Le bain

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Pdv Marc

Je me réveille le lendemain matin avec une furieuse envie de bacon et d'œufs brouillés. C'est l'heure du petit dej' et on a décidé de le faire tous ensemble entre pilotes avant de partir pour une nouvelle semaine d'entraînement.
J'enfile un jean et un simple tee-shirt blanc Honda puis enfile ma casquette 93 en descendant les escaliers. J'ai à peine le temps de relever les yeux que je percute quelqu'un de plein fouet. Nous tombons tous les deux à terre et je ne peux m'empêcher de lâcher quelques jurons.

- T'es sérieux ? Tu peux pas regarder où tu vas ?

C'est cet imbécile d'Espargaro, j'aurais dû m'en douter. J'ai beau faire équipe avec lui cette année, il faut reconnaitre que j'avais connu de meilleures collaborations. En dehors des campagnes de pubs et de promotions pour Honda nous n'étions pas très proches. Je me relève et lui tend la main pour l'aider mais il la balaye en un revers et se met debout seul.
Son expression change tout à coup et il affiche à présent un sourire narquois.

- Alors comme ça on cède déjà la place à ce que je vois ? On se fait vieux Marquez !

Il rigole maintenant à gorge déployée puis s'éloigne en rejoignant les autres. Je prends un autre chemin pour accéder aux tables alignées et me place dans la file pour me servir au buffet. Je remplie mon assiette jusqu'à ce qu'elle déborde puis vais m'asseoir à côté de mon frère.

- Salut ! Bien dormi ?

Je sais ce que signifie sa question et je lui offre mon meilleur sourire hypocrite.

- Tranquila, ça n'arrivera plus. Il n'y a de place que pour un seul champion ici. 

Nous rigolons ensemble et je le ébouriffe les cheveux avant de me retourner vers mon assiette. 

- Faudrait que tu changes de refrain mon pote, je vais finir par penser que tu as vraiment peur de moi.

Je reconnais immédiatement la voix du français qui vient s'asseoir juste à côté de moi avec Tom. Je meurs d'envie de regarder mon assiette et de me taire à cet instant mais je soutiens son regard, plongeant dans ses deux yeux bruns, les sourcils froncés. 

- Ce n'est pas moi qui me sens intimidé, crois moi.

J'ai fais exprès d'appuyer sur le mot « intimidé » afin qu'il comprenne que je l'avais entendu hier soir et même si cela semble légèrement immature, cette petite joute augmente encore davantage mon appétit.

Fabio se détourne et regarde Tom qui fait une moue d'incompréhension en haussant les épaules.

Je vois que Fabio n'a rien dans son assiette et j'ai tout de suite envie de lui donner la mienne, comme une mamie qui ne remplie jamais assez l'estomac de ses petits enfants. À part pour mon frère, jamais je n'avais ressenti ce genre de... 
Peu importe, il faut simplement que j'admette qu'il m'a impressionné hier et que malgré mon esprit de compétition, je l'admire.

Lorsque j'ai terminé mon assiette, je me lève pour la débarrasser et en repassant derrière Fabio, qui a toujours son assiette vide, je ne peux m'empêcher de lui glisser à l'oreille :

- Tu devrais prendre des forces parce que je ne te ferai pas de cadeau la prochaine fois.

Il ne se retourne pas mais je sais qu'il sourit discrètement.

Après mon footing, je décide d'aller me rafraîchir dans un lac pas loin du circuit. La chaleur là-bas est adoucie par le vent violent mais j'ai besoin de décompresser avant de rejoindre mon coach. Je retire mon tee-shirt trempé et plonge sans réfléchir dans l'eau. Elle est agréable, à la température parfaite. Je décide de faire quelques longueurs puis me laisse flotter un moment.

Sans prévenir, une main vient s'écraser sur mon torse et m'immerge complètement. Je me débats et ressors la tête de l'eau presque immédiatement pour reprendre mon souffle. C'est à ce moment que j'entends son rire résonner. Fabio est avec moi dans l'eau et se retient pour ne pas mourir de rire. 

- Mais qu'est ce que tu fais ? 

Je me demande ce qui est en train de se passer pendant quelques secondes en fronçant les sourcils mais le son que produit son rire est tellement agréable et sa bonne humeur si communicative que je n'ai pas d'autre choix que de rire avec lui. Cependant, je prends malgré tout la décision de le noyer à mon tour et nous nous battons ainsi jusqu'à ce que nous n'ayons plus d'air. Je passe ma frustration dans les courses de crawl que nous effectuons. Il faut dire qu'il est bon nageur mais pas autant qu'il est bon pilote. 

Après toutes ces chamailleries, nous nous étendons dans l'herbe et j'entends nos souffles bruyants résonner à l'unisson dans ce silence soudain. En tournant la tête vers lui, je remarque qu'il ne cesse de sourire et j'ai envie de rester là toute la journée. Nous n'avions jamais été proches tous les deux mais nous venions d'agir comme si nous étions amis, comme s'il n'y avait rien plus naturel. Jusqu'à maintenant, rien ne m'avait semblé étrange. 

- Il faut que je rentre m'entraîner, dis-je sèchement en me relevant tout en m'essorant les cheveux avec mon tee-shirt.

Je ne sais pas ce qui lui était passé par la tête mais je ne pouvais pas me laisser distraire dans ma mission. J'avais prévu de le déstabiliser, pas de bien m'entendre avec lui. Je ne peux pas m'empêcher de me retourner en m'éloignant et je vois qu'il s'est relevé sur ses coudes pour me regarder partir. Pendant un instant, je regrette de ne pas pouvoir voir ses yeux derrière ses lunettes de soleil. 

J'allais de nouveau gagner le championnat cette année, que l'on s'entende si bien ou non.

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