Chapitre 10

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Je soufflais en retournant dans la fosse aux lions. Le retour en cours après mon weekend plutôt cool pour une fois faisait mal. Surtout de voir le comportement toujours aussi instable de mes amis. D'autant plus que la saison inter-lycée de handball venait officiellement de reprendre. Par conséquent ils jouaient encore plus de messe basse que d'habitude. Abattu, je ne pris même pas la peine de les rejoindre pour le déjeuner, je filais me planquer dans un coin tranquille où personne ne viendrait me trouver. Je m'étais préparer un sandwich en cachette ce matin juste avant de partir, sachant pertinemment ce qui risquait de m'attendre au lycée aujourd'hui. Roméo n'avait pas cessé de nous baratiner les oreilles sur le fait que l'équipe de Grey allait jouer son premier match de la saison et qu'on devait à tout prix y aller.

L'équipe de Grey. Quelle connerie ! Avant c'était mon équipe, c'était moi que mon frère voulait venir encourager pas mon meilleur ami. Grey par-ci, Grey par là il n'en avait plus que pour lui. Moi j'étais devenu transparent. Ma soudaine nonchalance vis-à-vis de lui ne l'inquiétait même pas. Il s'en fichait. La seule fois où il remarquait ma présence c'est quand je pétais les plombs, le faisant plus flipper qu'autre chose mais sinon je n'étais rien, si ce n'est un fantôme. Et le pire c'est qu'il avait réussi à me convaincre ce dimanche de venir assister au match avec lui et mon père. Je m'étais engagé à souffrir vendredi soir, juste pour essayer de ne pas paraitre comme un fantôme aux yeux de mon petit frère pitoyable.

Rageux, je ne finissais même pas mon encas, le jetant au loin. Ces idées noires me coupaient l'appétit. J'aurais donné tout ce que j'avais pour rentrer chez moi et m'enfouir sous ma couette, ignorant le reste du monde. Ou alors voir Lucy. Cette fille était bien la seule chose de bien qui arrivait dans ma vie en ce moment. Malheureusement cette semaine elle ne pouvait venir chez nous pour cause d'examen et bien que je le comprenais totalement, j'étais déçu de ne pas pouvoir la voir. Je ne pourrais pas profiter de ma seule dose de normalité en ce bas monde et pourtant Dieu sait à quel point j'en avais besoin. Je savais que c'était malsain de se rattacher à elle comme à une bouée de sauvetage et pourtant je ne pouvais pas faire autrement. Si seulement j'avais eu la bonne idée de lui demander son numéro de téléphone samedi dernier.

Lasse, je passais le reste de la journée à éviter Grey et les autres qui ne voulaient pas me lâcher. Ils voulaient savoir où j'étais passé ce midi, ce que j'avais fait, ce que j'avais... Le problème c'est que je savais très bien que j'allais les blesser si je leur disais la vérité. Ils éprouvaient déjà suffisamment de difficulté comme cela à rester en ma compagnie pour que j'en rajoute une couche. Les rares fois où j'avais craqué, je voyais bien que cela leurs faisaient du mal, qu'ils ne savaient pas comment réagir. Alors le mieux était de les ignorer, faute de pouvoir faire semblant. Parfois je me demandais encore ce qu'ils faisaient à trainer avec moi, ils ne me partageaient plus rien, avaient peur de me dire la moindre chose. Je n'étais plus un ami à leurs yeux mais juste une loque qui faisait pitié à voir et avec qui ils restaient par compassion, j'en étais sûr.

Je passais donc le reste de la semaine à les repousser encore et encore, disparaissant le midi. Au bout du troisième jour, ils n'y firent plus attention et ne me posaient plus de question. Parfait. Eloigné vous de moi les gars, je n'ai plus rien à vous apporter de toute façon, si ce n'est des soucis. Vous aviez mieux à faire que de vous intéresser à moi, concentrez-vous et gagnait ce match de hand, que les yeux de mon petit frère brillent de mille feux. Même si ça signifiera surement ma disparition totale à ses yeux, quand il se rendra compte que mon équipe n'avait absolument pas besoin de moi pour jouer et gagner. Je n'étais qu'un jouer parmi tant d'autre, quelqu'un qu'on pouvait remplacer facilement.

Mon retrait du monde des vivants, se manifestaient aussi à la maison. Le cœur remplit d'appréhension au fur et à mesure que le jour J se rapprochait, je m'enfermais dans mon mutisme. Eloignant mon père, qui était pourtant le seul à se faire encore du souci pour moi. Il ne comprenait pas mon comportement, il ne me comprenait plus depuis longtemps et cela ne faisait qu'empirer de jour en jour. Il croyait me rendre heureux en m'amenant voir le match de hand de mon équipe mais il n'en était rien. C'était même tout le contraire mais je ne pouvais pas le contredire. Il serait bien capable de renoncer à s'y rendre et déjà que mon frère ne me voyait plus si je l'empêchais d'y aller, il me détesterait.

Tu m'as redonné espoirOù les histoires vivent. Découvrez maintenant