Pdv Fabio
Evidemment, je n'ai pas bien dormi. Je me sens vidé, épuisé et vu ce que je vois sur mes écrans, Marc est gonflé à bloc. Il a déjà enfilé son casque depuis cinq minutes et fixe le vide avec des yeux aussi noirs que transparents. On dirait qu'il a abandonné la raison, ou plutôt, que la raison a abandonné son esprit. Pendant un instant je m'inquiète de ce qu'il va faire et de la manière dont il va réussir à se mettre en danger puis Tom me ramène à moi-même.
- Mec le feu est vert, faut y aller.
Je remonte la fermeture éclair de ma combinaison et enfourche ma moto après avoir checké les gars de ma team. J'ai beau rouler dans un temps canon, le chrono de référence de chaque nouveau tour est établi par Marquez. Lorsque je rentre au stand pour me préparer au second run, je vois sur l'écran que la caméra suit Marc au cours de son tour. J'ai l'impression qu'il est à la limite, comme s'il était sur le point de tomber à chaque courbe. Mon sang ne fait qu'un tour quand je le vois récupérer une perte de l'avant et je vois sur l'écran d'à côté que la caméra fait un gros plan sur moi en train de regarder la performance du 93. J'espère que je n'ai pas trop laissé paraitre mes émotions stupides et je me dépêche de remettre mon casque. Je dois déjà repartir et je n'ai pas regardé mes stats avec mon ingénieur. Peu importe, de toute façon aujourd'hui, il ne semble y avoir qu'un maître de la piste, à mon plus grand regret.
Evidemment, il se qualifie en Q2 et décroche la Pole position. Emilio exulte dans le box Honda et je me rends au parc fermé puisque j'ai décroché le troisième temps.
Je crois défaillir quand je vois Marc passer la main dans ses cheveux trempés, la bouche ouverte, montrant sa fatigue. Je me reprend cependant très vite et vais taper dans les mains de ma team, très contente pour moi. Oliveira vient me féliciter et me prend dans ses bras amicalement.
- Merci pour la deuxième place !
- Tu ne la dois qu'à toi Miguel !
Tout sourire, il se retourne vers Marc et fais de même avec lui. Lorsqu'Oliveira s'éloigne pour rejoindre les micros, nous restons l'un face à l'autre comme deux statues. Son regard est noir un instant puis finis par s'attendrir et redeviens celui que je connais bien, celui que je voyais au réveil dans ce grand lit... Au moment où il tente de me parler je détourne le regard et me rends à mon tour aux micros de Canal.
En sortant du parc fermé, je croise Emilio qui m'arrête par le bras.
- Comment tu vas ?
Je le regarde avec incompréhension pendant quelques instants. Où voulait-il en venir ? Voulait-il me provoquer ou s'inquiétait-il réellement de mon état émotionnel ? Vu ce que j'ai entendu au téléphone, je ne sais pas quoi en penser mais je décide de ne pas lui faire confiance, malgré tout ce qu'il a pu faire pour moi dans le passé.
- Mieux que jamais.
Il me regarde avec pitié et c'est la seconde de trop.
- Maintenant lâche-moi et va rejoindre ton champion.
Tom me suit en tenant toutes mes affaires dans ses mains jusqu'au camion.
- Écoute-moi d'accord, je sens que tu es énervé et je comprends, mais essaie vraiment de faire la part des choses pour demain au moins.
- Faire la part des choses ? Tu ferais la part des choses si tu devais croiser Mathilde dans le paddock tous les jours alors qu'elle t'as brisé le coeur ? Comment tu veux que je fasse la part des choses alors que le mec que j'aime est un putain de menteur ?
Un silence s'installe et il me regarde avec autant de compassion que de surprise. Je m'écroule sur le canapé toujours en combinaison, la tête entre les mains. Je revoie son regard dans le parc fermé et je me demande ce qu'il allait me dire. Je sais que je ne devrais pas y penser mais c'est plus fort que moi. Chacune de mes pensées est dirigée vers lui, quoi que je fasse.
- Bon je vais te laisser. À demain pour la course.
Tom passe la porte avant que je ne puisse lui répondre et je me retrouve à nouveau seul, dans le silence.
- Tu préfères... être plongé dans un silence total ou être submergé par une foule en délire ?
- C'est quoi ce dilemme ?
Il rigole et enfourne un chamallow grillé dans sa bouche, ce qui, à ma grande surprise, est très sexy. Puis il se met à parler la bouche pleine, me donnant des justifications incompréhensibles.
J'éclate de rire et il me donne des coups avec le bâton dont il se sert pour faire griller les chamallow .
- C'est bon, c'est bon ! Je vais répondre ! Bien sûr je préfère le silence.
Il avale ce qu'il a dans la bouche avant de me prendre mon bâton des mains. Il s'avance doucement et glisse la friandise entre mes lèvres.
- Tu es sûr ?
Les flammes de notre feu de camp se reflètent dans sa rétine tandis qu'il se rapproche un peu plus de mon visage. Je déglutis difficilement en reculant tout d'un coup et il m'offre un petit sourire en coin.
- Ça veut dire que tu serais seul... Tu ne pourrais plus entendre ma voix...
- Est-ce que ce serait une si grande perte ?
Pour une fois dans ces petits jeux de provocation, je prends les devants et le fais basculer en arrière sur le sable. Il se met à rire mais je l'embrasse avant de me laisser désarçonner. Ses mains caressent ma peau nue pendant que je lui retire son tee-shirt et que la chaleur du feu qui brûle à côté nous gagne et nous consume entièrement.
Lorsque mes yeux s'ouvrent à nouveau, le souvenir disparait et je suis dans le noir, assis dans mon lit, seul. Oui, c'est une perte, et c'est seulement ce soir que je me rends compte à quel point. Pourquoi fallait-il que tout soit...merdique ?
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Rivals
FanfictionCe sport est sans pitié et ils se feront prendre à son jeu. Deux pilotes au plus haut niveau s'affrontent autant sur la piste que dans leur vie personnelle et les enjeux s'entremêlent. La limite entre les deux mondes qu'ils doivent concilier est trè...