SUNFALL Tome 1 : La Chute de l'Olympe

Chapitre XXII

Will Solace :

Le Soleil émerge lentement de la ligne d'horizon, par-dessus l'océan. Les premiers rayons lumineux viennent chatouiller mon visage, illuminant mes cheveux bouclés d'un éclat doré. Je resserre autour de moi un fin duvet, me rapprochant davantage du feu allumé par Léo pour contrer la fraicheur du petit matin.

Lui et moi avons volé durant toute la nuit. Le fils d'Héphaïstos espérait dénicher des indices sur la destination de Nico autour du camp sang-mêlé ou le long des côtes, mais nous n'avons rien trouvé... pas la moindre trace. Puis, avec la venue de l'aube, nous n'avons pas eu d'autre choix que de se poser, survoler les Etats-Unis sur un immense dragon doré, en plein jour et à la vue de tous, n'étant clairement pas l'idée du siècle. Nous nous sommes donc finalement installés sur une plage encore déserte de Floride, les restes d'un panneau, victime des talents de conducteur de Léo à l'atterrissage, arborant le nom de Crescent Beach.

-Tu as de la chance tu sais... Me lance soudain mon compagnon de quête, se rasseyant à mes côtés et portant ses mains aux flammes, les attisant grâce à sa pyrokinésie.

-Comment ça ? Demandais-je, tournant mon attention vers le fils d'Héphaïstos, mon visage dépassant à peine de la fine couverture emmitouflant mon corps.

-Nico. Précise-t-il. Tu as de la chance de l'avoir man. Malgré toutes vos différences, vous avez su vous accepter, vous apprécier, vous attacher l'un à l'autre. Votre histoire est vraiment belle Will.

Les paroles de Léo me laisse songeur, mon regard venant à nouveau se perdre, comme mes pensées, dans les vagues aux reflets argentés et dorés du lever de Soleil. C'est vrai que j'ai une chance incroyable d'avoir Nico, et tous les soirs, alors que je me perds dans la contemplation des étoiles, je remercie les cieux de l'avoir mis dans ma vie. Sa silhouette élancée, sa peau laiteuse, ses cheveux d'ébène, ses magnifiques yeux marrons... tout me plait chez lui. Même son caractère et ses petites mimiques quand il se met en colère ne le rendent que plus adorable et mignon à mes yeux. Nous avons mis beaucoup de temps tous les deux à créer un lien. Les petites visites à l'infirmerie, les entrainements au combat dans l'arène, les soirées passées à admirer côte à côte le coucher de Soleil, j'ai savouré chaque instant passé avec Nico comme autant de plus beaux moments de ma vie. Et maintenant, mon Deathboy s'est enfui par ma faute... Mais je le jure sur le Styx, le jour où je le retrouverai, je ne laisserai pas filer ma chance de gagner son cœur.

-Je t'envie... Souffle Léo, venant alors briser le cours de mes pensées. Moi aussi j'aimerai avoir quelqu'un qui me considère à ma juste valeur, quelqu'un à qui penser en me réveillant le matin, quelqu'un qui m'aime pour ce que je suis vraiment... Termine mon ami dans un murmure, une larme solitaire venant tracer un long sillon sur sa joue, ses yeux humides fixant le sol.

-Léo Valdez... Regarde-moi. Appelais-je mon ami, prenant son menton dans ma main afin de capter son regard. Tu es un demi-dieu juste incroyable, un beau garçon, gentil et drôle, littéralement le petit ami idéal ! Tu veux que je te dise ? Calypso ne te méritait pas, elle n'a même pas eu l'intelligence de voir la perle rare qu'elle avait déniché. Mais je suis certain, que quelque part dans ce monde, il y a quelqu'un qui t'attend. Et qui sait ? Peut-être que cette quête te permettra de trouver la bonne personne.

-Merci man. Articule mon ami dans un sourire. En tout cas, les divinités immortelles c'est fini pour moi, j'ai assez donné ! En fait, pour être honnête, je pense que le départ de Calypso a eu l'effet d'un électrochoc sur moi ; j'ai réalisé que... ATTENTION ! S'écrie soudainement le demi-dieu à mes côtés.

Je n'ai guère le temps de comprendre la situation, tout se passe beaucoup trop vite. Léo se jette sur moi, nous faisant tomber à la renverse sur le sol froid, son corps sur le mien, nos cheveux et vêtements d'aures et déjà envahis par le sable. Puis je ressens un violent impact, tout près, nous faisant sursauter tous les deux. Une pluie de fins grains salés vient nous recouvrir, me brûlant les yeux et obstruant ma vision.

Je sens soudainement le poids du corps de Léo sur moi s'évaporer. Luttant contre la douleur, j'entrouvre mes paupières, percevant avec difficulté le fils d'Héphaïstos debout face à moi, me tendant sa main. La saisissant, je me redresse aussitôt, m'emparant de mon arc et mon carquois. J'encoche immédiatement une flèche à la pointe de bronze céleste. Léo, lui, génère déjà des flammes émanant de ses poings fermés, alors que nous nous approchons prudemment du point d'impact, une épaisse fumée ocre nous entourant. Deux silhouettes se dessinent doucement à travers la brume, Léo et moi sommes sur le point de nous lancer à l'attaque, lorsque qu'une voix vient soudainement interrompre tout mouvement.

-N'attaquez pas ! Je vous en prie, nous avons besoin d'aide ! S'écrie effectivement une voix masculine.

Plissant les yeux, un véritable choc vient me frapper lorsque je réalise à qui nous avons à faire.

-Hermès ? Interroge immédiatement Léo, exprimant à voix haute mes pensées comme s'il pouvait les lire.

Le dieu messager se tient effectivement devant nous. Dans un piteux état, de nombreuses blessures sanguinolentes barrant ses bras, ses jambes et son torse, Hermès est à terre, tenant contre lui, sur ses genoux, une autre divinité.

-Aphrodite ?! M'exclamais-je aussitôt.

-Hélas... Acquiesce lentement Hermès, un mince filet de sang s'échappant de son arcade sourcilière ouverte, taillant son chemin sur son visage avant de venir rougir le sable de la plage.

La déesse de l'amour et de la beauté git inconsciente dans ses bras. Contrairement au dieu messager, Aphrodite ne porte pas de multiples séquelles d'un rude combat, une unique plaie, semblable à celle d'une pointe de flèche, vient seule marquer sa poitrine, saignant abondamment. Je distingue à peine le faible soulèvement de sa cage thoracique, chaque expiration semblant être un atroce supplice pour la déesse.

-Mais que s'est-il passé bon sang ! Eclate Léo à mes côtés, à la foi empli de rage et assailli par l'incompréhension, tout comme moi d'ailleurs.

-L'Olympe est tombé. Lâche Hermès, ses mots retombant lourdement dans l'air pesant. Gaia est de retour et Arès s'est empressé de la rejoindre. Il nous a tous trahis, tous vendus. Il s'est assuré de paver la voie aux armées de la déesse de la terre mère jusqu'à l'Empire State Building.

-L'enfoiré ! Coupais-je rageusement le dieu face à moi.

-Je ne te le fait pas dire... Continue amèrement Hermès. Nous n'avons pas eu l'ombre d'une chance. Ils nous sont tombés dessus par surprise, nous exterminant comme du bétail. Certaines divinités ont réussi à réchapper au massacre en prenant la fuite. J'ai reçu les derniers ordres de Zeus avant d'assister à sa mort de la main même de Gaia. Manhattan est aujourd'hui à feu et à sang...

-Fils d'Apollon... approche je te prie. Articule soudainement et avec peine Aphrodite, entre deux quintes de toux, coupant court au récit alarmant d'Hermès.

M'abaissant immédiatement au chevet de la déesse, cette dernière se saisit de mes mains, le contact de sa peau, froide comme la mort, m'électrisant.

-Le temps presse jeune demi-dieu... Prononce difficilement la déesse. Il te faut retrouver l'élu de ton cœur au plus vite, le sort de notre monde en dépend.

Aphrodite vient alors délicatement apposer ses doigts sur mon torse, à l'emplacement de mon cœur. Ses yeux se métamorphosent en deux écrins dorés scintillant comme deux Soleils, alors qu'une voix puissante vient franchir la barrière de ses lèvres, avant que le regard de la déesse ne s'éteigne à jamais.

- « Que le fils de la lumière et celui des ténèbres se lient, car seule l'alliance charnelle du Soleil et des Enfers peut espérer défaire la puissance de la terre mère ».