Convoitise

Chapitre 10

Le reste de la nuit a été éprouvant suite à la venue de Madyson. Je n'ai cessé de me creuser les méninges, cherchant à savoir si oui ou non le rapprochement entre elle et moi signifie quelque chose pour elle. Mon cerveau est assailli de questions auxquelles nous n'avons pas les réponses. Une partie de moi, la plus raisonnable, se dit que Madyson a déjà beaucoup de problèmes à gérer dans sa vie, et que flirter avec un métamorphe n'est sans doute pas dans ses projets, d'autant plus que je ne suis pas le parti le plus intéressant des environs. Mais une autre part de moi espère ardemment que mes sentiments soient réciproques et que Madyson désire bien un plus entre nous.

C'est beau de rêver.

La voiture prend un virage serré, ballotant mon corps dans tous les sens à l'arrière, sur la banquette. Le jour levé, nous avons loué une voiture avec le reste de l'argent qu'il me restait, puis nous avons pris la route vers le territoire de la meute. Ayant veillé toute la nuit devant la porte de la chambre de Mady et Thaïs, j'ai décidé de laisser le volant à cette dernière pour me reposer un peu. C'est sans compter la conduite si douce de la louve. Je grogne ma désapprobation, ce qui fait râler la conductrice.

-Cesse donc de m'importuner avec ton sale caractère !

Je grogne un peu plus, les yeux fermés avec force en espérant pouvoir me reposer malgré la louve désobligeante. Parfois, j'aimerais que tout ceci ne soit qu'un mauvais rêve et que Thaïs disparaisse de mon champ de vision à l'instant où je me réveillerais. Mais cela voudrait dire qu'il n'y aurait pas de Madyson, et ça, c'est non négociable.

-De toute façon, nous sommes arrivés. Tu pourras passer tout le temps que tu souhaites à pioncer chez toi.

J'ouvre les yeux et me relève brusquement. Je frotte mes yeux fatigués d'un geste las et jette un coup d'œil à travers la vitre. Je reconnais de suite la forêt qui arbore le territoire de la meute.

Déjà ?

Je considère Madyson assise sur le siège passager qui observe le paysage d'un air distrait. Je ne sais pas ce qui va se passer à présent, si les choses vont revenir à la normal, comme s'il ne s'était rien passé, ou si au contraire notre petite aventure aurait chamboulé quelque chose. J'aimerais garder contact avec Madyson.

Un contact très proche si possible.

Il faut déjà que je sache si ce sentiment est partagé, et je n'ose pas aborder le sujet avec elle. Tout ça me fait peur. Je me sens perdu. J'ai envie de construire quelque chose avec Madyson, ne serait-ce que quelque chose d'infime, mais en même temps je ne me sens pas fait pour aimer, ou être aimer. L'amour, c'est beaucoup de responsabilité, et je suis déjà incapable de la protéger comme il se doit.

Dans combien d'autre domaine vais-je échouer ?

Le temps passe et les questions se multiplient, tout comme le sentiment de doute qui s'amplifie. Je m'interroge sur mes capacités à prendre soin d'une personne autre que moi-même, et à la combler. Je ne suis pas un métamorphe à part entière, je ne suis même pas sociable. Peut-être suis-je ennuyeux, peut-être même déplaisant, voir insupportable. La véritable question n'est pas de savoir si Madyson éprouve la même chose que moi à son égard, mais de comprendre si je suis assez bien pour elle, si je ne serais pas un fardeau si jamais on venait à créer un " plus " ensemble.

Si seulement la réponse ne me faisait pas aussi peur.

Le véhicule s'arrête enfin et Thaïs en sort la première. En descendant à mon tour, je constate que quelqu'un attendait notre arrivée. Contre toute attente, ce n'est pas Léo, notre Alpha, mais un jeune loup que j'ai eu le déplaisir de croiser quelques fois. Je ne me souviens pas son nom, mais je me rappelle bien avoir été écœuré par ce type exultant de bonheur.