Rivals

Faire de nouvelles expériences

Pdv Fabio 

Je m'entraine tellement dur que je n'ai même pas le temps de penser. La musique recouvre le bruit insupportable de mes pensées. Chacune d'entre elles me ramènent à ce matin, à cette dernière nuit. Lorsque je regarde mes mains sous la table, je les imagine se glisser de nouveau à travers les boucles du brun, agripper ses épaules, s'emparer de la moindre parcelle de sa peau. 

Après quelques semaines, le sentiment a diminué. Des images reviennent toujours mais je parviens à les chasser. Je suis de nouveau concentré, entièrement. Je suis peut-être moins souriant mais je gagne ou je sauve de gros points face à Marc et Bagnaia, qui est revenu au championnat. 

Entre Tom et moi tout roule, comme avant. La vie a simplement repris son cours. Sans lui à mes côtés. Je décide de doubler de vitesse dans mon footing matinal quand je sens mon téléphone vibrer contre ma main, ce qui me force à ralentir pour parvenir à lire le nom inscrit sur l'écran. E-surf. 

- Salut Fabio ! Tu vas bien ? 

Sans que je ne puisse contrer les mécanismes vicieux de mon cerveau, la seule réponse qui s'impose à moi est "non". Je préfère donc garder le silence et me racler la gorge pour retrouver une certaine contenance. 

- Bon je t'appelle parce que vu que t'as deux semaines complètes avant le prochain GP, on se disait que tu pourrais venir t'exercer sur ta planche, afin de nous redonner un petit coup de promo et puis, histoire que ta planche ne rouille pas ! 

Son rire ne soulage en rien le vide immense qui vient de s'ouvrir dans ma poitrine mais je décide de chasser immédiatement et pour de bon toutes ces pensées parasites. J'allais redevenir le Fabio que tout le monde connait. Le Fabio joueur, hyper-actif, drôle et souriant. Il fallait que je reprenne une vie un tant soit peu normale en dehors de la moto. 

- Ça me tente carrément ! 

- Ok bin on se retrouve vendredi pour un resto d'abord et le lendemain on sort les planches. Bon par contre, il n'y a rien de sûr encore, mais il risque d'y avoir un autre gars, un autre sportif que notre discipline intéresse, je te tiens au courant, salut Fabio ! 

Il n'y a déjà plus personne au bout du fil lorsque je termine de digérer ce flot de parole supersonique. Qui cela pouvait-il être ? Peu importe. J'allais me changer les idées et me resociabiliser. C'était exactement ce dont j'avais besoin. 

Le sur-lendemain, je suis prêt à sortir de chez moi. Prêt à voir d'autres personnes que Tom ou mes neveux. Je pouvais continuer à vivre, j'en avais le droit. Le monde était resté le même, simplement... il avait malgré tout changé, pour moi. Je voyait mon univers à moitié vide à présent, vide de lui. Il me fallait simplement autre chose, une béquille pour m'empêcher de boiter continuellement, de porter tout le poids de mon corps. 

- Fabio ! 

Deux bras musclés viennent s'enrouler autour de mes épaules et je reste un instant interdit durant cette étreinte. Lorsque l'homme se recule, je peux reconnaitre le visage familier de Javier. Nous avions fait de la moto cross ensemble à quelques occasions puisqu'il habitait aussi en Andorre. Il était loin d'être mauvais mais ce n'était pas la seule activité sportive qu'il pratiquait et cela ne m'étonnait pas de le voir ici pour essayer cette nouvelle façon de surfer. Je n'arrive pas bien à expliquer ce qui provoque cet immense sourire sur mon visage. Peut-être est-ce en écho direct à celui de Javier, tellement communicatif. 

- Alors apparemment c'est en bonne voie ce championnat du monde hein ? 

Tout en m'entrainant vers la plage il passe son bras gauche par-dessus mes épaules et me rapproche de lui. Je me raidis quelque peu à ce contact, comme s'il m'était interdit. Je me contente de lui offrir un sourire gêné comme réponse et il me donne une tape assez violente dans le dos.