The Ruler Game - T2 (EN PAUSE)

👑 CHAPITRE 33 👑

Un grognement. Un craquement. C'est tout ce que ça prends. Une ombre dans un ciel orageux que l'on n'aurait ratée s'il n'y avait pas eu cet éclair. Dehors, la pluie s'abat. Le ciel se débat.

- Elle est là, soufflé-je à voix basse.

Les gouttes s'écrasant par millier couvrent le moindre bruit. Les vitres du château sont prises d'assaut par la météo désastreuse et il ne faut que quelques minutes aux premiers détecteurs installés à la lisière de la forêt pour sonner.

A cet instant précis, dans le plus grand des silences, tous comprirent. La guerre est à nôtre porte.

- Votre Altesse ! lance Kaïen

- Je sais, que tout le monde garde son calme. Que chacun se tienne prêt. Où en est-on de l'évacuation des villages avoisinants ?

- Nous avons presque terminé.

- La météo est à nôtre avantage, tirons profit de ce moment pendant que les pièges retarderont les troupes de la Princesse Ivory. Voyons si la Princesse apprécie l'effort que nous nous sommes donnés dans la comité d'accueil. Nora ?

- Oui, Votre Altesse ? s'arrête cette dernière à ma hauteur

- A-t-on des nouvelles de.... ?

- Non...Votre Altesse.

Je ne pouvais plus l'escompter. Ni même l'attendre.

Il y a des jours de cela, j'ai réalisé que ma vie entière reposait sur l'attente de quelque chose qui s'apparentait de près à un miracle. Toute ma vie j'ai fui, je n'ai pas souvent pris la bonne décision, je n'ai pas écouté, j'ai ignoré et enfin j'ai fini par me faire rattraper par tous un tas de choses m'explosant au visage. J'ai compris que je ne serais jamais la Princesse que les gens attendent que je sois. Je ne serais jamais celle sur qui les gens peuvent compter. Je ne serais jamais Reine de Nettivia car depuis le début, être toutes ces choses ou même les frôler du doigt ne m'était pas permis. Depuis le début, je vivais dans l'illusion de belles paroles d'un homme que je ne connaissais même pas.

«Je ferais de vous la Reine du Royaume de Nettivia» disait-il. Et je l'ai cru. Oh comme j'aurai aimé ne pas être naïve à ce point là. Comme j'aurais aimé ne pas accepter son offre. Comme j'aurais aimé me tenir à distance de tout cela, de cette guerre ridicule et de tout le reste.

Comme j'aurais aimé faire les choses différemment.

Ne pas être partagée entre deux choix : Celui de s'en foutre complètement et celui de se battre pour ce royaume désespérément.

Oui, j'aurais aimé faire les choses différemment car aujourd'hui, voilà qu'il ne m'est même plus possible d'éprouver le moindre regret.

- Votre Altesse ! Les premiers pièges se sont déclenchés.

- Tenez vous prêts. Nous aurons peut-être à affronter les foudres d'une guerre qui n'épargnera aucun de nous.

J'échange un regard avec Roxan et me prépare également. Je me battrais. Jusqu'au bout. Je me battrais pour ces gens dont le regard est partagé entre la terreur et la détermination. Je me battrais pour ces gens qui ont cru en moi et qui continuent de le faire alors que je ne leur promet rien. Nous mourons peut-être demain. Cela en est même certain, mais nous aurons essayé. Essayé de montrer l'exemple à travers le Royaume. Essayé de leur faire comprendre que depuis trop longtemps notre vie est gouvernée par des gens s'amusant de ces dernières comme si elles ne valaient rien.

- Êtes-vous sûre ? m'interroge Roxan en m'attrapant par le bras tandis que je range l'arme dans son étui que j'attache à ma cuisse.

- Ivory ne s'arrêtera pas tant qu'elle n'aura pas eu ce qu'elle veut et pour cela, elle fera absolument tout ce qui est en son pouvoir même si elle doit raser une province dans son intégralité. Elle le fera. Celestia est une province désolée, personne ne la pleurera. Personne ne la soutiendra. Personne ne l'aidera à affronter cela. Alors si nous n'essayons pas à notre échelle de faire quelque chose, nous ne pouvons pas espérer changer le monde.

- Vous ne pouvez pas aller là-bas, seule.

- Je n'irais pas. J'ai appris ma leçon. Je ne jouerais plus jamais sur son terrain de prédilection, néanmoins, je refuse de rester les bras croisés. Je connais ma sœur et son obsession... Elle viendra pour moi. En attendant, vous m'avez promis de veiller sur ces gens et de les maintenir en sécurité le temps qu'il faudra. Je compte sur vous pour tenir cette promesse Roxan.

- J'ai combattu dans bien des guerres pour le compte de la famille Boùrbon et je n'ai jamais rechigner à faire le sale boulot, mais cette bataille, Votre Altesse, ne prendra fin qu'avec la mort d'une Princesse.

- Alors prions pour que ce ne soit pas la mienne. Prions fortement.

Car honnêtement, j'ai un doute. Je sais que le château et le bouclier de Valerian tiendront pendant quelques jours, mais je ne sais pas ce que cela m'en coûtera à moi. Je n'ai pas les caractéristiques d'un Général, ni ne possède un quelconque génie militaire. Tout ce que je sais, c'est que nous sommes en sous-effectif, mal équipés, mal préparés et que la majorité des gens venus défendre le peu de choses qu'ils leur reste est là, la peur au ventre tandis que la mort se lève suite aux premières explosions retentissant au loin.

Elle est là. A quelques kilomètres de nous. Elle est là, prête à en découdre.

Et pour la première fois de ma vie, je me sens toute aussi prête. Pour la première fois depuis longtemps, je n'ai pas peur car on dit que la mort est une journée qui mérite d'être vécue. Ai-je un quelconque regret ? Un quelconque remord ? Des sentiments mis de côté ? Oh que oui, j'en ai des tas car j'ai commis un tas d'erreurs dans ma mince petite vie, mais décider d'affronter Ivory n'en est pas une. Je le sais.

Car si quelqu'un doit mettre un terme à cette monarchie ridicule et si, pour cela, il me faut couper la tête du serpent vénéneux qu'est la famille Boùrbon, alors je le ferais. Je me le suis promis. Je me le dois.

- Est-ce que tout le monde est prêt ?

- O..Oui !

- Je reformule ma question : Est-ce que tout le monde est prêt ? Car il sera bientôt trop tard pour vouloir revenir en arrière.

- OUAIS !

Il sera bientôt trop tard pour regretter. C'est maintenant ou jamais.