Nico Di Angelo :
24 heures plus tôt
« J'ai froid... non, je suis gelé », il s'agit sûrement de la seule pensée obnubilant mon esprit, alors que l'obscurité m'encercle de ses doigts glacés. Mon corps semble comme paralysé alors que je sens tout à coup un souffle chaud venir délicatement caresser mon visage.
Ouvrant les yeux, je reconnais aussitôt Thémis. Laissant doucement mes doigts effleurer sa crinière d'ébène, le majestueux pégase hennit tendrement à mon toucher. Je sens ses naseaux se frotter contre mes cheveux, me poussant à me relever.
Suivant les encouragements de ma monture, je me redresse lentement sur mes coudes... Mauvaise idée.
- Dannare... Sifflais-je aussitôt entre mes dents, une douleur lancinante prenant d'assaut mon corps tout entier.
Luttant contre la souffrance, je me penche encore davantage, me rendant compte de mon état... Mon jean noir est réduit en une multitude de lambeaux de tissus, alors que mon tee-shirt n'est lui plus qu'un... lointain souvenir. Mon corps, en particulier mon torse, est barré de dizaines de griffures et coupures, desquelles s'écoulent de maigres filets de sang entre mes abdominaux, se contractant sous l'effet de la douleur.
C'est à la vue du liquide pourpre s'émanant de mes plaies que tout me revient en mémoire. La tempête... juste après mon départ des Enfers. Les vents, déchirant mes vêtements, fouettant et lacérant ma peau. Les pluies torrentielles, battant contre mon visage, me trempant jusqu'aux os, la sensation de froid, insupportable, me transperçant telle une centaine de lames acérées. Les éclairs, terriblement puissants, taillant d'éclatantes colonnes d'électricité pure ; leur chaleur s'entrechoquant avec l'air glacial, créant des spirales infernales nous balayant toujours plus violemment, Thémis et moi.
Et enfin cette voix, comme un murmure luttant contre la furie des éléments. Sa voix si familière... avant qu'un éclat lumineux ne vienne me frapper de plein fouet, me faisant dégringoler des cieux.
- Will... Murmurais-je, me retrouvant à présent seul sur une plage déserte.
J'ai eu tort. J'aurai mieux fait de l'écouter et de rester au centre de soins. D'accord, les lits ne sont pas très confortables, mais avec un infirmier canon ça reste supportable... Bon peut-être même appréciable à la rigueur...
Je me suis sacrément trompé. Je m'en rends bien compte maintenant ; et je ne sais pas ce que je donnerais aujourd'hui pour retourner au camp Sang-mêlé... et retrouver mes rendez-vous privés à l'infirmerie.
« Tu es vraiment ridicule... » N'a de cesse de me marteler ma conscience. Will n'a jamais arrêté de prendre soin de moi, de supporter mes sauts d'humeur, et juste pour une malheureuse erreur je le lâche, non, je m'enfuis.
Je suis un lâche, voilà tout. Nico Di Angelo, je suis fils d'Hadès, je suis devenu roi fantôme, j'ai affronté des monstres, survécu au Tartare, combattu Gaia... Et pourtant, toute ma vie, je n'ai fait que fuir... fuir mes sentiments.
D'abord avec Percy. J'ai refoulé mes sentiments par peur, les dissimulant sous la haine en le tenant pour responsable de la mort de Bianca. Puis j'ai échoué à le sauver des profondeurs du Tartare dans les souterrains de Rome, étant incapable de saisir sa main à temps.
Et maintenant avec Will. Il m'a permis d'oublier mon Crush sur le fils de Poséidon. Et même si je me doutais bien que ces « trois jours à l'infirmerie » et « ordres du médecin » n'étaient qu'un prétexte pour passer du temps ensemble, je me suis laissé prendre au jeu, m'attachant dangereusement au fils d'Appolon. Seulement, une fois de plus, à trop m'attacher, j'ai pris peur de mes sentiments.
Sérieusement, j'ai tout gâché. Un infirmier beau comme un dieu grec, gentil et attentionné s'intéresse à moi, et je fuis encore une fois, incapable de franchir le pas. Vraiment pathétique... Pourtant, ce jour-là, lorsque je m'étais avancé pour déposer un baiser sur la joue de Will, j'avais hésité... La tentation de goûter à ses lèvres si désirables avait été si forte... et pourtant j'avais encore renoncé.
Renoncer à vivre pleinement par peur de ses sentiments, voilà à quoi se résume ma vie. Je suis né il y a presque un siècle, mais je n'ai toujours pas réussi à offrir la clé de mon cœur, à condition qu'il aie eu une serrure un jour...
Mes pensées se voient bien vite coupées par la douleur, me rappelant à l'ordre. Le sable tout autour de mon corps est d'aures et déjà imbibé de sang, de fins grains salés s'infiltrant dans mes plaies ouvertes, me faisant un mal de chien...
- J'aurai vraiment dû rester avec toi, Will. Murmurais-je, alors que mes yeux se voilent ; ma dernière vision avant de sombrer dans l'obscurité étant Thémis hennissant follement, les rayons du Soleil se faufilant dans sa crinière de jais flottant au vent, berçant mon visage d'une douce chaleur avant la froideur du silence et du néant.
VOUS LISEZ
SUNFALL Tome 1 : La Chute de l'Olympe
Hayran KurguLes Dieux ont failli. La prétendue victoire finale sur la déesse mère n'était qu'un leurre. Gaia est de retour, plus puissante et dangereuse que jamais, dévorée par sa folie vengeresse. Nico di Angelo ne le sait que trop bien, seul il n'aura aucune...