Chapitre 3

412 39 7
                                    

Mes doigts pianotent sur le clavier de mon ordinateur portable, comblant le silence de la pièce. Déjà deux heures que nous sommes ici, dans cette chambre d'hôtel avec ses deux lits séparés pour Madyson et moi. La rousse n'a pas eu le temps de déballer ses affaires, elle s'est écroulée sur le lit et s'est endormie à peine deux minutes plus tard. Et moi, j'ai profité de ce moment de répit pour sortir mon outil de travail personnel et bosser. Ce projet est la seule chose qui m'intéresse vraiment. Malgré les ordres donnés par mon Alpha, ma priorité reste la même.

-Tu travailles toujours ? résonne la voix de Madyson, me ramenant à la réalité.

Je tourne la tête vers la rousse qui semble venir de se réveiller. Je lui trouve un certain côté mignon avec ses cheveux en bataille et ses yeux ensommeillés. Peu importe qu'elle soit pâlichonne, maigre et que ses yeux soient cernés. À mes yeux, elle est splendide.

Et elle ne laisse pas mon loup indifférent non plus.

Celui-ci semble un peu plus agité maintenant que Madyson m'a interrompu dans mon travail. Le projet que je construis ne parait pas l'intéresser contrairement à cette jolie rousse aux yeux bleus qui le captive. Pourtant, ce projet, je le construis pour nous, pour que l'on trouve enfin un but et une place dans ce monde. Madyson, elle, n'est qu'une âme de passage dans notre vie tragique.

-J'ai des choses importantes à régler.

-Ah oui ? Je peux savoir sur quoi tu travailles ? me demande t-elle en se redressant.

Je secoue la tête de gauche à droite d'un air sérieux. Madyson grimace. Elle se lève, puis se met à farfouiller dans l'une de ses deux valises avant d'en ressortir quelques vêtements. Elle s'engouffre ensuite dans la salle de bain. Quelques secondes plus tard, je l'entends actionner le jet d'eau de la douche.

Je me recentre sur mon ordinateur, continue mes calculs, envoie des mails à quelques-uns de mes contacts importants, quand Madyson ressort de la salle de bain, propre et habillée d'un jean moulant ses fesses à la perfection et d'une chemise dont les premiers boutons sont ouverts. Ses cheveux encore humides tombent en cascade dans son dos. Le bleu polaire de ses yeux semblent luire davantage alors que ceux-ci me balayent du regard. Je déglutis.

Pourquoi a-t-il fallu qu'elle soit mon type de femme ?

Et depuis quand ais-je un type de femme ?

-Qu'est-ce qu'on fait ?

-Je n'ai pas terminé, donc pour le moment, on reste ici.

Je vois à sa mine contrariée que ceci ne lui plaît pas. Elle va malgré tout s'asseoir sur le bord de son lit en silence et je peux me remettre au boulot. Mais au bout de quelques secondes, je sens le regard limpide de la belle rousse me fixer avec intensité.

-Qu'y a-t-il ?

-Rien.

Je m'efforce de travailler, mais le regard de Madyson me déstabilise, tout autant qu'il agite mon loup qui grogne après moi et mon écran.

Je sais ce qu'il souhaite. Cela fait quelques années que je n'ai pas séduit de femelle. Mais celle-ci, il en est hors de question. Séduisante ou pas, Madyson est ma protégée. Elle est aussi amnésique, vulnérable, et quant à moi, j'ai trop de problèmes à gérer pour inclure une femme dans ma vie.

De toute façon, qui souhaiterait d'un métamorphe handicapé tel que moi ?

Madyson soupire, tenaillée par l'ennui. Quelques secondes passent dans le plus grand silence, jusqu'à ce qu'elle se relève brusquement, attrape sa veste et file à travers la pièce jusqu'à la porte de la chambre qu'elle ouvre à la volée. Avant que je ne puisse faire quoi que ce soit, elle referme la porte et s'en va.

-Eh merde !

Je referme le battant de mon ordinateur que je balance à côté de moi sur le matelas puis m'élance à la poursuite de la rousse. Mon loup jubile de cette course-poursuite. Il est rare que nous vivions de choses exaltantes. Notre vie est plutôt paisible. Madyson bouleverse notre quotidien si tranquille.

-Madyson ! je l'appelle lorsque j'aperçois sa silhouette sortir de l'hôtel.

Je cours pour la rattraper. Le soleil est bien haut dans le ciel. Il n'est que quinze heures, et la circulation est forte. Le bruit de tous ces moteurs qui passent près de moi me donne envie de rugir.

-Je croyais que tu ne voulais pas sortir tant que tu n'aurais pas fini. me nargue la petite rousse à quelques mètres de moi.

-Rentre.

-Hors de question ! Je ne suis pas venue ici pour me tourner les pouces. Si tu souhaites tant rester dans une chambre à bosser sur je-ne-sais-quoi, tu n'aurais pas dû accepter de m'accompagner ici. Et de toute façon, tu n'es pas obligé de m'accompagner, je peux me débrouiller toute seule ! proteste t-elle avec véhémence.

Je soupire. Je ne peux pas faire autrement que de lui donner raison. J'ai reçu un ordre de mon Alpha. Important ou pas, je dois laisser ce projet de côté pour remplir mon devoir.

-Je t'accompagne.

-Mais...

-Ma mission est de te protéger et de t'aider. C'est pour ça que je suis ici. Alors je vais t'accompagner et tu vas gentiment accepter. Capiche ?

Elle me fusille un instant du regard, puis un sourire se dessine sur ses lèvres rosées.

-C'est d'accord.

Puis elle m'attrape par le bras et me fais avancer. Nous marchons côte à côte dans les rues de cette ville maritime que je n'ai jamais visité jusqu'ici, et je me surprends à trouver cela agréable.

Mais alors que Madyson s'extasie devant la vitrine d'une boulangerie, mon portable se met à sonner dans la poche arrière de mon pantalon. Je l'en sors et l'allume pour en découvrir la raison et découvre un mail urgent de mon associé. Préoccupé, je me mets un peu à l'écart de la foule et commence à rédiger une réponse. Mais alors que mes doigts tapotent sur l'écran tactile du téléphone, je sens mon loup s'agiter. En relevant la tête, j'aperçois - ou plutôt n'aperçois pas - l'absence de la jeune rousse à mes côtés. Je m'avance dans la rue, cherche de tout côté, sans parvenir à retrouver l'humaine.

Madyson a disparu.

ConvoitiseOù les histoires vivent. Découvrez maintenant