Chapitre 15

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Mordre. Griffer. Déchiqueter. Faire gicler.

Alors que mon loup prend le contrôle pour la toute première fois, seuls ces pensées viennent tourner en boucle dans nos esprits. Des idées meurtrières, sanglantes, délirantes, un instinct sauvage que je n'avais encore jamais ressenti avec autant d'intensité. Seul une chose compte à présent.

Arracher la tête du métamorphe qui s'apprête à nous enlever notre humaine.

Notre cible est là, juste derrière la fragile silhouette de Madyson, sa main griffue levée, hésitant sur la démarche à faire à présent que les choses ont changé. Mon loup se campe sur ses pattes, bien décidé à se jeter sur lui avant qu'il ne prenne une décision. Ses oreilles s'abaissent sur son crâne poilu, ses babines se retroussent pour montrer ses crocs saillants dans un grognement féroce. Il gratte la terre du bout des griffes, cherchant où frapper, puis, une fois décidé, s'élance à toute vitesse.

Bien que ce soit notre première métamorphose, mon loup sait parfaitement contrôlé son corps. Poussant sur ses pattes arrières, il s'élève un instant dans les airs, survolant le corps de Madyson à genoux dans la boue, avant de renverser le corps de son assaillant de ses pattes avants. Le métamorphe tombe en arrière dans la gadoue, bientôt écrasé par le poids de mon loup qui vient lui comprimer la cage thoracique. Pas le temps de jouer avec sa proie, il enfonce ses crocs dans la peau tendre de sa gorge et s'acharne sur sa jugulaire.

Le sang est bienvenu dans notre gueule. Il coule abondamment, comme une fontaine délicieuse. Je sais que mon loup serait volontiers resté là à dépouiller le cadavre de sa toute première victime, mais le grognement des autres changeurs de peau, remis de leur stupeur, nous ramène à la raison.

Madyson n'est toujours pas en sécurité.

-Comment cela est-il possible ?! s'exclame vivement l'Alpha de la meute, stupéfait et furieux à la fois.

Mon loup se redresse, résigné, puis fait face aux autres métamorphes, grognant après eux. Mais Léo s'avance, le torse bombé, prêt à en découvre. Il inspire fortement, puis rugit. Nous sursautons à l'entente de ce son nouveau et puissant, si particulier. Comprenant que nous ne sommes pas de taille contre ces quatre métamorphe, mon loup agrippe le pull de Madyson avec ses crocs et l'a fait basculer sur son dos musclé. Puis il grogne une dernière fois avant de fuir à toute vitesse dans les profondeurs de la forêt, notre humaine bien installée au-dessus de nous.

Personne n'a tenté de nous suivre, sans doute parce que Léo pense que nous ne remettrons jamais les pieds ici pour déjouer ses plans. Mais mon loup a tout de même continué de courir sur plusieurs kilomètres, plus que ravi d'enfin pouvoir être maître de ses gestes. Il finit par s'arrêter une centaine de mètres avant l'orée de la forêt. Fatigué de s'être autant dépensé, il laisse retomber Madyson sur le sol puis me laisse reprendre forme humaine.

Quelle expérience étrange.

J'ai toujours été au contrôle, cette fois était la première où quelqu'un d'autre maîtrisait mon corps - enfin plutôt son corps, le corps d'un loup. C'est une sensation bizarre, mais toutefois agréable pour un métamorphe. La transformation est capitale pour le bien-être d'un changeur de peau. Aujourd'hui j'ai eu enfin la possibilité de découvrir ce que ça fait.

Et c'est chouette.

Je me laisse retomber sur le dos dans la boue, essoufflé après tous ces kilomètres parcourus. Le sourire aux lèvres, je me mets à rire un instant. Puis, pensant à Madyson, je me relève vivement.

-Je me suis transformé ! Tu as vu ça !? Pour la première fois ! Moi qui pensais que ça ne serait jamais possible ! Je me suis transformé !

Mais la rousse détourne aussitôt le regard, les joues cramoisies, comme gênée. Je penche la tête, perplexe face à ce comportement inattendu, avant de me rendre compte que je suis nu.

ConvoitiseOù les histoires vivent. Découvrez maintenant