcher de réaliser son rêve.

- A la mort de mes parents j'ai reçu leur entreprise en héritage, à ma majorité j'en deviendrais officiellement la directrice.

- Mais si tu n'en veux pas rien ne t'y oblige n'est-ce pas ? Ne compris-je pas.

- Non... Mais... Je ne peux pas faire ça. C'est le travail de toute une vie, je ne peux pas l'abandonner même si ce n'est pas mon domaine de prédilection. Se mordit-elle les lèvres gênait.

L'observant à la dérobe, j'essayais de déchiffrer ses pensées à travers son regard et je ressentis une profonde tristesse vis-à-vis de sa situation. Il apparaissait clairement que Lucy ne voulait pas de cette entreprise mais qu'elle se sentait obligée de devoir la récupérer. Finalement nos vieux démons ne nous quittaient jamais vraiment. Je lui aurais bien dit de ne pas s'en préoccuper, que ses parents auraient surement voulu qu'elle soit heureuse mais qui étais-je pour lui dire ça ? Nous nous connaissions à peine en réalité.

- Et toi des passions dans la vie hormis le sport j'entends ? Changeait-elle de sujet, retrouvant sa bonne humeur.

- Pas vraiment, ma vie a toujours tourné qu'autour du sport. Enfin si, il y a bien les jeux vidéo mais c'est cliché pour un mec de dire ça non ? Relevais-je.

- Tu joues à quel jeu ? S'enflammait-elle.

- Euh beaucoup de MMO, RPG la dernièrement je joue pas mal au dernier Assassin's Creed. Ne compris-je pas son enthousiasme, avant que la lumière se fasse dans mon cerveau. Attends tu as dit que tu aimerais devenir dessinatrice de jeux vidéo ça veut donc dire que toi aussi tu aimes jouer ?

- Bien sûr j'adore ça ! Dis tu joue des jeux en ligne comme Dofus ou WOW ?

- J'y ai joué passer un temps mais depuis l'accident je n'y ai plus mis les pieds, l'ambiance est un peu bizarre dans ma guilde quand je suis connecté. Déplorais-je.

- On pourrait jouer ensemble si tu veux. Me sourit-elle.

- Vraiment ?

- Bien sûr !

- Dans ce cas faudrait qu'on se fasse des parties aussi quand tu viens à la maison, enfin si tu peux rester plus longtemps après tes leçons bien sûr. On a la switch et la PS4 à la maison pour jouer. M'excitais-je.

- Tu as mario kart ?

- Evidemment mais je te préviens je suis imbattable à ce jeu.

- Hum... Ca reste à voir. Je te prends dessus quand tu veux et pareil si tu as un jeu du style Call of Duty. Me défiait-elle.

- Ahaha c'est quand tu veux ! Rentrais-je dans son jeu.

On parlait ainsi de jeux vidéo et de plein d'autre sujet pendant des heures, ne voyant pas le temps passé. Pour la première fois depuis longtemps je me sentis vivant et ça fit du bien. Je vivais un moment honnête avec quelqu'un et je fus triste de devoir y mettre fin quand on vit la lumière du jour commençait à décliner. Lucy paniquant comme quoi elle allait se faire gronder par sa tante pour être partie aussi longtemps. Mort de rire face à sa tête affolait, pendant que elle me donnait des petites tapes sur le bras, me traitant d'imbécile sadique, je ne pouvais m'empêcher de rire lui disant qu'elle n'avait ni honte, ni honneur pour frapper un éclopé. Ce à quoi elle me répondit qu'elle n'aurait jamais honte de me frapper tant que je ne serais pas véritablement mort, accentuant mon fou rire.

Prévenante, elle me raccompagnait néanmoins jusqu'à mon domicile afin de s'assurer que je rentrais bien et n'ait pas de problème avec mes jambes. Une fois arrivé sur le pas de ma porte, on se regardait dans les yeux, elle me souriant, moi la remerciant pour l'après midi passé ensemble.

- Mais de rien. J'ai été ravi de passer cette après midi avec toi Natsu, on remet ça quand tu veux. Enfin après que je t'ai mis la raclé de ta vie aux jeux vidéo. Me challengeait-elle.

- C'est ça, c'est moi qui vais te faire pleurer. La prenais-je de haut, un sourire en coin au bord des lèvres.

On se quittait sur ses dernières paroles et je la regardais s'enfuir, me disant que je venais de gagner officiellement aujourd'hui une nouvelle amie. Je ne savais pas exactement pourquoi elle avait décidé de me sortir de chez moi aujourd'hui. Pourquoi elle avait tendu une main vers moi après presque deux mois à venir chez moi deux fois par semaine et dans le fond je m'en fichais. J'étais juste heureux d'avoir pu trouver quelqu'un qui me comprenait, avec qui je pouvais être moi-même comme avant ou presque. Pas une seule fois ou presque dans la journée, on ne parlait de mon accident, de ses conséquences et le seul moment où on y fit allusion ce fut pour en rire. Ca faisait tellement du bien.

Malheureusement Lucy venait d'emporter avec elle la seule once de normalité dans ma vie en même temps qu'elle. A peine fus-je rentré dans la maison que mon père me sautait dessus, me demandant comment j'allais, si je n'avais pas mal, s'il ne devait pas appeler un médecin. Lasse, je le repoussais avec ennui, essayant de ne pas m'énerver face à sa surprotection quasi constante. J'aurais pensé qu'il m'aurait posé des questions sur ce qu'on avait fait avec Lucy, sur pourquoi on était sortis en ville...ect. Mais non rien de tout cela. Seul mes jambes et mon accident lui importait. Je n'étais plus qu'une putain de victime dans cette maison qu'on se devait soit de couver, soit d'ignorer. Je sentis alors la seule petite étincelle de vie revenue à la surface se noyer à nouveau dans les limbes du désespoir.

Tu m'as redonné espoirOù les histoires vivent. Découvrez maintenant